31/12/2009
innocentes à la valise trop pleines
Dans une prison de Saint Domingue
Il y a trois ans, en République dominicaine, je suis allé visiter une prison « modèle », construite avec l’aide de l’Union européenne.
Quand on voit le rapport du Conseil de l’Europe sur l’état des prisons en Fiance, les classant au niveau de celles de la Moldavie, on espère que notre pays n’a pas servi de …modèle !
J’ai demandé à rencontrer les Françaises qui y étaient détenues, ce que j’ai pu faire sans témoins.
J’ai parlé, en particulier, avec une jeune femme comme celles qui viennent d’être graciées : sans histoire, sans « casier », bien intégrée dans la vie, en vacances à Saint Domingue, jusqu’à la découverte d’un paquet de drogue dans sa valise, déposée là « à l’insu de son plein gré ».
Elle était, bien entendu, choquée de se trouver en prison. Elle passait le temps libre en apprenant l’espagnol et en enseignant le français à ses codétenues. Elle regrettait de ne rien avoir à lire en français. Je me suis fais un plaisir de lui envoyer un paquet de livres. Le plus dur pour elle est que, depuis sa condamnation, son père refusait de la voir, et même de lui parler au téléphone. Je sais que les hommes peuvent être cons, je pensais que les hommes étaient moins cons dans leur rôle de père… J’étais touché, car quel père peut avoir la certitude que son enfant ne se trouvera jamais dans cette situation ? A l’époque, elle avait fait appel, et était pleine d’espoir. Elle regrettait également de recevoir moins de visites de nos services diplomatiques que ses compagnes des autres pays de l’Union européenne. Quand j’en ai fait la remarque à l’ambassadeur de France, il m’a répondu, laconique, qu’il était normal que les Néerlandaises, plus nombreuses, reçoivent plus de visites…Il m’a également expliqué que le « protocole » permettant à chacun(e) d’accomplir sa peine dans son pays était en négociation. Il vient enfin d’être conclu, quatre ans après l’accord entre l’Allemagne et la république dominicaine. Quels étaient les obstacles ? Pourquoi tant de temps ?
Le ministre dominicain de la justice m’avait expliqué que le nombre de jeunes filles piégées ainsi, toutes se proclamant innocentes, était en augmentation, que le scénario était toujours le même, tout comme le « profil » de ces jeunes, que la drogue était rarement découverte par hasard, que le verdict était sans surprise : 8 ans de prison, avec un retour en France à la moitié de la peine. Un moindre mal, car il n’y a pas qu’en Chine que cela est passible de la peine de mort.
Que doivent penser nos 17 nos compatriotes actuellement en prison à Saint Domingue pour ces raisons ? Qu’ils et elles n’ont pas la chance de venir de la circonscription élective d’un ministre en campagne électorale ? Que la justice n’est pas la même pour tout le monde ?
J’ai téléphoné à la maman de la jeune détenue que j’avais rencontrée, pour avoir des nouvelles. Elle a bientôt fait la moitié de sa peine. Elle a quitté la prison « modèle » qu’elle ne supportait plus. Elle espère bien revenir bientôt en France, sans ministre, sans photographes ni caméras…
15:32 Publié dans billet | Lien permanent | Commentaires (1)
Commentaires
Edifiante histoire...
Écrit par : Frédéric Dubuisson | 31/12/2009
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