19/08/2021
Le psy enquête
Le cercle des rêveurs éveillés
Olivier Barde-Cabuçon
Série noire / Gallimard
Paris 1926. "Les années folles", marquées par le souvenir très présent de la tuerie de 14/18. Olivier Barde-Cabuçoj a donc abandonné le XVIIIe siècle pour une période plus récente qui voit se développer la psychanalyse. Les rêves entrouvrent la porte de l'inconscient. Les "rêveurs" du roman se réunissent en cercle pour raconter ce qu'ils ont retenu de leur dernier rêve. Quand l'un entre eux meurt la gorge tranchée, comme il l'avait rêvé, un psychanalyste élève de Jung enquête. Il rencontre toute une galerie de personnages : poète surréaliste, journaliste délurée, peintre d'avant garde, industriel récoltant des fonds pour les fascistes, et surtout une Russe "blanche" qui ment comme elle respire.
Le dénuement rappelle Agatha Christie : les membres du cercle entoure le psy qui décrit à chacun(e) les raisons de tuer la victime. Et à la fin, le coupable est confondu.
"Il parait qu'on a fait combattre jusqu'à sept cent mille hommes de nos colonies pendant la guerre et que plus d'un sur dix n'en est pas revenu."
"Les repas ont toujours été marqués par une connotation forte de l'ordre social."
"Après l'armistice, le monde avait encore connu vingt-sept conflits."
"Au terme de la Convention gréco-turque de 1923, plus d'un million de Grecs orthodoxes ont dû quitter leurs terres orientales pour la Grèce tandis que quelques centaines de milliers de musulmans effectuaient le trajet inverse. Puis ce fut le tour des Arméniens rescapés du génocide de 1915 et spoliés de leurs biens par le nouvel Etat turc de Kemal. "Ce que Kémal a pris par la force, on le lui a concédé officiellement par traité en 1923."
"Il y a bien un jour dans sa vie où on n'a plus que ça, des souvenirs."
08:21 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : polar historique
16/08/2021
Dujardin en OSS
Alerte rouge en Afrique noire
de Nicolas Bedos
scénario Jean-François Halin
avec Jean Dujardin, Pierre Nimey, Fatou N'Diaye
Troisième film pastiche d'OSS, et de James Bond.
Jean Bruce est décédé, au volant de sa Jaguar, en 1963. Nous ne devons pas être très nombreux à avoir lu quelques uns de ses 90 romans lors de notre adolescence. Le héros est Hubert Bonisseur de la Bath qui travaille pour l'"Office of Strategic Service" (OSS) américain, l'ancêtre de la CIA, et non pas pour le SDECE français, le précurseur de la DGSE.
Nicolas Bedos est le digne fils de son père Guy, le roi d'un second degré qui combat la misogynie et le racisme. Il met dans la bouche du héros de telles énormités qu'il est difficile d'ignorer le message. J'espère que personne ne prend au premier degré ses réflexions !
L'intrigue est minimale : l'agent spécial est chargé d'aider un dictateur africain à se faire réélire avec plus de 80% des suffrages dans des élections "libres et transparentes", contre les rebelles communistes. Ordinaire de la "Françafrique"...
L'action se passe en 81. Impossible de ne pas sourire en entendant les âneries de la droite de l'époque qui brandissait la menace des chars russes à Paris en cas de victoire de François Mitterrand. Souvenirs, souvenirs...
16:10 Publié dans Film | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma
13/08/2021
Morts étranges
Le bureau des affaires occultes
Eric Fouassier
éditions Albin Michel
Un policier qui se veut dans la lignée du regretté Nicolas Le Floch. Je pense également au "Commissaire aux morts étranges" de Bade-Cabuçon.
Eric Fouassier place l'intrigue et les aventures en automne 1830. Il a manifestement étudié la période, après l'avènement sur le trône de Louis Philippe. De brèves notes en bas de page permettent de bien resituer le contexte historique.
Les Républicains, divisés, ne sont pas présentés de façon positive...
Il est obsédé par la traque d'un criminel sadique et pédophile surnommé "le Vicaire". Comme le héros ne parvient pas à cette capture il faut s'attendre à une suite.
16:52 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : polar historique
10/08/2021
Retour en Suède
1794
Niklas Natt och Dag
éditions Sonatine
Gustave III, "par la grâce de Dieu, roi de Suède, des Goths et des Vandales" est mort assassiné. Gustav Adolf, son fils unique, n'a que 15 ans et est sujet à des crises de démence. Son tuteur est son oncle. Il laisse la régence effective à son favori, le Baron Gustaf Adof Reuterholm. "Les mauvaises langues ont trouvé un surnom à 1794 : ils parlent d'âge de fer." "Un régime de régence en pleine déliquescence." "Je n'ai jamais entendu parler d'un régime qui souhaite autre chose que des sujets stupides et soumis."
Mais le roman s'attarde plus sur la vie miséreuse du peuple que sur les luttes au sein de la noblesse. "A Paris, l'aristocratie est envoyée à l'échafaud pour divertir la populace." (1794 est l'année de la Terreur. Après la chute de Robespierre en juillet - 9 thermidor- la terreur sera anti-jacobine)
L'orphelinat, l'hôpital, l'asile pour les fous, et la prison regroupent les pires misères.
"Q'un bandit s'échappe, passe encore mais on ne veut pas d'un fou dans la rue. Ce n'est pas pour rien que les asiles de fous sont appelés "tombeaux des vivants".
"La moitié des nouveaux-nés ont à peine le temps de venir au monde avant de devoir le quitter."
Si vous avez aimé 1793 vous retrouverez ces aventures plus noires que noires. Âmes sensibles s'abstenir !
Une virée à Saint-Barthélémy qui n'était pas encore "Saint-Barth", nous apprend qu'à l'époque l'île était suédoise, offerte par Louis XVI, en 1784, au roi de Suède, d'où le nom de la capitale "Gustavia". L'île restera suédoise jusqu'en 1878. En 1794, Saint-Barth était un port franc où le trafic des esclaves prospérait, alors que l'esclavage avait été aboli en France. Il sera rétabli par Bonaparte.
"Il ne sait rien de ce que c'est d'être une femme.C'est une vie où l'on attend de nous que nous étouffions la raison que nous a donnée Dieu pour nous en remettre en tout à l'homme."
"Sur le continent, on s'est libéré des chimères qui jadis nous opprimaient tous. Le Dieu du testament a été frappé à mort, les monarques qui gouvernaient en son nom sont remis en cause."
08:03 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : thriller, histoire
06/08/2021
Drogué jusqu'à la moelle
Crénom, Baudelaire !
Jean Teulé
Mialet-Barrault éditeurs
Avec son talent d'écriture indiscutable, Jean Teulé dresse un portrait à charge de Baudelaire, l'homme plus que l'écrivain. L'homme dont la vie fut un roman.
Enfant gâté qui devra être mis sous tutelle en raison de la vitesse à laquelle il dilapidait son héritage.
Dandy snob qui vivait dans la misère. La drogue passait toujours avant la nourriture, le superflu toujours avant l'essentiel.
"Baudelaire aime les vices et puis c'est tout."
Les maladies vénériennes le tueront avant l'alcoolisme.
Quand à l'oral de français du Bac l'examinatrice m'a demandé quels poèmes de Baudelaire je préférais, ma réponse a été sans hésitation : les interdits !
"Là tout n'est qu'ordre et beauté,
Luxe, calme et volupté."
"Ainsi je voudrais, une nuit,
Quand l'heure des voluptés sonne,
Vers les trésors de ta personne,
Comme un lâche, ramper sans bruit,"
"Et pourtant vous serez semblable à cette ordure,
A cette horrible infection,
Etoile de mes yeux, soleil de ma nature,
Vous mon ange et ma passion !"
"Nos péchés sont têtus, nos repentirs sont lâches"
17:04 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature