03/10/2025
Congolais à Paris
Ramsès de Paris
Alain Mabanckou
éditions Seuil
Ramsès est réceptionniste et barman du Salam hotel, dans le XIe arrondissement.
Le narrateur se fait volontiers appeler "prince de Zamunda". Il a des projets de romans dans ses tiroirs et vit d'expédients. Il vient de Pointe-Noire, comme son "grand frère" Benoît qui exerce sa verve dans le quartier de Château Rouge et sait charmer les dames. Quand Benoît tombe en amour avec une Bretonne, "au cul africain", cela créé des embrouilles avec maman Mushama, la tenancière du restaurant "Manioc Pays" qui défend le manioc du pays face à l'invasion du manioc asiatique.
L'auteur, professeur de littérature comparée, accumule les titres de romans et les passages de chansons.
"Ils voulaient être certains que si tout avait basculé vers notre plus grand malheur c'était la faute des Blancs qui étaient venus nous déverser leur pagaille en nous offrant des bibles illisibles, des prières en latin difficiles à ânonner, des croix qui n'étaient pas lorraines."
08:24 Publié dans Afrique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : roman
12/09/2025
Trente ans après le génocide
Les ombres du monde
Michel Bussi
Les presses de la Cité
Michel Bussi nous replonge dans les horreurs du génocide au Rwanda. Comme pour les massacres de la Saint-Barthélémy impossible de ne pas se demander comment des hommes ordinaires peuvent massacrer leurs voisins, leurs semblables.
Comment ne pas regretter que l'écrivain prenne un parti-pris unilatéral en faveur des vainqueurs ?
A aucun moment il pose la question des conditions de la victoire de Kagamé, comme si celui-ci était arrivé au pouvoir porté par les ailes d'un ange, sans tirer un coup de fusil. "On ne construit pas une réconciliation sur un mensonge" écrit l'auteur. Il n'y a pas de réconciliation au Rwanda mais une dictature implacable où les opposants sont mis en prison. Certes, il n'y a pas de révolte car personne ne veut d'une d'une nouvelle guerre civile, alors Kagamé est inamovible.
Le roman reproche à la France d'avoir fourni des armes au gouvernement légal, mais qui fournissait, à flux continu, des armes à Kagamé ?
Les accords d'Arusha prévoyait un partage du pouvoir. Au terme du processus de paix les urnes, sous supervision de l'ONU, devaient établir la démocratie. Les Tutsi qui représentaient 15% de la population n'avaient aucune chance de parvenir au pouvoir par les urnes. Leur seul espoir résidait donc dans une victoire militaire. Ces élections n'ont toujours pas eu lieu !
Le FPR de Kagamé n'était pas un parti démocratique demandant le retour des exilés et une participation au pouvoir, mais un mouvement armé qui voulait conquérir militairement le Rwanda.
Il y a dix ans, Bernard Lugan, universitaire, enseignant et conférencier, expert auprès du Tribunal Pénal International pour le Rwanda de l'ONU écrivait dans "Un génocide en questions" : "Il n'est plus possible de dire que le génocide était programmé, que la France en serait complice, que pour le commettre, les "extrémistes" hutu avaient créé une cellule secrète nommée Akazu (très présente dans le roman), qu'ils avaient dressé des listes de Tutsi à abattre, qu'ils assassinèrent leur propre président en abattant son avion."
"Ces idées reçues, qui constituaient les bases de l'histoire officielle écrite par les vainqueurs de la guerre civile rwandaise afin de légitimer la conquête du pouvoir par le général Kagamé (et base du roman de Michel Bussi) ont été balayées par le Tribunal international pour le Rwanda créé par le Conseil de sécurité de l'ONU afin de juger les responsables de ce génocide - jamais mentionné dans le roman, et pour cause !
"Au fur et à mesure de son avance, les troupes de Kagamé pratiquait des massacres de masse" (gendarmes français) "Le FPR de Kagamé liquidait systématiquement les notables des régions conquises, chassait devant lui les populations. Le but était de déstabiliser le gouvernement en place en lui envoyant un million de réfugiés."
Tellement triste que le roman de Bussi conforte le pouvoir en place au Rwanda, au prix de la vérité.
07:50 Publié dans Afrique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : rwanda
24/01/2025
autobiographie d'un militant politique
Anticolonialement vôtre !
Guy Labertit
éditions Karthala
J'ai connu Guy Labertit alors qu'il était le "Mr Afrique" du PS. J'ai découvert dans ce livre son itinéraire militant avant qu'il n'adhère au PS : responsable national du PSU jusqu'à la disparition de ce parti qui ne faisait guère plus de 1% des suffrages, même allié avec les dissidents communistes de Pierre Juquin.
J'avais oublié que le PSU avait recueilli 0,73% des voix aux européennes de 1984. Dix ans plus tôt, je m'étais posé la question de continuer après mes 3,5% aux législatives !
De la Nouvelle Calédonie à la Côte d'ivoire, en passant par le Burkina Fasso, et le Tchad, Guy Labertit a été l'infatigable militant des aspirations des peuples opprimés, loin de la "real politique".
Pour moi, il restera surtout l'ami de Laurent Gbagbo dans sa marche vers le pouvoir...et ses difficultés pour le conserver !
J'attends la suite avec intérêt.
08:18 Publié dans Afrique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : afrique
27/12/2024
Renaudot 2025
Jacaranda
Gaël Faye
éditions Grasset
L'Histoire est toujours écrite par les vainqueurs. Ce livre en est une nouvelle illustration. Au Rwanda il n'y aurait eu de victimes que Tutsies, de boureaux que Hutus.
Je me range plutôt du côté de ces "expats" moqués par l'auteur : "ils déploraient le manque de liberté d'expression, trouvaient que le pays - sous ses dehors de bon élève des institutions de Bretton Woods - était une dictature qui ne disait pas son nom et qu'à force de tout ramener à "leur génocide", les Rwandais avaient fini par en ferme un "fonds de commerce".
Reste le roman avec ses personnages touchants qui nous font rêver d'une Afrique fantasmée, et un superbe Jacaranda dans les branches duquel se réfugie une adorable petite fille.
07:57 Publié dans Afrique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : roman, rwanda
08/09/2023
Les mystères du dépotisme postcolonial
Tyrans d'Afrique
Vincent Hugueux
éditions Perrin
L'auteur est journaliste spécialiste de l'Afrique. Pendant trente ans à L'Express, il écrit des livres sur ce continent qu'il connait bien. Dans celui-ci il nous offre une galerie de portraits tous plus édifiants les uns que les autres.
Avec des points communs : absence de scrupules, cruauté, narcissisme, ivresse méssianique ("par la grâce de Dieu", comme nos rois !) , arrogance, paranoïa, mégalomanie, culte du chef, mythomanie, besoin de liquider ceux qui les ont aidé à prendre le pouvoir, recrutement clanique, et même strictement familial...et des classements honteux à l'indice de développement humain des Nations Unies, ainsi qu'au palmarès de Reporters sans frontière et dans celui de Transparency International qui dénonce les "machineries kleptocratiques".
"Rien de tel, pour asseoir un pouvoir sans partage, que le complot déjoué." "Sékou Touré invente des complots afin de se consolider."Tendance générale. "Liquider, purger, venger".
Dix portraits, dont trois hors de la francophonie.
Dix portraits et seulement deux encore au pouvoir : Obiang (Guinée équatoriale), détenteur du record mondial de longévité au pouvoir...et des "biens mal acquis", et Afeworki (Erythrée, pays qui n'a jamais connu d'élections , même truquées, depuis son indépendance et qui n'a pas de Constitution). Gnassingbé Eyadéma, "premier putschiste galonné de l'ère postcoloniale", est décédé, mais à sa mort son fils a pris la place en violant la Constitution.
Il ne parle pas de Bongo, père et fils, probablement parce que leur tyrannie était moins sanguinaire que les dix retenues. "En Afrique, on n'organise pas une élection pour la perde" (Omar Bongo). Denis Sassou Nguesso aurait pu également avoir droit à un chapitre "Il est parvenu plutôt deux fois qu'une au pouvoir à Brazzaville ; la première par les urnes, la deuxième par les armes, au prix de l'une de ces atroces guerres réputées civiles, à ceci près qu'elles sont menées par des soudards, militaires et miliciens mêlés."
Pas un mot de Kagamé dont la tyrannie vaut bien celles de dix retenues et qui, lui, est encore au pouvoir, probablement pour longtemps.
"L'Afrique est de loin le continent le plus riche en pauvreté et en dictatures." (Ahmadou Kourouma)
"Au rayon des assurances-vie géostratégiques, le fléau djihadiste a supplanté la menace libyenne"
17:45 Publié dans Afrique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : afrique