09/08/2011
gavroche en politique
André Laignel, un gavroche en politique
Jean Diharsce
La première fois que je suis allé à Issoudun, c’était en 1984. J’accompagnais, à l’occasion des élections européennes, mon ami Roger Fajardie, député européen sortant, et qui sera réélu, et Nicole Péry, numéro deux de la liste socialiste française, dont mon épouse était l’assistante parlementaire. Quelques mois plus tard, Nicole sera élue vice-présidente du Parlement européen.
Nous étions les invités du maire de la ville, André Laignel. J’ai rarement autant ri qu’au cours du dîner qui a suivi la réunion électorale. André s’est montré féroce, mais avec un humour irrésistible.
Je suis retourné à Issoudun il y a quelques années : j’ai été frappé de voir comment cette petite ville de 15 000 habitants, dans une région enclavée, était équipée et son centre ville attractif.
Il est évident que son maire, depuis 1977, s’est décarcassé, avec talent, pour sa ville.
Je suis admiratif du parcours d’André Laignel. Pour avoir fait de nombreux aller et retour entre mes villes d’élection et mon lieu de travail, j’admire la volonté d’André, venant de Paris chaque fin de semaine pour passer ses week-ends dans le Berri, se faisant reprocher avec constance de ne pas être du pays. Cela lui a coûté, d’abord financièrement, en particulier pendant les huit années qui ont précédé sa première élection.
Ayant fait mes études universitaires tout en travaillant, passer ma maîtrise d’Histoire tout en faisant les 3X8 dans une gare de triage, je suis admiratif d’André, qui a quitté l’école à 14 ans, pour reprendre des études à 20, et aller jusqu’au Doctorat en droit, tout en travaillant, tout en militant, tout en prenant des responsabilités politiques.
Chapeau : j’ai une idée assez nette de ce que cela représente…
Son parcours électif a été à la hauteur de ses qualités : non seulement maire, mais aussi conseiller général, et même, pendant un temps président du conseil général, député, secrétaire d’Etat, puis député européen.
Pendant dix au Parlement européen, André Laignel a été un parlementaire présent, et critique. Je peux partager certaines de ces critiques. Il a raison de dire « C’est un parlement croupion, le parlement européen seul ne peut rien faire. » Mais qui peut croire que le parlement français, qui ne peut même pas fixer son ordre du jour, a plus de pouvoir face à l’exécutif ? Il a raison de regretter que le parlement européen n’ait pas de pouvoirs d’initiative (réservés à la Commission), mais combien de lois françaises sont d’origine parlementaire et non pas gouvernementale ?
En fait, comme beaucoup de responsables politiques français, André Laignel était perdu dans ce système plus complexe que l’affrontement majorité/opposition du parlement français.
Concernant le projet de Traité constitutionnel, André Laignel faisait partie de « ceux qui pensent que ce petit pas est insuffisant, qu’il faut un électrochoc ». Nous avons eu l’électrochoc, et nous en avons vu le résultat : une crise profonde dont l’Union européenne n’est pas sortie. J’avoue faire partie des sociaux-démocrates réformistes, espèce socialiste qu’André n’aime guère !
Citation de l’auteur :
« Ces réunions dont les socialistes raffolent, où l’on passe son temps à se morfondre, à rabâcher de vieilles querelles, où les militants rêvent de bâtir un monde plus juste, plus fraternel »
Citations d’André Laignel :
« Du moment que j’avais un bouquin sur une chaise, j’étais isolé, dans mon univers »
« J’ai lu, beaucoup lu. C’est peut-être pour cela que je ne me suis jamais senti seul »
« A un moment donné, ce qui fait la différence, c’est la détermination »
« La charité, c’est une démarche individuelle. Moi je suis porteur, en tant qu’élu, de la solidarité. Il y a un centre municipal d’action sociale dont le métier est la mise en œuvre de la solidarité. C’est le service public ».
« Un but qui a besoin de moyens injustes n’est pas un but juste »
« De toute ma carrière, tu ne trouveras pas un mot attaquant les personnes. Les idées, oui. Leur comportement politique, oui. Les personnes, jamais. »
« Tout ce qui ne tue pas rend plus fort. Sans aucun doute sur le plan personnel. Il n’est pas certain que cela soit aussi évident sur le plan politique »
« Quand on est défait, c’est le choix des électeurs, ce n’est pas une atteinte personnelle, même si on peut le ressentir personnellement, douloureusement »
« Il faut une bonne dose de courage pour rester au parti socialiste. D’abnégation parfois. On ne tire pas facilement un trait sur plus de trente ans de militantisme, de fidélité, d’amitié. »
11:21 Publié dans Livre, vie politique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : politique
Les commentaires sont fermés.