17/04/2015
L'invention des origines médiévales de l'Europe
Quand les nations refont l'histoire
Patrick J. Geary (professeur à l'université de Californie)
éditions Flammarion
Un livre salutaire à l'heure de la montée des nationalismes.
Ce spécialiste de l'histoire médiévales démontent les idéologies nées au XIXe siècle qui imprègnent les discours identitaires aujourd'hui.
A la fiction du "nous étions là les premiers", et les manipulations qui s'en suivent, l'auteur oppose une Europe médiévale sans cesse remodelée par les migrations.
"Les peuples de l'Europe sont une réalité en train de se former, un projet en cours : il faut même qu'ils gardent éternellement ce statut." "Les Francs "nés avec le baptême de Clovis" ne sont pas les Francs de Charlemagne, ni ceux du peuple français que Jean-Marie Le Pen espérait rassembler autour de son mouvement politique."
"Ceux qui n'ont pas été baptisés avec Clovis, en particulier les juifs et les musulmans, ne pourraient pas être de vrais Français ?"
"La correspondance entre les peuples du Moyen-Âge et les peuples contemporains est un mythe."
"Un certain nombre d'étiquettes ont fini par être perçues comme des désignation "ethniques". "Au Ive siècle, des bandes militaires s'approprièrent ces étiquettes." "Les noms des peuples étaient moins des moyens de décrire la réalité que des moyens d'affirmer une forme d'unité sous la conduite de chefs qui espéraient monopoliser et incarner les traditions associées à ces noms."
"Les peuples sont redevenus des unités territoriales d'organisation géographique et politique, non des groupes sociaux ou culturels."
"En 212 la citoyenneté fut étendue à presque tous les les habitants libres de l'Empire. La distinction entre citoyen et non citoyen perdit toute signification pour une différence fondée largement sur la richesse." Au début du VIIe siècle, l'opposition entre Romains et Barbares avait perdu toute signification, la citoyenneté romaine ne représentant plus rien." Au IXe siècle, les Romains sont simplement les habitants de la ville de Rome.
"Les rois victorieux projetaient le passé imaginaire de leur famille sur leur peuple en tant que collectivité, ce qui donnait à tous les membres de l'élite militaire le sentiment de partager la même origine." "Les rois barbares mirent aussi la religion au service de la création de ce sentiment d'identité". ("la conversion de Clovis facilita l'amalgame rapide entre Francs et Gallo-Romains" ; Arianisme pour les Goths). "La majorité de la population finit par adopter l'identité de la minorité au pouvoir."
"la grande force de la synthèse franque fut la création d'une société unifiée, à partir du double héritage des traditions romaines et barbares."
Ce livre est dédié à "tous ceux qui comprennent l'importance que peut avoir le passé pour le présent, et la différence qu'il y a entre les deux." "Le passé est un pays étranger dans lequel nous ne nous trouverons jamais."
21:30 Publié dans histoire | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : histoire, nationalisme, europe
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