06/10/2009
l'épreuve de Julien Dray
L'épreuve
Julien Dray
Editions "Le cherche midi"
Il y a bientôt un an, à 6heures 35, le matin, soixante policiers procèdent à des perquisitions simultanées pour tenter de prouver que le député Julien Dray a bénéficié de "chèques de complaisance" de la part d'associations qu'il a aidé à naître, notamment "SOS racisme" et la Fédération des Lycéens.
Pendant que sa femme et ses enfants voient les policiers envahir leur appartement parisien, il est dans son logement de l'Essonne, où se trouve sa permanence de député.
Alors qu'il ne sait pas encore ce qui lui est reproché, la presse, manifestement avertie, le présente comme un acheteur compulsif, collectionneur de montres très chères ("ma collection de montres de luxe -j'aimerais bien qu'elle existe", vivant au dessus des moyens d'un député.
Combattant politique blessé, manifestement prêt à faire autre chose que de la politique dans la dernière période de sa vie, Julien Dray clame son innocence, et dans ce livre thérapie, s'adresse successivement aux un(e)s et aux autres pour dire sa détresse, ses indignations, dressant au passage un tableau très noir du PS, de la justice, de la presse.
Il dénonce les journalistes, "trop paresseux pour mener leur propre enquête", "qui se prennent non seulement pour des juges et des policiers, mais aussi pour des experts comptables", "juge, jury exécuteur", "les chiens" comme a dit Mitterrand (François), lui qui ne portait jamais de montre, aux obsèques de Pierre Bérégovoy, victime, lui aussi, d'un lynchage médiatique.
François Mitterrand qui a été le seul parlementaire de gauche, avant Julien Dray, à bénéficier de l'"honneur" d'avoir son bureau perquisitionné à l'Assemblée nationale.
Julien Dray décrit "une pratique journalistique consistant à devenir le porte-voix et le diffuseur d'officines qui recourent à l'intox et à la manipulation de l'opinion, jusqu'à prendre les couleurs du harcèlement". Il a gagné son premier procès pour diffamation contre "Le Point", les autres sont en attente. Cela a fait, à peine, un entrefilet dans les journaux.
Il raconte la saisie de son calepin bourré de chiffres qui se révèlent être non pas les relevés de ses mouvements financiers...mais de son taux quotidien de diabète !
Il dénonce la réforme de la justice qui met l'enquête préliminaire sous la responsabilité non pas d'un juge d'instruction, mais directement sous la tutelle du "parquet" et donc du ministre de la justice et il propose une "sécurité sociale de la justice".
Il voit un lien entre ses velléités d'être Premier Secrétaire du PS, et ses ennuis.
Il regrette amèrement l'attitude de "prudence" de Martine Aubry, et de Ségolène Royal qu'il a appuyée de toutes ses forces lors de l'élection présidentielle.
Il regrette "ces petites mesquineries que l'on se permet quand on voit un homme amoindri, et que l'on ne le sent plus en capacité de nuire".
"Quand la tension monte, les uns et les autres succombent à leurs pires travers et se livrent à des escarmouches où tous les coups sont permis, et même certains que l'on ne délivrerait pas à nos adversaires politiques".
"Nous n'avons plus de colonne vertébrale idéologique. Nous n'avons plus de projet qui fasse immédiatement sens dans l'esprit de nos concitoyens ou qui leur donne simplement envie".
"Sans ligne idéologique, nous sommes dans l'opportunisme et l'empirisme le plus total".
Il tente de se consoler avec Lévinas : "Ce qui n'aura pas d'importance dans cinq ans n'a pas d'importance aujourd'hui.", Adriano Sofi : "Etre fidèle à soi-même, tel qu'on a été, est une nécessité urgente et stupide" et la maxime "J'ai perdu mes certitudes mais gardé mes convictions".
"On est qu'un petit caillou, tout petit. Il y a une Histoire qui nous dépasse et qui continue. Il faut tout relativiser au regard de celle-ci."
08:40 Publié dans vie politique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : politique, littérature
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