02/09/2024
Histoire d'un conflit (XIXe-XXIe siècle)
Comment la Palestine fut perdue
et pourquoi Israël n'a pas gagné
Jean-Pierre Filiu
éditions du Seuil
Le livre est divisé en deux parties :
1) - Les trois forces israéliennes :
a) un sionisme historiquement chrétien
"un des actes de foi du courant "évangélique" est la croyance en la "seconde venue" de Jésus à Jérusalem pour y établir le Royaume céleste, une fois les Juifs "restaurés" sur la terre d'Israël."
"L'imprégnation biblique de la plupart des décideurs anglo-saxons se double de la détermination à fermer les portes des USA à l'immigration."
b) un pluralisme de combat
"Soit la dimension juive d'Israël est appelée à se dissoudre face à la démographie palestinienne, dans le cadre d'un Etat de droit assurant l'égalité à tous ses citoyens ; soit l'ambition démocratique de l'Etat juif est vouée à capituler face à la domination durablement imposée à des millions de Palestiniens"
c) une stratégie de faits accomplis
"à partir de l'été 48, l'Etat juif ne lutte plus pour sa survie mais pour obtenir le territoire le plus étendu, et donc le plus favorable à une campagne massive d'immigration juive."
"Ce renversement de légitimité qui fait passer les "droits" des immigrants sionistes avant ceux des Arabes de Palestine, est fondamental, car tout le reste en découle"
2) Les trois faiblesses palestiniennes
a) L'illusion arabe
"Les Palestiniens sont privés de représentation autonome par des Etats" supposés "frères"
"Les Palestiniens sont réduits à n'être qu'un peuple de réfugiés"
"L'appui financier du roi Faysal, du fait même de sa générosité désintéressée, constitue la seule intervention arabe à avoir renforcé sensiblement le nationalisme palestinien."
"En 1990, Arafat plaide en vain devant le Conseil de Sécurité de l'ONU en faveur d'une protection internationale de la population palestinienne des territoires occupés"
b) la dynamique factionnelle
"Le Hamas accuse l'OLP d'avoir cédé à l'invasion intellectuelle de l'Occident en adoptant l'idée d'un Etat laïc"
c) le deux poids, deux mesures
"le nationalisme palestinien se réclame en vain du droit des peuples à l'autodétermination, au sortir de la Première guerre mondiale. Mais il découvre que dans le mandat confié par la SDN sur la Palestine, seul le peuple juif se voit reconnaître des droits nationaux, dont sont en revanche exclus les habitants arabes, pourtant majoritaires à 90%.
Et c'est une décision de la toute jeune ONU, en 1947 qui déclenche le début de l'exode de la population arabe de Palestine, bien avant la proclamation de l'Etat d'Israël.
C'est encore l'ONU qui en 1949 créée une agence dédiée aux réfugiés palestiniens, agence chargée de les assister dans leur exil, plutôt que de garantir leur droit au retour dans leur patrie.
C'est toujours l'ONU qui après l'occupation par Israël, en 67, du reste de la Palestine mandataire, continue de réduire le peuple palestinien à un statut collectif de réfugiés sans droits nationaux."
"Israël présente le paradoxe d'un Etat créé par une décision de l'ONU, le plan de partage de la Palestine de 1947, qui va pourtant contester avec constance, et jusqu'à maintenant, la supposée "partialité" de l'ONU à son encontre."
"la réalité est que la domination islamiste à Gaza est confortée par le blocus israélien. Le Hamas, loin d'être affecté par un effondrement généralisé, investit avec succès dans la contrebande."
Conclusion : "sans un cadre de coexistence, un tel rapport de force n'apportera à l'Etat juif ni la sécurité, ni la stabilité, ainsi que l'épouvante du 7 octobre l'a démontré."
08:05 Publié dans Affaires étrangères | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : palestine, israël
05/08/2024
Reportage en Israël et Palestine
Amour, sexe et terre promise
scénario : Salomé Parent-Rachdi
dessin : Deloupy
couleur : Deloupy et Makma
éditions Les Arènes
"Le sexe et l'amour ne se laissent pas facilement enfermer dans les barbelés du conflit ou dans les carcans de la tradition religieuse. Vous aurez finalement saisi la vérité cachée d'une région si souvent mais si mal observée : rien n'y est pur et immaculé, ni les identités, ni les engagements, ni les rencontres. Tout y est mélangé, fluide et composite, en particulier les sentiments, les désirs et les plaisirs, qui procèdent toujours d'un impérieux besoin de transgression."
"Fractions de vérités brutes, parfois brutales, souvent drôles, toujours surprenantes et finalement optimistes, parce qu'elles éclairent autant de chemins d'émancipation, esquissés par des hommes et des femmes entravés par une multitude de contraintes, de frontières et d'oppressions."
Vincent Lemire, historien, auteur de "Histoire de Jérusalem" en BD.
Ce livre est un reportage parmi les Israéliens et les Palestiniens et leur vie affective, éventuellement sexuelle.
Des témoignages très diversifiés !
"Le pire dans tout ça, c'est que plein de Juifs israéliens fantasment de coucher avec une Palestinienne. Et, bien sûr, les Palestiniens ne supportent pas l'idée de faire l'amour avec une Palestinienne qui aurait couché avec un Juif."
"heureusement, je pense que la proximité des étrangers et des Israéliens fait évoluer la mentalité des Palestiniens."
"Ce qui m'intéresse, c'est lorsque le désir pousse à la transgression ultime : s'affranchir des règles de son groupe pour s'offrir à l'autre ou s'émanciper."
"Sur les 58 000 mariages recensés en Israël seuls 23 étaient des unions entre Juifs et Arabes."
"Certains voudraient coller des étiquettes à tout le monde mais la réalité, c'est que nous sommes des humains avant d'appartenir à telle ou telle communauté."
"Le tram, c'est vraiment l'un des rares endroits de Jérusalem où tout le monde se mélange."
"l'administration israélienne gère l'attribution des visas, et plus largement les documents d'identité de toutes les personnes vivant dans les territoires occupés, Palestiniens ou étrangers."
"les femmes palestiniennes ne veulent pas le dire, mais elles sont conditionnées par notre société où tout est question d'honneur. Un honneur qui repose sur la bonne conduite de la femme."
"le combat des Palestiniennes ne peut être séparé de la lutte contre l'occupation. On fait face à deux systèmes d'oppression qui sont interconnectés."
"dans les territoires palestiniens, près d'une dizaine de couples est composée de Françaises en couple avec des Palestiniens. Toutes ont des problèmes soit de visa, soit pour faire reconnaitre la nationalité de leurs enfants." "On est face à un Etat d'Israël qui décide de notre vie privée."
"je n'ai pas envie de me définir selon ma religion, même si les gens ne font que ça ici."
"Sortir avec des Juives et Juifs quand on est arabe, ça implique d'avoir des relations en hébreu. La langue que tu parles, c'est celle du pouvoir. A partir de là, c'est impossible d'être égaux."
"pour réussir à vivre ensemble il faut que la société change, qu'elle comprenne que pour y arriver, il faut laisser son arme de côté."
"Ce sentiment du nous contre eux est redevenu très fort après le 7 octobre"
08:43 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : bd, israël, palestine
12/02/2024
Rellire l'histoire du sionisme
Deux peuples pour un Etat ?
Shlomo Sand
éditions Seuil
"Pour de nombreux intellectuels juifs critiques, il était clair que le désir de créer un Etat juif exclusif sur une terre peuplée en majorité par des Arabes entraînerait un conflit violent et insoluble."
"Avec l'arrivée au pouvoir de l'extrême droite en Israël, les massacres perpétrés par le Hamas et les bombardements de la bande de Gaza la question d'un Etat binational où Israéliens et Palestiniens seraient citoyens d'un même Etat est devenue une urgence pour toute la région."
"7,5 millions d'Israéliens-juifs dominent, par une politique d'expulsions, de déplacement, de répression et d'enfermement, un peuple palestinien-arabe de 7,5 millions de personnes, dont une grande partie est privée de droits civiques et des libertés politiques élémentaires."
"Il est évident qu'une telle situation ne pourra durer éternellement."
"Ici, c'est un Etat d'apartheid." (Tamir Pardo, ancien chef du Mossad)
"l'oppression sévère et la négation des droits élémentaires de la population locale ont suscité une résistance violente, entraînant une répression toujours plus rude."
"Depuis cinquante-six ans, plusieurs millions de Palestiniens vivent sous un régime militaire et sont privés de droits civiques, juridiques et politiques. Plus grave encore : les Palestiniens soumis à l'occupation doivent vivre à côté de colons dans une situation d'apartheid de plus en plus évidente. Il leur est interdit d'habiter dans les colonies où ils sont autorisés uniquement à travailler. Il leur est interdit d'épouser un Juif ou une Juive et ils ne peuvent pas obtenir la citoyenneté israélienne."
"Seule l'intégration égalitaire dans le cadre d'un pouvoir commun serait à même de garantir qu'Israël puisse être un refuge pour tous ses habitants."
"En 1923, nombre de sionistes instruits savaient qu'il n'y avait jamais eu d'exil de masse de la population locale dans l'Antiquité, ni même de vague d'émigration importante. Nombreux sont ceux qui jugeaient probable que les paysans locaux palestiniens étaient les descendants des anciens Hébreux. Les Arabes n'ont pas exterminé la population rurale qu'ils y ont trouvée."
"Le recours au mythe de l'exil et du retour vers "la terre des ancêtres" après deux mille ans d'errance est devenu la doxa du sionisme, le présentant comme un fait historique authentique."
"Les récits de la Bible ont été transformés en "faits historiques" "On peut déplorer que cette falsification historique manifeste n'ait pas posé problème aux historiens israéliens qui savaient pertinemment qu'il n'existe à ce jour aucune trace ou témoignage d'un exil organisé par les Romains ou par les autres."
"Israël doit accorder l'égalité civique aux Palestiniens sous occupation"
"Israël se trouve face à un choix simple : continuer d'être un Etat d'apartheid ou avancer progressivement vers un Etat binational fondé sur l'égalité avec une citoyenneté égale et commune pour les Palestiniens et les Israéliens, dans le cadre d'une fédération, avec des institutions dont une partie incarnera la souveraineté partagée, et l'autre formulera les aspirations culturelles et nationales spécifiques."
"On ne peut plus séparer les deux populations et partager le pays de façon équitable"
"Le futur Etat palestino-israélien devra être une démocratie associative, qui stimulera et développera deux langues et deux cultures, tout en préservant l'autonomie interne de chaque communauté."
11:54 Publié dans Affaires étrangères | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : palestine, israël
12/05/2019
Une longue nuit à Paris
Unité 8200
Dov Alfon
éditions Liana Levi
L'unité 8200 est la plus secrète au sein des services secrets israéliens.
Services secrets que Dov Alfon connait bien puisqu'il fut officier de ces services de renseignements, avant de devenir journaliste au journal Haaretz, le journal de gauche d'Israël. Après y avoir été rédacteur en chef, il est aujourd'hui correspondant du journal à Paris.
Paris où se passe l'essentiel de l'action, et la totalité des meurtres. D'où le titre original "Une longue nuit à Paris."
Du côté des gentils, les responsables de l'unité 8200, du côté des méchants des tueurs d'une mafia chinoise. Mafia généreuse avec le Premier Ministre israélien. Pure fiction que ce Premier Ministre corrompu ?
L'adaptation du livre pour la télévision est logique car il y a de l'action et des situations très visuelles.
10:38 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : polar, littérature, israël
17/03/2015
Nétanyahou : on ne peut plus clair !
Il n'était pas difficile de deviner qu'avec Nétanyahou, les négociations n'étaient qu'un simulacre pour tromper l'opinion publique internationale. La poursuite de l'implantation de colonies dans les territoires occupés était révélatrice d'une volonté politique évidente.
Campagne électorale oblige, il a été on ne peut plus clair : pas d'Etat palestinien tant qu'il sera Premier ministre.
Il ne serait pas grave qu'il n'y ait toujours pas d'Etat palestinien si, sur le territoire d'Israël et de la Cisjordanie, se constituait un Etat laïc, avec des droits égaux pour ses habitants, sans tenir compte de leur religion. Mais ce n'est pas ça que Nétanyahou a en tête.
Il pratique la politique du pire : une tension permanente anxiogène qui le favorise électoralement. Un affaiblissement de l'Autorité palestinienne et le renforcement du Hamas pour justifier sa politique belliciste. En fermant la voie de la constitution d'un Etat palestinien, il favorise la montée des extrémismes, en particulier islamistes. Il le sait et, comme toujours, il est bien décidé à en jouer.
Lors de mes premiers voyages en Israël, il y a trente ans, la droite expliquait que les Palestiniens avaient déjà un Etat : la Jordanie. Aujourd'hui, la droite radicalisée de Nétanyahou veut les envoyer au Pakistan...
J'espère que ceux qui considèrent que c'est Dieu qui leur a donné cette terre et que les autres doivent en partir ne seront pas majoritaires aujourd'hui...
13:40 Publié dans Affaires étrangères | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : israël, palestine