25/07/2011
Quelques réflexions sur l'Afrique (suite)
Priorité à l'humain
Les Objectifs du Millénaire
Les "Objectifs pour le développement" fixés par l'ONU en 2000 figurent dans le préambule de l'Accord de Cotonou. Il n'a pas été fait assez pour les atteindre en 2015, comme annoncé alors.
Éducation
Le premier de ces objectifs est d'assurer l'éducation primaire pour tous.
Les disparités régionales sont fortes. La scolarité gratuite, quand elle existe, augmente le taux de scolarisation, mais la plupart des systèmes éducatifs sont en faillite sur le continent africain.
La vitalité démographique obligerait pourtant à des investissements conséquents.
L'éducation a un impact direct sur la production de richesses et donc sur la réduction de la pauvreté, ainsi que sur la mortalité maternelle et infantile.
Les "programmes d'ajustement structurel" se sont traduits par des coupes sombres dans les budgets d'éducation.
La priorité doit aller au capital humain. L'éducation est donc la première priorité et tout doit être mis en œuvre pour qu'elle devienne une réalité pour les filles comme pour les garçons.
Santé
Les "Objectifs du Millénaire" concernant la santé sont essentiels car le continent est marqué par une forte mortalité et parce que "une mauvaise santé entraîne les populations dans le cercle vicieux de la pauvreté" (OMS) Il s'agit donc de réduire la mortalité infantile et maternelle, de combattre le paludisme et le VIH/sida, l'Afrique subsaharienne étant, de loin, la région du monde la plus affectée.
La tuberculose resurgit.
"Il est inacceptable que les malades les plus pauvres ne puissent avoir accès à des médicaments qui ont changé la vie des malades dans les pays riches" (Kofi Annan).
La réalisation de ces Objectifs, d'ici 2015, continuera à échapper aux seuls pays africains, même s'ils peuvent y contribuer par des politiques sectorielles ciblées.
La fuite des médecins et personnel de santé aggrave la situation. Les Etats africains qui investissent dans la formation de leur personnel de santé n'ont pas les moyens de les retenir. Les politiques d'"ajustement structurel" ont, dans ce domaine également, affaibli les capacités des Etats, parfois conjointement avec le laxisme des dirigeants.
Aucun pays de l'Afrique subsaharienne ne peut financer sans aide étrangère son système de santé, pas plus que son système scolaire.
Ces deux domaines doivent bénéficier de la priorité absolue de l'aide de l'Union européenne.
08:19 Publié dans Afrique | Lien permanent | Commentaires (0)
18/07/2011
Quelques réflexions sur l'Afrique (suite)
Un seul continent dans sa diversité
Diversité des situations
Diversités, et même contrastes, géographiques, diversité historique et donc culturelle, diversité religieuse et surtout diversité des ressources. Le continent est vaste et les situations sont diverses. Mais les Africains considèrent leur continent dans son unité et se sont donné une organisation unique pour la renforcer.
Il faut appuyer cette démarche et souhaiter que l'Union européenne continue à considérer l'Union africaine comme un interlocuteur privilégié. Il est dommage que le Maroc ne fasse pas partie de l'organisation continentale en raison de son occupation du Sahara occidental.
Le Sahara ayant été, au fil des siècles, en particulier du VIIe au XVIe, un espace central d'échanges intenses, son désenclavement par des infrastructures routières appropriées est indispensable à son développement.
L'héritage de la colonisation et de la décolonisation
A quelques exceptions notables, les pays du continent sont des créations coloniales, même si la colonisation a duré moins d'un siècle. Entre 1880 et 1920, en deux générations, entre un tiers et la moitié des populations africaines ont péri au contact de la "civilisation" européenne.
200 000 Africains sont morts lors des combats de la deuxième guerre mondiale.
Considérant que l'identité contemporaine se nourrit des grandeurs passées, la négation des civilisations précoloniales est raciste et les traites négrières un "crime contre l'humanité".
Des frontières artificielles : le droit des peuples à disposer d'eux mêmes ?
Les Africains tiennent beaucoup à ne pas remettre en cause les frontières héritées de la colonisation (Décision de l'OUA de 1963). Néanmoins, l'exemple récent du Sud-Soudan montre que cette règle peut bénéficier d'exceptions quand un référendum montre, de manière incontestable, la volonté d'un peuple de vivre dans un Etat indépendant.
Décloisonnements : les régionalisations
Les intégrations régionales décidées par les pays concernés, sont appuyées par l'aide que leur apporte l'Union européenne. La Commission européenne, dans le cadre du FED, élabore des stratégies régionales.
Une partie plus importante de l'aide pourrait se faire dans le cadre de ces stratégies régionales.
Diversité des instruments de l'UE
L'Union européenne distingue nettement les pays de l'"Union pour la Méditerranée" et ceux signataires de l'Accord de Cotonou qui bénéficient du Fonds Européen de Développement.
Une convergence plus dynamique est souhaitable, à l'échelle de l'ensemble du continent, entre les politiques européennes, en utilisant les différents instruments financiers de l'UE.
Les perspectives financières de l'Union européenne, dans l'après 2013, doivent s'appuyer sur un budget européen consolidé et les sommes allouées à l'aide au développement ne doivent en rien être diminuées.
Partenaires dans un monde globalisé
Les relations entre l'Union européenne et l'Afrique s'inscrivent dans le cadre d'un monde globalisé.
L'Europe demeure le premier partenaire commercial de l'Afrique.
Les relations entre l'Union européenne et l'Afrique, comme entre l'Afrique et ses autres partenaires, doivent respecter les décisions de l'ONU, de l'OMC, de l'OIT et de la Banque mondiale.
Relations avec les autres partenaires globaux (USA, Chine, Inde, Brésil)
Les pays d'Afrique ne se sont jamais contentés de leurs relations avec l'Union européenne, en particulier lors de la "Guerre froide". Aujourd'hui, ils intensifient leurs relations économiques et commerciales avec les puissances émergentes telles la Chine, l'Inde, le Brésil.
L'"AFRICOM" américain est un projet civil et militaire au budget à la hauteur de l'enjeu énergétique : l'Afrique est devenue le deuxième fournisseur de pétrole des Etats-Unis, doublant ses importations en moins de dix ans !
L'AGOA permet à une trentaine de pays africains de profiter d'un accès préférentiel au marché américain. Ce sont essentiellement les produits pétroliers qui en profitent.
Le montant cumulé des investissements chinois en Afrique dépasse 50 milliards de dollars, en particulier dans les secteurs du pétrole, des mines et des infrastructures, tout en tenant un discours anticolonialiste.
Les relations de l'Inde avec l'Afrique orientale et australe sont anciennes. Le commerce bilatéral est en forte augmentation. 5.000 soldats indiens servent actuellement dans les forces de paix de l'ONU en Afrique.
Le Brésil mène une politique diplomatique active appuyée par un transfert de technologies en particulier dans les domaines des biocarburants, de l'énergie et de la santé.
La diversité des partenaires est irréversible et globalement bénéfique pour l'Afrique, mais il est regretable que les autres partenaires de l'Afrique n'aient pas toujours le même souci que les Européens concernant le respect de la démocratie et des droits de l'Homme, ainsi que le respect des législations sociales et environnementales.
De plus, l'exportation de matières premières sans valeur ajoutée, même à des partenaires multiples, retarde la diversification et le développement réel des économies africaines.
08:43 Publié dans Afrique | Lien permanent | Commentaires (0)
12/07/2011
Quelques réflexions sur l'Afrique
"L'Afrique écrira sa propre histoire et elle sera au Nord et au Sud du Sahara une histoire de gloire et de dignité"
Patrice Lumumba, dernière lettre avant son assassinat.
1 milliard de voisins
Un pilier des relations extérieures de l'UE
Le continent africain est à notre porte.
Malgré la fin de la "Guerre froide", son importance géostratégique est plus grande que jamais, en particulier en raison de ses richesses naturelles.
Ce qui s'y passe a des répercussions, parfois très rapidement, au sein de l'Union européenne.
C'est pour cette raison qu'elle y intervient à travers l'aide humanitaire, l'aide au développement, l'aide en matière de sécurité. La majorité des opérations de la Politique Européenne de Sécurité et de Défense a eu lieu sur le continent africain.
Le partenariat entre l'Union africaine et l'Union européenne est un modèle unique et sans équivalent dans le monde de coopération.
Seule une réponse européenne est à la mesure des défis posés sur le continent africain.
Les relations avec le continent africain constituent une priorité qui doit figurer en tête de l'agenda de l'Union européenne, de sa Haute Représentante pour les affaires étrangères et de son Service Européen d'Actions Extérieures.
Il fut insister particulièrement sur la nécessaire cohérence entre les différentes politiques de l'Union européenne, qui ne doit pas se contenter d'être un bailleur de fonds, et leurs répercussions pour l'Afrique.
Migration (interne et vers l'extérieur)
Les migrations du continent africain vers l'Union européenne sont présentées par les forces racistes comme une nuisance et une menace. L'arrivée, par bateaux, au péril de leur vie, de milliers d'Africains, frappe les opinions publiques.
On estime à 3 millions et demi le nombre d'Africains vivant au sein de l'Union européenne, dont deux millions de Maghrébins, alors que l'Afrique compte 40 millions de migrants, à l'intérieur du continent !
Les migrations ont toujours été le reflet d'une nécessité économique des deux côtés. Aujourd'hui encore, si les Africains quittent leurs pays pour chercher une vie meilleure, leur arrivée répond à une demande massive de main d'œuvre dans les domaines de l'agriculture et des services, dans certains pays européens.
Les priorités :
- Le développement des pays africains, pour que les Africains puissent vivre et travailler dans leurs pays ;
- L'égalité des droits pour tous les travailleurs, ce qui implique une lutte renforcée contre les emplois illégaux et une politique sociale européenne dynamique ;
- Les transferts de savoirs et de technologies de l'Union européenne vers
l'Afrique, ce qui implique de lutter contre la "fuite des cerveaux" ;
- La lutte contre les trafics d'êtres humains.
à suivre
08:27 Publié dans Afrique | Lien permanent | Commentaires (0)
15/06/2011
deux poids, deux mesures
Madagascar : s'en tenir aux principes
Depuis deux ans Mr Rajoelina a pris le pouvoir avec l'aide d'une partie de l'armée.
Il a été suspendu de l'Union africaine, et de son organisation régionale la SADC.
Lui et ses proches sont interdits de visas.
L'Union européenne a suspendu sa coopération.
A deux reprises il s'est engagé à partager le pouvoir, dans le cadre d'une transition vers des élections démocratiques...et n'a jamais tenu ses promesses !
Le Parlement européen vient donc d'adopter une résolution qui rappelle quelques principes fondamentaux :
- Une prise du pouvoir par d'autres moyens que des élections n'est pas légitime ;
- Les auteurs de ce qu'il faut bien appeler un "coup d'Etat" doivent être sanctionnés ;
- Un pouvoir ainsi installé n'a aucune légitimité pour nommer des parlementaires ou pour organiser des élections ;
- Les gens qui conduisent une transition vers la démocratie ne doivent pas être candidats aux premières élections marquant la fin de cette transition.
Le parlement européen, regrettant l'échec des tentatives de médiations africaines, demande donc que l'Union européenne prenne les mêmes sanctions que l'Union africaine : interdiction de visas, et que des élections soient organisées sous contrôle international.
Ayant quelques responsabilités dans la rédaction du texte, j'ai été accusé :
a) de néocolonialisme. J'assume le "néocolonialisme" qui consiste à demander que l'Union européenne adopte les mêmes sanctions que l'Union africaine ;
b) d'ingérence. J'assume le fait de demander que la communauté internationale s'ingère dans les affaires intérieures d'un pays dont les dirigeants n'ont pas été élus, pour y contrôler l'organisation d'élections libres et non truquées, car cela peut éviter des guerres civiles.
Il y a peu la communauté internationale prenait de lourdes sanctions, efficaces, contre Laurent Gbagbo parce qu'il s'accrochait au pouvoir après avoir perdu les élections.
Mr Rajoelina n'a pas fait semblant de gagner les élections pour prendre le pouvoir.
Les peuples d'Afrique acceptent mal le système du "double standard".
Jusqu'à la dernière minute le "Quai d'Orsay" a tenté, en vain, de persuader les députés européens de voter contre ce texte, tant il est vrai qu'aux yeux de notre Président il y a bien deux poids et deux mesures, selon que l'on est de ses amis, ou non.
08:57 Publié dans Afrique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : afrique
11/04/2011
côte d'ivoire : un gâchis, des échecs
Côte d'ivoire : ce n'est pas Hollywood !
Les films made in Hollywood sont généralement faciles à comprendre : il y a les gentils et les méchants, généralement très méchants et faciles à reconnaître.
Ce manichéisme se répercute sur le traitement de l'information, en particulier télévisée, et pas seulement aux USA !
Le gâchis ivoirien actuel me semble être le résultat d'une succession d'échecs.
L'échec de la voie électorale : l'organisation des élections en Côte d'Ivoire a coûté 400 millions d'euros, ce qui n'a pas empêché la contestation des résultats. Gbagbo a commis une erreur fondamentale en croyant les sondages qui le donnaient largement vainqueur. Il est sincère, et il a malheureusement raison, quand il montre du doigt les pays africains où personne ne cherche noise à des potentats, au pouvoir depuis des lustres, avec des scores dignes de Ben Ali et Moubarak.
Quand je vois le Président mauritanien venir en médiateur, je ne peux pas oublier qu'il a pris le pouvoir par les armes, en déposant le Président élu.
L'échec de la voie légale : Ouattara, installé au pouvoir par la force des urnes, mais aussi par la force des armes françaises, ne verra pas son élection ratifiée par le Conseil constitutionnel ivoirien.
Il est certain que le Conseil constitutionnel ivoirien, qui a proclamé élu Gbagbo, est composé d'amis du Président sortant. Mais n'est-ce pas le cas dans beaucoup d'autres pays, à commencer par la France ?
Il est clair que la Constitution ivoirienne ne donne pas le pouvoir de proclamer les résultats au Conseil constitutionnel, mais il ne donne pas, non plus, ce pouvoir à la commission électorale ou à l'ONU.
La légalité est ici victime des contradictions de la Constitution ivoirienne.
L'échec de la voie diplomatique : quand Ouattara a lancé ses troupes à l'assaut, il a fait fi des efforts diplomatiques en cours. Peut-être avaient-ils trop duré ? Le fait est là : lui et ses troupes ne croyaient pas, ou plus, à la diplomatie pour lui permettre d'occuper le poste pour lequel il a été élu.
L'échec de l'Union africaine : incapable de trouver une solution africaine à un problème africain, ni par la diplomatie, ni par la force. Les casques bleus viennent très majoritairement du Pakistan et du Bengladesh, pas d'Afrique. C'est l'ancienne colonie qui retrouve ses réflexes de gendarme, sous mandat de l'ONU, il est vrai. Ce n'est pas par hasard que ce n'est pas à l'Union africaine que l'ONU a donné mandat d'appliquer ses décisions. L'organisation africaine en est bien incapable, et pas seulement pour des raisons financières.
L'échec de l'ONU : l'ONU a été incapable de protéger les civils (combien de centaines de morts ?). Et pour appliquer sa propre résolution, décidant de détruire les armes lourdes menaçant les civils, c'est à la France, plus qu'à "ses" troupes que le Secrétaire général de l'ONU a demandé de passer à l'action.
La principale question maintenant est : sera-t-il possible de tirer les leçons de ces échecs afin d'éviter d'autres tragédies, d'autres centaines de morts ?
10:31 Publié dans Afrique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : côte d'ivoire