17/02/2011
le quai de Ouistreham
Le quai de Ouistreham
Florence Aubenas
Editions de l'olivier
Succès de librairie l'année dernière, j'avais mis de côté ce livre. Je craignais une sorte de "Marie-Chantal chez les pauvres". Et bien, pas du tout !
Florence Aubenas est une vrai journaliste (Libération puis Le Nouvel Observateur), douée d'une écriture fluide qui capte l'attention.
Tout en gardant son identité elle s'est fait chercheuse d'emploi à Caen, bachelière mais n'ayant pas travaillé, comme salariée, depuis des années pour élever ses enfants.
Un seul type d'emploi proposé : le secteur du nettoyage. Un seul type de formation proposée : le nettoyage...
Elle est entrée ainsi dans l'univers de travailleurs de l'aube, ou de la nuit, généralement des femmes, mal payé(e)s, mal considéré(e)s, peu protégé(e)s, non seulement avec des horaires décalés, mais avec des vacations aléatoires et qui ne constituent jamais un salaire vraiment complet : "il faut être disponible le matin très tôt, le soir très tard" ; "aujourd'hui, on ne trouve pas de travail, on trouve des heures" : Se lever tôt pour gagner peu !
Sa description du démantèlement du service public de l'emploi est un réquisitoire sans appel : "Vous n'êtes plus là pour faire du social". "Gagner en productivité est la priorité". "Le mot "insertion" maintenant on l'oublie". "C'est le Pôle Emploi qui m'a proposé de devenir femme de ménage : est-ce que vous voulez commencer une nouvelle vie ?".
"J'ai souvent demandé aux conseillers de Pôle Emploi pourquoi ils ne faisaient pas respecter la loi." "Il n'y a pas de contrôle pour les employeurs, seulement pour les employés".
Un reportage/témoignage passionnant. Une sorte de piqure de rappel pour toutes celles et tous ceux qui n'ont pas ce genre de difficultés, qui oublient peut-être de saluer ces gens qui quittent les bureaux, après les avoir nettoyés, quand ils y arrivent, pour toutes celles et ceux capables d'empathie. "Tu deviens invisible quand tu es femme de ménage".
Un succès mérité.
"L'idée qu'on ne me proposerait rien était la seule hypothèse que je n'avais pas envisagée"
"J'ai fini par intégrer les séries d'épreuves et de génuflexions requises pour le moindre remplacement d'une semaine".
"Pourquoi ce sont les salariés qui pleurent leur usine ? Ce sont les patrons qui devraient être tristes !"
"Apprenez à faire le deuil de l'emploi que vous aviez. Si vous résistez, vous risquez la dépression"
10:48 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0)
16/02/2011
Desperate Belgium
Desperate Belgium
Saison 1 : six mois sans gouvernement
Pierre Kroll
Editions Luc Pire
La Belgique a un gouvernement "provisoire" depuis maintenant plus de six mois.
Sur place personne ne semble s'en rendre vraiment compte, tout en étant conscient des risques d'éclatement du pays.
Il parait que les milieux d'affaires s'impatientent car les incertitudes, ce n'est pas bon pour le busines.
Le dessinateur Kroll caricature tout cela avec humour. C'est le "Plantu" local. Pendant des années je me suis précipité sur son dessin, généralement féroce, dans l'hebdomadaire "Télé Moustique", ma lecture incontournable quand je suis à Bruxelles.
Malheureusement depuis quelques mois il a émigré vers "Le Soir", le grand quotidien bruxellois. Immigré (le politiquement correct dit : "expatrié"), mal intégré, je ne le lis pas.
Sans bien connaître la politique belge, impossible de ne pas reconnaître le Roi, particulièrement moqué, et ses fils. Le socialiste Elio di Rupo, avec son nœud papillon est également bien reconnaissable. Les Français connaissant beaucoup moins bien la politique belge que l'inverse, il y a des textes de Pierre Bouillon pour nous expliquer les personnages et les situations. Un peu comme des sous-titres...
08:19 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : politique, humour
15/02/2011
Le nègre du Président
Le nègre du Président
Daniel Carton
Edition Hugo & Cie
Daniel Carton, originaire du Pas-de-Calais, ancien journaliste de "La Voie du Nord", du Monde et du Nouvel Observateur, s'est fait connaître du "grand" public par "Bien entendu c'est off...ce que les journalistes politiques ne racontent jamais !" dans lequel il stigmatisait les connivences entre responsables politiques et journalistes.
C'est sur ce même thème qu'il revient, par le biais du roman.
Comme tous les journalistes politiques Daniel Carton est un spécialiste des "petites phrases", et le prouve !
Impossible de ne pas reconnaître le Président, dont il dresse un portrait féroce, avec sa montre, non pas Rolex mais Patex en or gris à 45 680 euros.
Le "nègre" cela pourrait être n'importe qui dans "l'entourage". "Une clique de tête à claques". Mais parmi laquelle il est même possible de trouver "un bosseur version p'tit gars du Pas-de-Calais éduqué dans le souvenir des tranchées de 14".
Un prétexte pour décrire le fonctionnement de ces gens, généralement des hommes, qui accrochent leur étoile au char d'un possible vainqueur. Et les femmes qui "tombent" : "Y en a qui préfèrent les footballeurs. Y en a qui préfèrent se taper des énarques".
La substance des faiblesses de l'âme humaine, ajoutée au cynisme du locataire de l'Elysée. "Gouverner avec Lui, ce n'est pas prévoir, c'est d'abord se faire voir!"
"Devant le petit personnel ne jamais laisser tomber la cravate qui vous pose et le costard qui en impose".
"Il doit y avoir un âge où l'on est tenté de tout remonter pour freiner la descente"
"Comme ceux de la télé, ils ne l'approchent jamais, mais ils croient toujours que le peuple est vulgaire" en pensant que "c'était quand même difficile de Le faire élire en Le faisant parler comme Montaigne, celui de l'avenue !"
"Si Brahms et Mozart ne sont pas inscrits à leur très grand parti, il est inutile de leur en parler".
"Ces vieilles familles où l'on se vouvoie pour être sûr de ne pas se laisser prendre par l'horreur des sentiments"
"Etre moche, ça pousse sérieusement à apprendre"
"Quand tu chopes ce satané virus de la politique t'acceptes d'y mettre un orteil et tout y passe. Ta zigounette avec, et ceci n'est pas qu'une image"
"En politique, la communauté des haines fait le fond des amitiés"
"Rares, très rares sont ceux qui sur ces cimes, acceptent de s'accorder aussi le pouvoir d'avoir tort."
"Nous construisons tous des châteaux en Espagne. Le plus difficile est de pouvoir vivre dedans."
"On est ce que l'on fait"
08:48 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : politique, littérature, sarkozy
14/02/2011
Journée d' élections au Tchad
Ouverture théorique des bureaux : 6 heures. Un peu avant nous sommes devant la porte de l'école Bololo, qui va servir de bureau. Seul le gardien, avec la clé est présent. 6 heures 30 : toujours personne. A côté des femmes et des enfants sont assis en cercle pour apprendre le Coran. A 7 heures, avant de prendre l'avion vers le sud, fief de l'opposition , tous les observateurs européens joints par téléphone confirme : impossible de trouver un bureau de vote ouvert.
Arrivée dans le sud : piste toute neuve construite par les Chinois. Accueil par les autorités locales. Premier bureau, à l'ombre au centre d'un village. Les opérations n'ont toujours pas commencé : pas de nouvelle du secrétaire !
Centre ville : un centre scolaire : 9 bureaux de vote ; 4 sont fermés : pas de listes électorales ! Les électeurs, sous un soleil qui commence à taper dur se pressent dans les 5 bureaux ouverts, même ceux des bureaux fermés, qui ne sont donc pas sur les listes, mais que l'on ajoute à la main.
Le responsable de la commission électorale avoue son impuissance.
Retour à N'Djamena. Il se confirme que la désorganisation est générale. Frauduleuse ? Il faudrait être un génie de l'improvisation dans une telle pagaille !
Tournée des bureaux :beaucoup d'électeurs, analphabètes, cherchent leur bureau.
Dans la capitale moins de la moitié des électeurs ont voté.
Retour à l'école Bololo : trois bureaux dans trois salles de classe. Au tableau les effectifs : entre 65 et 100 élèves. Ouverts avec deux heures de retard, les bureaux fermeront donc deux heures plus tard, après la tombée de la nuit. Pas d' électricité, des lampes, mais pas de piles...
Inquiétant pour les capacités logistiques et administratives du pays...
08:46 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Élections, afrique
12/02/2011
Tchad : veille d'élections
En étant positif, il est possible de dire que la campagne électorale a été pacifique, qu'elle s'est faite au porte à porte. Il est également possible de dire qu'elle a été de "faible intensité",qu'elle a provoqué peu d'engouement. Probablement à cause d'un niveau de communication proche du zéro pour ce que j'ai vu d'afficher et de "spots" télé.
L'opposition est éclatée, incapable de faire les listes communes ou un programme commun.
Le financement de chaque parti repose sur les moyens d'un chef tout puissant. D'où le succès de la mouvance présidentielles qui, en plus, ne se prive pas d'utiliser les moyens de l'Etat.
A la veille de l'ouverture du scrutin, je risque un pronostic : autour de 60% pour les candidats du Président !
Le niveau de participation sera interressant, en particulier dans le Sud, traditionnellement frondeur à l'égard de ce Président venu du nord est, mais largement démobilisé. Départ demain matin à 5 heures...
18:26 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Élections