25/05/2020
Tenter de comprendre la Birmanie
Aung San Suu Kyi,
Rohingya,
et extrémistes bouddhistes
Frédéric Debomy, Benoît Guillaume
massot éditions
Je suis de ceux qui avaient une photo de "la dame de Rangoon" affichée dans leur bureau. Celles et ceux qui entraient ne pouvaient pas ne pas la voir. Au fil des années j'ai écrit régulièrement, pour le compte du groupe socialiste du Parlement européen, des propositions de résolution pour défendre les droits de l'Homme en Birmanie. Je comprends ce que Aung San Suu Kyi a souffert, en prison ou assignée chez elle. J'ai rencontré son mari à Chicago, en marge d'une convention du parti démocrate. Je sais que l'armée veut garder la réalité du pouvoir, et donc l'étroitesse de la marge de manoeuvre du gouvernement, surtout sur la question des minorités.
D'où mon désarroi face au drame honteux des Rohingas.
Frédéric Debomy et Benoît Guillaume connaissent la Birmanie. Ils s'y sont rendus plusieurs fois et y ont de nombreux contacts, surtout parmi les défenseurs des droits de l'Homme. Ils montrent par leurs dessins. Des faits, peu de jugements, pour nous laisser nous faire notre propre idée.
Ils parlent des Rohingya, mais également d'autres minorités, comme les Karens, et les Chins très soutenus par le PPE, et les Américains, parce que majoritairement chrétiens (ça, c'est moi qui l'ajoute)
"Je me retrouve à écouter ceux qui m'expliquent que les droits de l'homme passent après l'intérêt national et que la démocratie n'est pas toujours la priorité."
"Les moines extrémistes ont aussi poussé au crime."
"Donner un peu de pouvoir à Aung San Suu Kyi a permis aux militaires d'obtenir ce qu'ils souhaitaient : le rétablissement de relations correctes de la Birmanie avec la partie du monde qui n'appréciait pas leur dictature."
"Il y a un réflexe de défense d'une fierté fragile : on se referme."
"On opprime le plus faible par crainte du plus fort."
"Quand la politique dérive vers les obsessions identitaires, il me semble que c'est très dangereux." "En Birmanie comme en France, quand il est question d'identité les problèmes sont à l'avenant. Je crains que l'esprit de tolérance ne mette encore du temps à s'affirmer."
"Il y a des politiciens irresponsables qui vont dans le sens des préjugés au lieu d'inciter à les dépasser. Ils pensent que de cette façon, ils deviendront populaires. C'est jouer avec le feu."
"La Birmanie a derrière elle des décennies de conflits qui s'expliquent par le refus de l'armée birmane de prendre en compte une demande des minorités : vivre dans un Etat fédéral et non dans un Etat centralisé, sous domination des Birmans bouddhistes."
Le livre ses termine par la situation des femmes :
"être une femme en Birmanie, c'est être confinée à un rôle d'éternelle mineure. Les jeunes femmes obéissent à leurs mères."
"Il suffit d'observer que le statut des nonnes n'est pas égal à celui des moines."
"La femme doit à l'homme déférence et respect."
"Au Parlement birman, il y a 10% de femmes."
18:51 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : bd, birmanie
23/05/2020
Lublin 1938/1944
Au nom de l'enquête
Marcin Wronski
Actes noirs / Actes Sud
Lublin, au sud-est de Varsovie, sur la route vers l'Ukraine.
En 1938, une jeune femme est violée puis étranglée.De mystérieuses sécrétions maculent le corps de la victime. Le commissaire Zyga Maciejewski enquête. L'année suivante, même chose, alors que l'armée allemande envahit la Pologne. "Au nom de l'enquête", Zyga accepte d'être intégrée à la fameuse Kripo, la police criminelle allemande, bien connue des lecteurs de Philip Kerr. N'étant un "collabo" que pour des raisons de recherche d'un criminel, Zyga est recruté par la résistance, ce qui contrebalance son appartenance à la police allemande.
Zyga est obsédé par ces meurtres. D'autres identiques suivront. Pour Zyga, ils occultent les milliers de morts causés par les nazis, en particulier l'extermination du ghetto, et les morts du camp de concentration de Majdanck. Avec les nazis, le crime est dans l'ordre des choses.
En 1944, ce sont les troupes soviétiques qui bombardent Lublin puis s'installent dans la ville, ce qui n'empêchent pas Zyga de se concentrer sur la recherche de son tueur en série. Enfin avec succès.
17:26 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : polar, histoire
07/05/2020
Picasso et les femmes
Picasso
Le regard du Minotaure
1881 / 1937
Sophie Chauveau
éditions Télémaque
Mon épouse m'a fait découvrir les livres de Sophie Chauveau il y a une quinzaine d'années. Comme elle, j'ai accroché aux biographies de Lippi, Botticelli, et, bien entendu Léonard de Vinci.
Sophie Chauveau est fascinée par l'artiste Picasso. Comment ne pas l'être ? Et totalement outrée par l'attitude de Picasso à l'égard des femmes. Aujourd'hui il se trouverait probablement accusé de violences domestiques, à juste raison, même si aucune de ses compagnes ne l'a dénoncé.
"Je ne jette rien de l'artiste et presque tout de l'homme"
Le minotaure est un animal mythique mi taureau, mi homme. Le tableau qui représente le minotaure avec Dora son modèle de l'époque (années 30) montre toute la violence sexuelle de son fantasme.
Tout le monde savait dans l'entourage du peintre que Dora, qui avait 29 ans et Picasso 55, par ailleurs photographe de talent, n'était pas la première à subir les violences de Picasso. Elle avait été précédée par la douce Marie-Thérèse, séduite à 17 ans et à qui il imposait des relations sado-masochistes.
Dans cette biographie, Sophie Chauveau nous fait assister au défilé des conquêtes. Certaines ne sont que passagères. La gloire et l'argent amèneront de nombreuses femmes à se jeter aux pieds , si l'on peut dire, du bel Andalou.
Il y a Fernande, trop dépensière à un moment où il n'avait pas encore les moyens. Il reste avec elle 7 ans. Eva qui meurt de tuberculose. Olga, avec qui il se marie et avec qui il a un fils, Paulo. "La ballerine diaphane et éthérée a donné naissance à une mégère violente et paranoïaque". La jeune et douce Marie-Thérèse qu'il entretiendra et visitera jusqu'à sa mort, et dont il a une fille , Maya. Puis Dora Mar, aussi brune que Marie-Thérèse est blonde. L'une et l'autre refusent de participer aux parties échangistes.
"Les artistes n'ont pas la pudeur de leurs émotions, ils les exploitent" (Nietzsche)
"L'art est fils de la tristesse et de la douleur" (Picasso)
"La plupart des gens ne peuvent connaître que ce qu'ils savent déjà" (Picasso)
"Quand un tableau vous semble mauvais, vous avez un incontestable droit, celui de ne pas le regarder, d'aller en voir d'autres. Mais on appelle pas les gendarmes !" (Marcel Sembat)
"Tout homme est despote quand il bande" (Sade)
"Le début du siècle a pourtant déclenché une déferlante érotique très désinhibante . L'Etat ne rêve que de rétablir un ordre moral plus corseté." (SC)
"Picasso illustre à la perfection le dicton catalan : "l'Espagne est un pays où les hommes méprisent le sexe mais ne vivent que pour lui" (SC)
"Le fouillis de Picasso, c'est encore du Picasso" (SC)
"La page que tourne la guerre d'Espagne, c'est définitivement sa jeunesse qui le lâche par bribes" (SC)
"Il espère toujours qu'un nouvel amour va le sauver de lui-même et de ses démons." (SC)
18:38 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : peinture
02/05/2020
Baby Boom
Le fabuleux destin des baby-boomers
Michèle Delaunay
éditions Plon
Après la dernière guerre mondiale les naissances se sont multipliées, compensant largement les années "creuses" de la guerre. 20 millions sont encore en vie en France et commencent à prendre de l'âge.
L'auteur, Michèle Delaunay, fait partie de cette "vague". Cancérologue elle a débuté à 60 ans une carrière politique, médiatisée pour avoir battu Alain Juppé lors d'une législative. François Hollande l'a faite ministre "déléguée aux personnes âgées et à l'autonomie". A ce titre elle a élaboré la loi sur l'adaptation de la société au vieillissement.
Parce que les statistiques montrent une poursuite de la natalité jusqu'en 1973 elle inclut dans la "génération baby-boom" les enfants des "réels" baby-boomers qui ont vu leur espérance de vie passée de 62 à 82 ans. "La longévité sans incapacités remplace le vieillissement."
Bien entendu, je me suis senti concerné...
"C'est plutôt chic d'être âgé sans être vieux"
"Il ne faut pas chercher à paraître jeune, mais à ne pas paraître vieille"
"Il est interdit de s'interdire"
"Vieillir, peut-être, mais comme Victor Hugo"
Ils avaient 20 ans, ou presque, en mai 68, avec une revendication d'autonomie, et c'est justement la question de leur autonomie qui va se poser quand il vont atteindre le "grand âge".
08:21 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : baby-boomers
29/04/2020
Turing s'est-il suicidé ?
Indécence manifeste
David Lagercrantz
éditions Actes Sud / actes noirs
En 2014, le film "Imitation Game" faisait connaitre au plus grand nombre le rôle du mathématicien Alan Turing, pendant et après la guerre, ainsi que la véritable persécution dont il a été victime en raison de son homosexualité.
Personne ne conteste aujourd'hui que Turing a brisé le code de la marine allemande généré par la machine Enigma et que ses travaux mathématiques ont ouvert la voie à la naissance des premiers ordinateurs. Des capacités de calculs supérieures aux meilleurs des mathématiciens.
Le livre porte en couverture une photo de Turing, mais le livre est une fiction mettant en scène un jeune policier chargé de vérifier que Turing est mort par suicide.
En 1954, la guerre froide est à son paroxisme et la chasse aux "sorcières" communistes et homosexuels, impulsée par le sénateur américain Joseph McCarthy est une obsession.
Pour son enquête, le jeune policier remonte dans le passé de Turing, ce qui nous permet de mieux comprendre ce personnage hors du commun.
David Lagercrantz, Suédois, est l'auteur, entre autres de "Millenium 4, Ce qui ne me tue pas"
"Son père devait souffrir d'un blocage affectif , pas si rare chez les Anglais"
"A quoi bon les rêves quand on sait qu'ils ne peuvent se réaliser ?"
"Le mystère vaut toujours plus que la solution du mystère"
08:26 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : polar, histoire