20/06/2015
Gangsterrorisme
Le chant du converti
Sébastian Rotella
éditions Liana Levi
De Sebastian Rotella, j'ai déjà parlé de Triple Crossing, paru en 10/18. L'histoire d'un flic américain qui patrouille à la frontière pour tenter d'empêcher les passeurs mexicains d'introduire aux Etats-Unis drogue et immigrés illégaux, puisque là bas aussi les filières sont les mêmes.
Ce Chant du converti commence par un attentat sanglant dans un centre commercial, à Buenos Aires. A la suite du héros, l'auteur nous emmène en Bolivie, puis, pour toute la deuxième partie en France. Je me demande ce que les lecteurs anglo-saxons de Rotella pensent de notre pays, avec ces banlieues qui brûle et cette police qui respecte peu les droits de la défense des suspects . Troisième partie en Irak puis, pour finir, en Uruguay.
Filières de la drogue qui financent le terrorisme. Connexions entre services secrets...
"Le processus de radicalisation habituel : la criminalité conduit à l'extrémisme, et le trafic de drogue se justifie par le djihad. C'est le "gangsterrorisme".
"Devenir terroriste, c'est un peu comme intégrer un gang. On s'associe à de sales types pour avoir l'impression d'être un dur." "Les extrémistes sont en quête d'identité."
"L'attentat de Bombay en 2008 était une opération menée par un groupe terroriste, en collaboration avec les services secrets pakistanais, après deux ans de préparatifs."
"Les Iraniens ont fait appels à des sunnites nord-africains lors des attentats qui ont frappé l'Europe dans les années 80.Ce pays a également accueilli les responsables d'Al-Qaïda en fuite, arme utile contre l'Occident Israël et l'Arabie Saoudite."
"Deux sortes de terroristes : les fous furieux, et les mercenaires au sang-froid."
"Un acte terroriste est avant tout un acte de communication"
"Beaucoup de filles originaires des banlieues rejoignent l'armée ou la police. Ca leur permet de rompre avec les cités, les fondamentalistes, leurs familles."
08:38 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature, polar, terrorisme
19/06/2015
La loi du marché : ce n'est pas que du cinéma
La loi du marché
De Stéphane Brizé
Avec Vincent Lindon
Vincent Lindon joue le rôle d'un chômeur en recherche, active, d'emploi. Il encaisse courageusement les humiliations. C'est dans ces scènes que Lindon est parfait. Ancien technicien qualifié, il accepte de travailler au service de sécurité d'un grand magasin.
Face au petit vieux qui a volé une barquette de viande qu'il n'a pas les moyens de payer, face aux caissières qui ont mis dans leur poche des bons de réduction, et vont être licenciées, il ne peut que se poser des questions sur son rôle.
Un film social engagé, avec une portée politique qui montre les difficultés actuelles du monde du travail.
Je voudrais signaler de nouveau deux films dont j'ai déjà parlé dans ce blog, et qui auraient mérité autant de succès que La loi du marché : "Jamais de la vie" de Pierre Jolivet, avec Olivier Gourmet jouant un ancien syndicaliste devenu gardien de nuit sur le parking d'un super marché. "Discount" de Jean-Julien Petit, avec Corinne Masiero, qui raconte la lutte de caissières d'un supermarché, en prise, justement, avec la vraie loi du marché.
16:08 Publié dans Film | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma
18/06/2015
la galère d'une préparation de thèse
Carnets de thèse
Tiphaine Rivière
éditions du Seuil
Jeanne, professeur de collège dans une ZEP est acceptée comme "doctorante". Elle va donc préparer une thèse. Sur "Le motif labyrinthique dans la parabole des portes de la Loi dans Le Procès, de Kafka". Pour cela elle se met en disponibilité de l'Education nationale. Mais il faut bien vivre. Elle donne des cours à l'université, peu payés, payés avec retard, ou même pas payés du tout. Mais qui demandent des heures de préparation ! Ou des travaux de secrétariat dissimulés sous des appellations pompeuses.
Quelques années, et plus de 3000 ouvrages critiques plus tard, le moment de la rédaction est le plus délicat. "Elle refichait tout ce qu'elle avait déjà lu à chaque fois qu'elle essayait de commencer à rédiger." Puis arrive le moment où l'auteur a tellement relu qu'il ne veut plus voir son texte "même relire ce que j'ai écrit me donne envie de vomir."
La famille est sceptique, et admire le cousin qui prépare une thèse scientifique.
La vie devient vite insupportable pour le compagnon. La thèse est l'obsession. En dehors des heures de travail alimentaire, pas question de sortir avec les copains, de se divertir. "Elle a un énorme tas sur son bureau avec marqué : papiers administratifs.Elle n'ouvre jamais son courrier."
On sent le vécu, et c'est drôle, plein de moments qui font sourire. La "science" littéraire a peut-être perdu un fleuron, mais la BD a gagné une auteur de talent.
En littérature, 60% des doctorants abandonnent leur thèse. On comprend pourquoi !
Son directeur de thèse, qui n'a aucune envie de lire les centaines de pages des ses "thésards", pour se débarrasser d'elle, lui prescrit de lire tout Schopenhauer : "La vie oscille comme un pendule, de la souffrance à l'ennui. La condition de l'homme consiste à désirer douloureusement tout ce qui lui fait défaut. La vie humaine consiste à aller sans cesse du désir, qui est manque, à l'ennui de la satiété."
"En cherchant des réponses à une question, les types continuent à se demander si la question qu'ils posent est pertinente..."
11:38 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : bd, littérature
17/06/2015
migrations : pas si simple...
Face aux flux de migrants qui traversent l'Europe, et en particulier notre pays, plusieurs attitudes sont possibles.
Il y a la position de la Legua, avec qui le Front National vient de s'allier pour créer un groupe au Parlement européen : il faut bombarder les bateaux d'immigrés. Sous entendu, y compris avec les immigrés dedans. Malheureusement, un assez bon score aux dernières élections locales du nord de l'Italie...Mais pas vraiment une solution !
Il y a la position de Cameron : d'accord pour aller secourir les immigrés en mer, mais pas question qu'ils viennent chez nous. Un soupçon d'humanité supplémentaire, mais pas une solution.
Il y a la position de notre ministre de l'intérieur qui rappelle que, selon le droit européen, c'est à l'Italie de se débrouiller avec les immigrants illégaux arrivés chez elle. C'est légalement juste, basé sur l'accord de Dublin de 1990, mais insupportable : nous ne sommes plus dans les années 90, le problème a pris une autre ampleur, et ce n'est pas un problème italien, mais bel et bien européen, et même plus largement Sud / Nord. Pas étonnant que le gouvernement italien menace de délivrer des laisser passer pour ne pas avoir à garder sur son sol la totalité des migrants qui y arrivent...et qui ne veulent pas y rester.
Il est vrai qu'il ne sert à rien de laisser entrer en France des migrants qui se trouveront quelques jours plus tard à dormir dans les rues à Paris, puis à Calais.
Heureusement, le gouvernement français fait quelques propositions indispensables pour améliorer l'accueil humanitaire, et faciliter les demandes d'asile politique des migrants venant de pays comme l'Erythrée ou la Syrie. Comparée à d'autres pays la France a du retard. Cela fait bien longtemps qu'elle n'est plus une "terre d'asile".
Le problème de fond se trouve dans l'inégal développement de notre planète. Quand le dictateur soudanais, qui a massacré le peuple du Darfour, se rend au Sommet de l'Union africaine, il y trouve appui, soutien, réconfort face à la Cour Pénale Internationale. Au nom de quoi la majorité de ces prédateurs autocrates qui dirigent les pays d'Afrique pourraient lui faire des critiques ?
Tant que les élites africaines mettront leurs pays en coupe réglée et que la démocratie y sera inexistante ou des plus fragiles, leurs populations rêveront d'ailleurs.
20:36 Publié dans vie politique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : migrations
13/06/2015
Fred Vargas rend hommage à Arnaldur Indridason
Temps glaciaires
Fred Vargas
éditions Flammarion
Des gens surpris par la brume, dans le nord de l'Islande. Ils se perdent, ils meurent. Les survivants culpabilisent.
Ceci n'est pas une aventure du commissaire Erlandur mais du commissaire Adamsberg. Les deux ont bien des points de ressemblance. Surtout quand Adamsberg joue plus que jamais le "pelleteur de nuages". Ces "temps glaciaires" ne sont pas sans évoquer l'"hiver arctique".
Fred Vargas écrit, avec succès, des romans policiers depuis bientôt trente ans, mais n'avait rien publié depuis quatre ans.
Elle ne se contente pas de nous emmener en Islande. Elle revisite pour nous la Terreur robespierriste, juste avant les exécutions de Danton ("Danton, l'image incarnée de la puissance vitale révolutionnaire") et Camille Desmoulins. "Je crains que le voyage dans le cercle arctique de Robespierre soit encore plus glaçant."
"Comment le livide et glacé Robespierre, dénué de charisme et d'empathie, avec sa voix aigrelette et son corps sans vie, a-t-il pu générer une telle adoration ? Avec sa face lugubre et ses yeux vides cillant derrière ses lunettes ?"
"A peine aurait- il détruit un ennemi qu'il s'en découvrirait un autre." "L'ennemi que traquait Robespierre était en lui même." "La pitié n'existait pas, car Robespierre n'avait aucun lien, et surtout pas étroit.""Jamais l'innocence ne redoute la surveillance publique" (Robespierre) "L'abstraction du meurtre chez Robespierre. Les exécutions se passaient toujours hors de sa vue. Elles étaient dématérialisées. Comme s'il avait guillotiné non pas des hommes, mais des concepts ; le vice, la trahison, l'hypocrisie, la vanité, le mensonge, l'argent, le sexe."
"Fouché est l'homme le plus terrible de la Révolution. Cynique absolu, habile comme le diable, fourbe et doucereux, surveillant tout un chacun, louvoyant au gré des évènements, il est le serpent dans l'herbe face à l'idéaliste Robespierre emporté par sa folle pureté."
"On est toujours plus élégant nu qu'à moitié dévêtu"
"L'alcool sucré monte au cerveau avec la célérité d'un acrobate sans fil"
09:03 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature, polar, histoire