08/06/2013
Des chantiers de jeunesse à la guerre d'Algérie, et aujourd'hui...
L'art français de la guerre
Alexis Jenni
Prix Goncourt 2011
Folio n°5538
La vie d'un jeune Français devenu militaire par les hasards des "chantiers de jeunesse pétainistes versant dans la Résistance, avant de continuer la guerre en Allemagne, puis en Indochine, pour finir en Algérie. "La fonction de chaque guerre était d'éponger la précédente".
"On aime pas, même si on s'en moque, être chassé".
"Le silence après la guerre est toujours la guerre".
"Il est tragiquement stupide de penser qu'un peu plus de force aurait fait l'affaire".
"On apprend pas impunément la liberté, l'égalité et la fraternité à des gens à qui on les refuse."
Pourquoi en faire un livre ? "Ceux qui l'ont vécu n'en ont pas besoin, et ceux qui ne l'ont pas vécu ne veulent pas l'entendre".
Le roman de cette vie de combats est entrecoupé de "commentaires". Un autre roman se déroulant aujourd'hui.
Le parallèle est fait avec la "militarisation" des forces de l'ordre, en particulier les CRS, et même les polices municipales, bien loin du traditionnel garde-champêtre.
Alors qu'un jeune homme vient de mourir tabassé par des nervis d'extrême droite, la description de ces néo-fascistes rêvant de "nettoyer" la France est, malheureusement, d'actualité.
"En France on ne sait pas quoi penser des militaires, on n'ose même pas employer un possessif qui laisserait penser que ce sont les nôtres. On se demande pourquoi ils font ça, ce métier impur si proche du sang et de la mort."
"Pourquoi tant d'écrivains parlent-ils de leur enfance ? C'est qu'ils n'ont pas d'autre vie : le reste, ils le passent à écrire." "Ecrire utilise du temps comme la broderie utilise du fil".
"Le cataclysme le plus terrifiant, le plus destructeur est bien celui-ci : l'absence que l'on ne remarque pas"
"La santé est le silence des organes"
"Tout génie politique est un génie littéraire"
"César mentait comme mentent les historiens"
"Le héros est tout autant celui qui gagne que celui qui sait raconter sa victoire"
"J'avais travail, maison et femme, qui sont trois visages d'un réel unique, trois aspects d'une même victoire : le butin de la guerre sociale."
"En tant que couple nous pratiquons surtout l'achat. L'achat fonde le couple"
"Est belle celle que je peux désirer embrasser". "Que nous reste-t-il si nous ne pouvons nous désirer, au moins du regard ? La violence ?"
"Le sexe nous rapproche et nous unit ; les voiles que l'on tend pour dissimuler cette vérité-là sont haïssables."
"La race n'est pas un fait de la nature, elle n'existe que si on en parle"
"L'Europe est une idée, pas un continent"
07:59 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature
01/06/2013
intrigue fin XIXe
Le secret de l'abbaye
Brigitte Aubert
10/18 "grands détectives" n°4377
Les abbayes médiévales fascinent, surtout les écrivains. Elles sont des lieux parfaits pour les intrigues. Surtout quand, dans les temps anciens, elles ont vu passer bien des conquérants, des pirates et même des déportés.
L'abbaye millénaire de "La nef des damnés" se situait sur l'île du Levant, au large de Toulon, celle-ci sur celle de Saint-Honorat, à quelques encablures de Cannes, d'où l'auteure est originaire.
L'action se passe à la fin du XIXe siècle. Zola se fait agresser parce qu'il a osé défendre Dreyfus.
Au passage, le rappel que l'édit de Milan, en 313, instaura la liberté de culte pour tous, avant que Théodose, le très chrétien, y mette fin avec brutalité en 392.
Au fil de la recherche d'un assassin, le lecteur croise toutes les célébrités de l'époque, en particulier Marcel Proust. "L'érudition est parfois la meilleure alliée du détective".
"La seule nouveauté, c'est que maintenant on peut filmer les gens en train de crever !"
"La société peut-elle tolérer le crime au prétexte qu'il ne dérange pas ?"
"Penser ne m'intéresse pas, c'est comprendre qui me motive"
"La limite de l'escroquerie, c'est la connerie de l'escroqué"
08:15 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature
25/05/2013
le roman policier de G. Moustaki
Georges Moustaki
Petite rue des bouchers
Livre de poche n°15366
Tout le monde connait les grands succès de Georges Moustaki. Ses romans sont moins connus. Il a même écrit, il y a dix ans, un roman policier qui s’inspire de ses années bruxelloises, bien avant l’immense succès du « métèque ».
L’enquête policière est accessoire, mais constitue un excellent prétexte pour parler de la « petite rue de bouchers », avant qu’elle ne soit l’actuel passage obligé de « hordes de touristes ».
Est-ce pour « nettoyer la place » de ce « quartier interlope », spéculation foncière à la clé, que s’enchaînent disparitions et morts suspectes, menaces et apparition des mafias italienne et yougoslave ?
C’était un temps où il était possible de rencontrer, au fond d’un estaminet, un chanteur idéaliste, à grandes dents, prénommé Jacques et surnommé « l’abbé », parlant toujours de lui à la troisième personne ». « On ne peut pas ne pas l’aimer ».
« Ca bouge dans les bouges, comme dit Jacques dans sa chanson ».
Rien à voir avec « le haut de la ville » et la très cossue avenue Louise.
Il y a même un protagoniste qui habite « en plein cœur de Woluwe » !
« Bruxelles est une ville au féminin et au pluriel. C’est une mère, une sœur, une amante, une houri, une prostituée, une jeune fille. Elle se donne facilement et personne ne la possède. » « Sa situation géographique en fait le centre névralgique de tous les trafics. »
13:30 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : moustaki, littérature
18/05/2013
dernier volet du quatuor algérien
L'automne des chimères
Yasmina Khadra
Folio policier n°510
Le commissaire Llob a 58 ans, il est poussé vers la retraite, en raison de sa "grande gueule".
"La retraite est une nouvelle vie qui démarre, un retour d'âge époustouflant. Les étalons de race meurent d'orgasme."
"Je suis un peu comme le melon. Je prends du ventre au détriment du pédoncule".
Pour ce dernier volet du "quatuor algérien", Yasmina Khadra ne se donne pas la peine d'inventer une intrigue policière. Le commissaire se déplace entre attentats et meurtres perpétrés par les islamistes. Sa haine pour ceux-ci dépasse celle qu'il éprouve pour les nantis du pouvoir. Il soupçonne la caste prédatrice au pouvoir d'instrumentaliser les terroristes pour assoir son pouvoir.
"D'un côté le territoire des magouilleurs, des lèche-bottes et des maquignons, de l'autre, celui des illuminés."
"A quoi sert la guerre aux intégristes si elle ne suscite pas la guerre aux intègres ?"
"Pour unique gloire, le culot d'avoir eu du talent à l'heure où le mérite revenait exclusivement à ceux qui en étaient totalement dépourvus" ; "Compétence, mère de tracasseries".
"Le pouvoir réside dans le degré de menace qu'il exerce"
Lorsque vous êtes hiérarchiquement subordonné, vous êtes censé l'être de galons et d'esprit. Vos talents se doivent de ne pas péter plus haut que vos talons."
"Vous êtes amenés à accrocher votre dignité aux vestiaires et à dérouler votre fierté à hauteur des paillassons"
"Yasmina Khadra, c'est pour rendre hommage au courage de la femme. Parce que, s'il y a bien une personne à les avoir en bronze, dans notre pays, c'est bien elle."
"Comment veux-tu que j'arrête de jacter, si tu te tais tout le temps ?"
08:00 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature
11/05/2013
L'affaire Harry Quebert
La vérité sur l’affaire Harry Quebert
Joël Dicker
Prix Goncourt des Lycéens
Prix de l’Académie française
Editions De Fallois / L’âge d’homme
Qui a tué Nola Kellergan, jeune fille de 15 ans disparue, et dont les restes réapparaissent trente ans plus tard ?
Le roman se présente sous forme d’une enquête aux rebondissements multiples qui tiennent en haleine jusqu’au dénouement.
L’investigation est menée par un écrivain en mal d’inspiration après un premier grand succès. Il se lance dans l’aventure parce que tous les soupçons se portent vers un autre écrivain célèbre, son maître et son ami.
Livre sur l’Amour. Amour absolu, amour interdit, amour réciproque, ou non, amour de substitution. « La vérité ne change rien à ce que l’on peut éprouver pour autrui. C’est le grand drame des sentiments. »
Livre sur la difficulté d’écrire, surtout après un grand succès. Tourment que devrait connaître l’écrivain genevois, après ce succès mérité.
Mais c’est aussi un portrait du monde de l’édition au XXIe siècle, guidée par la vitesse et le profit.
Livre sur l’Amérique « profonde », bien représentée par la peinture de Hooper qui se trouve en couverture, l’Amérique des « ploucs » qui rêvent de la grande ville.
Avec une vision de la justice américaine, que les Français connaissent mieux depuis l’affaire DSK.
« C’est l’histoire de parents qui ne veulent pas voir la vérité à propos de leur enfant.
C’est l’histoire d’un homme qui rêve de devenir un grand écrivain, et qui se laisse lentement consumer par son ambition. »
« Un bon livre est un livre que l’on regrette d’avoir terminé ».
Celui-ci répond bien à cette définition.
« Où que vous fuyiez, vos problèmes s’invitent dans vos bagages »
« La vie, c’est comme la course à pied : il y aura toujours des gens qui seront plus rapides, ou plus lents, que vous. Tout ce qui compte, c’est la vigueur que vous aurez mise à parcourir votre chemin. »
12:41 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature