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26/08/2005

Corée du Nord

Impressions de voyage
Corée du Nord : combien de temps encore ?
Pour la première fois, une délégation du Parlement européen a été invitée à se rendre en Corée du Nord.
J'ai eu la chance de pouvoir accompagner cette mission.
 
Comme en Afrique, les gens se déplacent à pied, les femmes avec de lourds paquets sur la tête. Les vélos et les poussettes sont surchargés.
Alors que l'Afrique ignore les arrêts de bus, les Nord Coréens sont disciplinés : de longues files d'attente se forment pour attendre de vieux autobus déglingués, vite surchargés. Les trains, aperçus depuis la fenêtre de la chambre, puisqu'il ne nous était pas possible d'entrer dans la gare,  sont vétustes. En province, ce sont des camions bennes qui servent de ramassage. Les accidents de transports en commun fournissent l'essentiel des patients des Français de "Handicap international", qui fabrique et pose des prothèses de jambes.
La nuit,  les rues de Pyongyang sont à peine éclairées. Ce ne sont pas les malfaiteurs qui en profitent, mais, dans le parc voisin de l'hôtel, les amoureux... qui se tiennent par la main.
Le réseau de distribution de l'eau est, lui aussi, à l'agonie. Dans l'hôtel, réservé à la "nomenklatura", au bord d'une plage de sable fin, où nous avons passé une nuit, la baignoire avait été remplie avant notre arrivée, afin de nous permettre de disposer d'une réserve minimum d'eau froide, pour nous laver...et compenser le fonctionnement déficient des toilettes.
Les organisations humanitaires nous ont suggéré de revenir plus souvent : grâce à notre présence, la distribution d'eau avait duré deux heures sans être interrompue !
Nous avons eu la chance de faire cette mission en Juillet. En hiver,  le vent dominant vient du Nord, donc de Sibérie,  et les températures y sont bien en dessous de zéro...alors que tous les chauffages sont déficients.
L'économie souffre de ces infrastructures délabrées.
Peu de cheminées d'usine fumaient lors de notre visite à Hamhung, principale ville industrielle du pays, et port "important"...où seuls deux bateaux chinois se trouvaient à quai.
En 1998, 60% des enfants de moins de 5 ans étaient sous alimentés. Aujourd'hui ils ne sont plus que 30%, ce qui prouve que notre aide alimentaire ne va pas entièrement à l'armée...
Depuis 2001 le fonctionnement de l'économie a été "libéralisé". Les paysans peuvent dorénavant cultiver pour eux même et pour vendre au marché. Les petites échoppes se sont multipliées. En ville la moindre plate bande est utilisée pour faire pousser des légumes.
Dans le plus important marché libre de la capitale, flambant neuf, les acheteuses se pressent pour trouver les produits de consommation courante, généralement importés de Chine, mais aussi des produits alimentaires, dont un chien, dépiauté, prêt à être débité.

 

Face à cette situation, le gouvernement affiche une priorité : "d'abord l'armée" !
Alors que Clinton avait promis une aide énergétique, W Bush, avec la finesse dont il a fait preuve ailleurs, a accusé la Corée du Nord d'être "l'avant garde de la tyrannie", dans "l'axe du mal", alimentant une tension, utile au gouvernement pour consolider sa dictature, et expliquant, sans l'excuser, la course à l'arme nucléaire, réponse du faible au fort.
Le régime se considère comme toujours en guerre et menacé par les impérialistes.
Dès l'arrivée à l'aéroport nos téléphones portables, sur lesquels nous ne recevions pourtant aucun signal, nous ont été confisqués.
Les déplacements, en particulier les nôtres, sont strictement contrôlés. Deux d'entre nous, qui voulaient s'affranchir,  ont très vite été rappelés à l'ordre.  L'utilisation du vélo, trop pratique pour s'arrêter hors d'un des trois endroits autorisés,  est interdite aux Européens.
Le droit de prendre des photos est strictement soumis à autorisation.
A longueur de journée,  la radio et la télévision diffusent des chants patriotiques, des discours de Kim Il sun ("soleil rouge de l'Humanité") et de son fils, le "cher Leader" actuel,  Kim Jong il,  et des films guerriers dans lesquels les bons partisans écrasent les méchants impérialistes, Japonais et/ou Américains.

 

Le régime dictatorial ne semble pas menacer par une éventuelle rébellion de la population, qui consacre l'essentiel de son énergie à lutter pour sa survie.
Comme il n'y a pas de "rideau de fer" entre la Corée du Nord et la Chine, des milliers de Coréens traversent la frontière pour aller chercher de la nourriture, ou du travail, beaucoup ne rentrent pas au pays, la Chine étant en pleine expansion économique.
Mais la Chine ne veut pas de cet afflux de réfugiés économiques. Son aide à la Corée représente l'essentiel de son aide extérieure. Des usines coréennes deviennent sous traitantes de l'industrie textile chinoise,  qui vend en Europe.
Comme quoi, il est possible de payer des travailleurs encore moins que presque rien...

 

Géant économique,  mais nain politique, surtout depuis le 29 mai, l'Union européenne doit se contenter de payer sans participer aux discussions politiques. Comme au Moyen-Orient, en Afghanistan ou en Irak, les Américains choisissent le menu et nous laissent l'addition de l'aide humanitaire et de la reconstruction.
Personne ne veut de l'aggravation de la crise économique nord-coréenne. Nous participons donc massivement à l'aide alimentaire.
Mais puisque personne ne veut d'effondrement, pour favoriser l'ouverture du pays vers l'extérieur, et donc permettre une évolution politique, grâce aux nouvelles générations,   pourquoi ne pas multiplier les invitations d'étudiants en Europe, avec des bourses d'études ? Cela serait pacifique, et probablement efficace.
Donner la priorité à l'éducation ?

 

Jean-François Vallin

conseiller municipal

10:55 Publié dans Voyage | Lien permanent | Commentaires (0)

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