28/09/2008
Deux soeurs pour Léonard
Deux sœurs pour Léonard
Traduction du titre anglais : "Les cygnes de Léonard"
Editions J.C. Lattès
Italie 1489/1505
Deux sœurs pour Léonard (de Vinci, bien entendu), c'est affriolant, mais tout à fait exagéré.
Isabelle et Béatrice d'Este, filles du Duc de Ferrare sont restées dans l'Histoire, au moins l'Histoire de l'art, pour leur rôle actif dans la promotion de la Renaissance et l'appui apporté aux artistes. Léonard étant l'un d'entre eux. Le portrait, de profil, qu'il a réalisé d'Isabelle se trouve au Louvre.
Leur mécénat ne pouvait se faite que par l'intermédiaire de leurs maris : pour Béatrice, le Duc de Milan, Ludovic Sforza, dit "le Maure", qui perdra son duché au profit des Français, puis des Habsbourg, pour Isabelle le, plus modeste, Marquis de Mantoue.
Très vite le lecteur comprend que la rivalité entre les deux sœurs est d'abord une saine émulation.
Comme Isabelle, Béatrice aurait pu dire : "Je suis une femme qui a appris à vivre dans un monde d'hommes".
Plus que la rivalité de Béatrice et Isabelle se joue la rivalité entre les grandes principautés italiennes, dans laquelle le Pape est un acteur majeur, tandis qu'apparaissent sur la scène les rois de France (Charles VIII puis son cousin Louis XII, en attendant le petit neveu de celui-ci, François, qui se rendra célèbre à Marignan), décidés à revendiquer le royaume de Naples.
Les Vénitiens cherchent à s'assurer l'hégémonie sur les routes commerciales, alors que s'ouvrent, pour Gênes, les Espagnols et les Portugais, des horizons plus larges.
Florence est sous le joug de Savonarole qui oblige Botticelli à faire pénitence pour avoir peint des femmes nues...
Alliances, trahisons, tout un art, différent, mais aussi subtil que celui du Maître !
Citations
"Le cygne est immaculé et il chante doucement en mourant"
Léonard de Vinci
"Quand la fortune vient, saisis la par les cheveux de devant, car je te le dis, sur la nuque, elle est chauve".
Léonard de Vinci
"Plus vous vous serez rapproché des Cieux, plus brutale sera votre chute"
Dicton vénitien
08:00 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature, histoire
27/09/2008
Binet : les Bidochon internautes
Les Bidochon internautes
Christian Binet
Editions "Fluide glacial"
La dernière fois que j'ai croisé Christian Binet, c'était il y a bientôt quarante ans, dans la salle des mariages de la petite ville où nous vivions et où nous nous sommes mariés, non pas ensemble, cela ne se faisait pas à l'époque, mais l'un après l'autre. Autant que je m'en souvienne, sa femme ne ressemblait pas du tout à Raymonde Bidochon.
Je connaissais Christian par son frère, qui était mon voisin de classe au lycée, et avec qui je jouais au foot pendant les récréations. Il est décédé prématurément, dans un accident de voiture, en rentrant de vacances, du côté de Pussay, et je m'en souviens encore...
Christian Binet en est à son dix neuvième épisode des aventures des Bidochon, et dans ses premiers albums il était facile, pour les Etampois, de reconnaître "l'habitation à loyer modéré" où il vivait (les HLM n'étaient pas encore devenus des ghettos), tout comme il était possible de situer très précisément où Binet avait trouvé l'inspiration pour imaginer le rêve pavillonnaire de ses "héros".
Nous avons tous, en nous, quelque chose de Bidochon !
Comme Binet a de la tendresse pour ses personnages, nous nous amusons de leurs maladresses, qui sont parfois les nôtres, exagérées, caricaturées, bien sûr !
C'est pourquoi il est impossible de ne pas sourire, et même rire, aux mésaventures des Bidochon internautes.
Nos enfants sont nés avec l'informatique, qui fait partie de la vie quotidienne de nos petits enfants, mais notre génération a été obligée de s'y mettre, plus ou moins facilement.
Qui n'a pas été confronté avec une "ligne d'assistance téléphonique", avec l'envie de demander, s'il y avait eu quelqu'un en ligne : "pour : j'en ai marre d'être pris pour un con, je tape quelle touche ?". Si la "hot line" nous donne des vapeurs, ce n'est malheureusement pas parce que Line est "chaude" !
Quand "on" me demande, après moult tentatives, et quelque temps d'attente :"Pouvez vous tapez sur F5 ?", je pense à Francis Blanche interrogeant Pierre Dac, et je réponds : "Oui, je peux le faire !".
Comme Raymonde, j'en suis encore à préférer coller un "post-it" sur le frigidaire plutôt que dans le coin de mon écran d'ordinateur.
Contrairement à Robert, je ne regarde plus mes spams, découragé que je suis de me voir sans cesse proposer d'élargir mon pénis ou d'améliorer mes performances sexuelles, grâce à du viagra de contrebande (si je puis dire).
Mais comme Robert, il m'est arrivé de ne plus avoir le temps de faire autre chose parce que je passais trop de temps devant l'ordinateur.
Comme Robert, il m'est arrivé de tomber, par hasard, sur des sites pornographiques...dont je regrette d'avoir complètement oublié l'adresse...
Mais contrairement à Raymonde je n'ai jamais acheté de livre sur internet, non par peur de me faire escroquer, comme Robert, mais parce qu'avant d'acheter un livre j'aime bien le manipuler et regarder la "quatrième de couverture".
C'est ce que j'ai fait avec le dernier Binet.
Prochain album : le blog des Bidochon ?
08:00 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : bd, littérature
20/09/2008
Gomorra (le livre)
Gomorra
Dans l'empire de la camorra
Roberto Saviano
Editions Gallimard
"Ceux qui l'emportent, quelle que soit la manière, jamais n'éprouvent de honte" (Machiavel)
"L'éthique est le frein des perdants"
"Comprendre ce qu'est l'atroce, ne pas nier son existence, affronter la réalité, sans préjugés" (Hannah Arendt)
"Il y a ceux qui commandent aux mots et ceux qui commandent aux faits : tu dois comprendre qui commandent aux faits et faire mine de croire ceux qui commandent aux mots".
Le système de la camorra est la logique du profit à tout prix poussée à son paroxysme :
"La logique de l'entreprenariat criminel est empreinte d'un ultralibéralisme radical. Les règles sont dictées et imposées par les affaires, par l'obligation de faire du profit et de vaincre la concurrence. Vaincre dans l'arène du marché : lancer un produit, conquérir des parts de marchés, investir dans des secteurs de pointe : tout à un prix".
"Il ne connait que la syntaxe des entreprises et la grammaire du pouvoir."
"L'organisation criminelle repose directement sur l'économie et la dialectique commerciale est l'ossature du clan."
"Le chômage est endémique et on ne perçoit aucune volonté de progrès social". "N'importe qui peut recruter une main d'œuvre de base qui coûte moins chère que les dealers nigérians ou albanais."
"70% du volume des exportations de textile chinois transitent par le seul port de Naples, ce qui ne représente pourtant que 20% de leur valeur"
"50.000 cas de contrefaçons ont été répertoriés". "La contrebande s'intéresse à présent aux produits de consommation courante davantage qu'au vice des fumeurs".
"Peu importe comment cette richesse est produite, ce qu'il faut c'est que cette chair à canon reste engluée dans les banlieues, écrasée entre le béton et les ordures, dans les ateliers clandestins et les entrepôts de coke".
"Un ouvrier du textile travaille dix heures par jour pour un salaire qui va de 500 à 900 euros par mois, sans aucun filet de protection sociale, majoritairement des femmes."
"Un contrôle strict et militaire du territoire n'est plus nécessaire et les plus grosses affaires des groupes camorristes se développent hors de Naples, recyclant l'argent dans les activités économiques légales." "Même le bitume essaie de se barrer d'ici".
"La partie illégale du commerce permet de casser les prix de la partie légale".
"La force des entrepreneurs criminels italiens est de ne jamais renoncer aux sources illégales de profit et d'avancer sur deux voies parallèles. La voie criminelle prend le relais lorsque la branche légale est en crise."
"Le délit de falsification de bilan a été dépénalisé par Berlusconi".
"La force économique du Système camorra est précisément ce renouvellement permanent des chefs et des stratégies."
"Aucun empire économique fondé dans le sud de l'Italie ne s'est construit sans passer par le bâtiment et les marchés publics".
"Les camorristes ont toujours eu recours non pas au marché noir des armes, mais aux dépôts militaires de pays de l'Est."
"Les Siciliens ont appris au monde à la fermer, les Napolitains ont montré que commander, c'est mieux que baiser".
"Si l'on veut être jugé pour ce qu'on est, il faut toujours bénéficier d'une protection qui puisse au moins permettre qu'on soit pris en considération."
"Je n'ai retiré qu'une seule certitude : la mort est dégueulasse".
08:03 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature, société
09/09/2008
Je n'ai jamaisrencontré Mitterrand...
Je n'ai jamais rencontré Mitterrand, ni sa femme, ni sa fille...
Etienne Liebig
Editions La Musardine
"On était nombreux à attendre depuis longtemps la réalisation de ce grand rêve, fondant des espoir insensés et imaginant que la société allait se retourner comme un gant. Souvenez vous, nous avions tout juste 20 ans, et nous prenions le pouvoir...Enfin presque !"
Ce roman est supposé être le journal d'un jeune bricoleur, plombier sans fiche de paye ("travailleur occasionnel, non déclaré, et prêt à tout pour survivre") ancré à gauche et ayant rêvé de revanche sociale et de "vie changée".
Du 10 mai 1981 à l'été 82, les principales décisions politiques marquent, ou non, sa recherche d'une vie meilleure.
Précision : contrairement à ce qu'écrit l'auteur, Pierre Joxe n'a jamais été Premier secrétaire du PS : en 81, c'était Jospin !
Il rêve de rencontrer, au moins apercevoir, François Mitterrand ("J'avais un peu l'impression que Mitterrand avait été élu pour moi"), et n'hésitera pas, pour cela, à se faire embaucher dans une équipe de "sécurité" un peu facho.
J'ai rencontré quatre fois François Mitterrand, jamais pendant sa présidence : à l'occasion de la sortie de son livre "ma part de vérité" (il m'a fait parlé de mes études), à l'occasion des élections législatives de 78 (j'étais suppléant), à l'occasion d'une conférence de presse pour laquelle il avait souhaité ma présence...avec quelques autres, lorsque j'étais secrétaire national des cheminots socialistes, et quand il est passé au siège du PS, à la fin de son deuxième septennat.
Le héros ne rencontrera jamais Mitterrand, ni sa femme, ni sa fille, mais il fera des rencontres sympathiques qui enrichiront sa connaissance de la littérature, de la sociologie, de l'art moderne, de la musique, en particulier le "vieux" jazz...et des variations rendues possibles par la sexualité des femmes, et des hommes.
Ce livre, de réflexions entrecoupées de scènes de la vie quotidienne, donc de sexe, m'a donné envie de lire les autres livres, aux titres prometteurs, d'Etienne Liebig : "Comment draguer la catholique sur les chemins de Compostelle", "Comment draguer la militante dans les réunions politiques" et "Osez coucher pour réussir".
Probablement qu'ils démontrent, comme celui-ci, que la meilleure recette de séduction reste l'humour et la tendresse.
Extraits
"Chez les pauvres, quand tu te drogues, tu n'es pas un malade, tu es un délinquant"
"Les pauvres types essayent toujours de justifier leurs saloperies. C'est la différence avec les bourgeois qui les revendiquent. La honte appartient aux pauvres."
"J'ai pensé à Primo Levi. Qu'aurait-il donné pour n'être prisonnier que du besoin d'argent ?"
"Qui possède le verbe possède le pouvoir"
"Bourdieu met en parallèle le capital économique et le capital culturel, l'accès aux livres, aux musées, aux savoirs..."
"Incontestablement les riches ont du goût : c'est si facile de préférer le bois au plastique, la pierre de pays au béton, le feu de cheminée aux jeux télévisés"
"Pas de musique de Coltrane ou de Bach quand on a la chance d'être bercé par le chant naturel des cigales. C'est chiant les cigales !"
"ça me laissait aussi froid qu'un dessin de Faizant dans le Figaro"
"Dans le Sud, ceux qui ne sont pas mafieux sont des flics"
"Les artistes savent récupérer ces moments de décalage et de doutes dans leur propre vie pour les communiquer aux autres"
Citation
"On ne désire pas une personne parce qu'elle est belle, mais elle est belle parce qu'on la désire" (Spinoza ?)
08:46 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature, mitterrand
07/09/2008
La taverne aux oubliés
La taverne aux oubliés
Paul Harding
10/18 ; collection "grands détectives" n°3998
Londres à la fin du XIVe siècle : sur le trône, Richard II, petit fils d'Edouard III qui réclama la couronne de France...et provoqua ainsi la "guerre de 100 ans" !
Le jeune roi est encore sous la tutelle de son oncle, Jean de Gand.
La guerre de cent ans s'est terminée par le "Traité de Brétigny", et les glorieux vétérans, revenus de leurs pillages en France, commémorent leurs exploits, quand ils ne sont pas devenus "chasseurs de primes", comme plus tard dans le Far-West.
Dans la taverne "La nuit de Jérusalem" se multiplient soudainement les meurtres.
Le frère dominicain Athelstan ("témoin bien placé de la misère des pauvres") mène l'enquête, de rebondissements en coups de théâtre. Le succès final est garanti.
Paul Harding est professeur d'histoire médiévale et nous fait revivre, pas le biais de roman policiers ce qu'était la vie quotidienne à cette époque : "Les seigneurs avaient œil perçant, cœur dur et doigts rapaces. Rien de surprenant à ce que la colère gronde chez les misérables paysans".
Et les tavernes étaient d'excellents lieux d'observation, pour savoir ce que l'on buvait, ce que l'on mangeait, tout en préparant quelques mauvais coups hors-la-loi.
08:54 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature, roman policier, histoire