21/02/2006
Bolkenstein
Bolkenstein / Frankenstein
Tout a été tellement dit et écrit. Faut-il en rajouter ?
Oui, certainement pour éclairer et préciser :
- Bolkenstein sonne comme Frankenstein, et ça fait peur, même si dans son pays, bas, son nom se prononce Bolkenstin, ce qui ne donne pas le même effet répulsif.
- Mr Bolkenstein, ci-devant membre de la Commission européenne, est aujourd'hui à la retraite. Il est dommage que son successeur, l'Irlandais Mc Creevy, ait cru bon de reprendre à son compte ce projet contestable.
- Dans certains pays, comme la Belgique, la lutte contre ce projet de Directive a commencé très tôt, et a été un des thèmes de la campagne des élections européennes de 2004. Elio Di Rupo, Président du PS belge, en a abondamment parlé lorsqu'il est venu à Aire.
- En France le projet a servi d'épouvantail lors de la campagne du référendum sur le projet de Traité constitutionnel. D'où la surprise de certains de le voir toujours là après la victoire du NON: c'est que les deux choses étaient indépendantes l'une de l'autre.
- La libre circulation des services (70% du Produit intérieur brut de l'UE) était déjà prévue par le Traité de Rome. Il est manifestement plus facile de faire circuler librement les capitaux que les hommes, surtout s'ils viennent pour travailler. Cette libre circulation serait incontestablement plus facile si l'harmonisation sociale avait fait quelques progrès. Comment ne pas voir qu'il y a tout lieu de redouter le "dumping" social s'ajoutant à l'actuel "dumping" fiscal que se livrent les Etats ?
- La grande question posée par cette libre circulation des travailleurs des services est celle de la législation, en particulier la législation sociale, mais aussi les conventions collectives et le droit des contrats, qui doit leur être appliquée.
Celle du pays d'origine, répondent Mr Bolkenstein, son successeur, les libéraux et les nouveaux Etats membres qui espèrent conquérir des marchés.
Celle du pays d'accueil, répondent tous ceux qui se battent pour la défense des acquis sociaux.
- Comme toujours dans l'Union européenne, un compromis a été cherché...et trouvé. En l'occurrence au sein du Parlement européen, entre la Droite européenne et les socialistes européens : plus de référence au pays d'origine, mais pas de référence, quand même, au pays d'accueil.
- La jurisprudence de la Cour de justice européenne est constante : en l'absence de précisions, s'applique la législation du pays d'accueil. La Cour vient de le rappeler récemment à la demande du gouvernement suédois, inquiet de l'arrivée massive d'entreprises baltes, enlevant systématiquement les appels d'offres, et appliquant leurs législations sociales. Mais si le compromis est juridiquement acceptable, il est invendable au sein de la gauche française, après le NON au référendum, et avant les élections présidentielles et législatives. A gauche les Français ont donc été les seuls à le refuser, avec les libéraux de tous pays...et l'organisation patronale européenne. Pour des raisons symétriquement opposées, bien entendu.
- Pour bien "enfoncer le clou", les députés européens ont supprimé tous les articles qui limitaient les pouvoirs des inspecteurs du travail.
- La protection des consommateurs est celle du pays dans lequel le "service" est vendu (important pour les agences de voyages et les agences immobilières).
- L'autre grand problème est celui du champ d'application de la Directive.
Les députés européens ont exclu tous les services publics non marchands, ainsi que l'audiovisuel, la santé, les jeux d'argent, le notariat, les agences de travail intérimaire et le travail social à domicile.
- Restent inclus, malgré l'opposition de la gauche, les services publics à caractère commercial, comme la distribution de l'eau, les services postaux, la culture, le traitement des déchets et la fourniture d'énergie, qui pourtant ne peuvent dépendre de la seule logique marchande.
- Les services financiers et les transports sont traités par des Directives spécifiques, comme cela a failli être le cas pour les services portuaires.
- La gauche demande une Directive spécifique pour les services d'intérêt général. Le caractère universel de ces services, y compris leur financement public, étaient inscrits dans le projet de Traité constitutionnel, mais comme celui-ci a été rejeté...
- La procédure législative se poursuit. En dernier ressort, ce sont les Etats membres qui décideront, et on attend leur "position commune". Si celle-ci ne tient pas suffisamment compte de la position du Parlement européen, il est fort probable que celui-ci la bloque en 2e lecture.
09:50 Publié dans EUROPE | Lien permanent | Commentaires (0)
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