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11/09/2010

Viens voir les Bohémiens

« (…) Je me suis pâmé, il y a huit jours, devant un campement de

Bohémiens qui s’étaient établis à Rouen. — Voilà la troisième fois que

j’en vois — Et toujours avec un nouveau plaisir. L’admirable, c’est

qu’ils excitaient la Haine des bourgeois, bien qu’inoffensifs comme des

moutons. Je me suis fait très mal voir de la foule en leur donnant

quelques sols — Et j’ai entendu de jolis mots à la Prud’homme. Cette

haine-là tient à quelque chose de très profond et de complexe. On la

retrouve chez tous les gens d’ordre.

C’est la haine que l’on porte au Bédouin, à l’Hérétique, au Philosophe,

au solitaire, au poète — Et il y a de la peur dans cette haine. Moi qui

suis toujours pour les minorités, elle m’exaspère — Il est vrai que

beaucoup de choses m’exaspèrent. Du jour où je ne serai plus indigné, je

tomberai à plat, comme une poupée à qui on retire son bâton. (…) »

 

 

Gustave Flaubert, lettre à George Sand, 12 juin 1867 (Correspondance, éd. de la

Pléiade tome 5, pp. 653-654)

08:41 Publié dans EUROPE | Lien permanent | Commentaires (0)

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