14/09/2011
Blutch voudrait en finir avec le cinéma
Pour en finir avec le cinéma
Blutch
Editions Dargaud
Publié en feuilleton dans Libération cet été, ces réflexions sur le cinéma, et les acteurs, au moins autant que les actrices, se lisent avec plaisir, même si le dessin est un peu sombre.
Pour cinéphiles (je suis décidé à l'offrir à mon neveu pour Noël), pour les gens qui, comme moi, ont fréquenté les ciné-clubs dans les années 60, mais également les autres, avec un parfum mélancolique, car n'avons nous pas tous été marqués, plus ou moins, par le cinéma ?
Pour tous ceux qui ne veulent pas en finir avec le cinéma...
"Le cinéma, c'est un accélérateur de particules"
"Le cinéma est un filet à papillons pour attraper les petites filles"
"Le cinéma, c'est la supercherie suprême, la bourgeoisie industrielle qui avance masquée"
"Le cinéma est la poésie frustre du XXe siècle"
"Je tiens la cinéphilie pour une pratique masturbatoire"
11:20 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : bd
11/09/2011
corruption policière au siècle des Lumières
Les ripoux des Lumières
Corruption policière et Révolution
Robert Muchembled
Editions du Seuil
La thèse de Robert Muchembled, professeur à l’université de Paris-Nord, est simple et lumineuse : à la fin de l’ancien Régime, les officiers publics achetaient leurs emplois, y compris les policiers, et leurs salaires étaient trop modestes pour leur permettre de rembourser ce qu’ils devaient emprunter pour acheter leur « office ». Ils payent si cher leur charge qu’ils mettent d’abord leur zèle au service d’eux-mêmes ».
Il fallait donc qu’ils trouvent des revenus complémentaires : argent soutiré aux juifs, aux libraires qui impriment ou vendent des pamphlets interdits, aux tenanciers des tripots de jeux ou de bordels, et surtout chantages au détriment des personnalités, en particulier ecclésiastiques, qui n’auraient pas du se trouver dans ces lieux de perdition, ou tiennent à ce que leurs amours secrètes le demeurent. « Le fleuron de ses observations concerne les filles entretenues par les grands aristocrates et les plus riches contemporains ». « En connaissant les secrets les mieux gardé, ils peuvent se remplir les poches ». « Le sexe est alors la principale passion collective. Le roi donne l’exemple, et tous l’imitent. » « Le mixage des classes dans le lit des catins prend à l’époque une stupéfiante ampleur ». « La Révolution est aussi née de la rupture des codes traditionnels » ; « un divorce croissant entre la haute société et le reste du pays ».
Tout le monde est fiché, avec l’aide de « mouches », criminels à qui l’impunité est promise…tant qu’ils servent d’indicateurs à la police. « La surveillance systématique se focalise sur des secteurs susceptibles d’enrichir ». « Un véritable racket organisé ». »Une véritable entreprise d’exploitation de toutes les faiblesses humaines met en coupe réglée la ville, et la Cour, de 1748 à 1757.
Autre thèse : l’exemple venait de haut, puisque rien ne se faisait sans « pots de vin » au bénéfice du monarque et de sa favorite, la marquise de Pompadour. « Les hommes chargés de faire respecter les lois imitent les maîtres du jeu social et abusent de leur autorité pour s’offrir une place éminente au soleil ». « Un lent pourrissement du régime a préparé sa disparition ». La police n’a pas vu venir la Révolution, tout occupée à tirer profit d’un monde en train de s’effondrer ». « Ils sont opposés au moindre changement, parce qu’ils tirent le plus grand profit de leurs connaissances des points faibles du système ».
« Le Lieutenant général Sartine, et plus encore son successeur et ami Lenoir sont complices de très nombreuses malversations ».
08:27 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : histoire
10/09/2011
en Afghanistan
L'homme de Kaboul
Cédric Bannel
Editions Robert Laffont
C'est un, bon, roman policier, et d'actions, qui se passe à Kaboul, mais qui sort de la capitale pour nous parler de la vie en Afghanistan. Qui se passe également, un peu, en Suisse.
La carte de l'Afghanistan qui se trouve au début du livre nous aide à suivre quelques péripéties, et à comprendre où se situent les différents groupes ethniques.
La "coalition" de l'OTAN n'en sort pas grandie, et le régime, corrompu, du Président Karzaï moins encore : "La famille et les proches du Président Karzaï qui ont bâti des fortunes en centaines de millions de dollars".
L'auteur a manifestement été dans le pays et s'est documenté. On sent sa sympathie pour une sortie de crise grâce aux "talibans modérés", et même "éclairés", après une négociation, facilitée par la "Coalition", avec les Tadjiks et les Hazaras.
Je ne connaissais pas cet auteur. Si j'en trouve un, je tenterai la lecture d'un autre de ses livres.
"Une guerre qui ne tue pas d'innocents n'intéresse personne"
"C'est l'obscurantisme qui a détruit notre pays"
"Pourquoi accepter la kalachnikov et pas l'ordinateur, l'électricité et pas l'évolution des mœurs ?"
"Ils se saignaient aux quatre veines pour payer des dots absurdes, représentant plusieurs années de salaire"
"L'économie de la dot est la seule chose qui fonctionne bien dans ce pays, avec les attentats suicides et le bakchich"
"Les Américains, pour s'attirer les bonnes grâces des chefs de village, distribuaient depuis quelques mois des pilules de Viagra"
"Tous les Afghans s'étaient accoutumés à une liberté encadrée, conditionnée, limitée et à une violence de chaque instant"
"La plupart des endroits ouverts aux Occidentaux sont fermés aux Afghans, et vice-versa"
"Les milliards de l'argent de la drogue alimentent une spéculation foncière effrénée"
"Les anciens "contras" sont particulièrement appréciés des sociétés de mercenaires pour leurs techniques de contre-guérilla, leurs faibles revendications salariales et parce que, quand ils se faisaient tuer, tout le monde s'en moquait.
"Pakistan, Inde, Chine, Russie parient sur l'éclatement du pays pour en voler les ressources naturelles"
"Celui que tu ne peux pas acheter, écrase-le"
"La politique est un art d'exécution qui requiert une bonne dose de complexité"
08:45 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature
08/09/2011
faut-il arrêter l'aide à l'Afrique ?
L'aide fatale
Dambisa Moyo
Les ravages d'une aide inutile et de nouvelles solutions pour l'Afrique
Editions JC Lattès
L'auteure est une économiste zambienne, diplômée d'Oxford et d'Harvard, travaillant chez "Goldman Sachs" après un passage à la Banque Mondiale.
Son constat est simple : résultats de l'aide occidentale à l'Afrique : essentiellement la corruption.
La moitié de l'aide étrangère versée à l'Afrique quitterait le continent chaque année.
"Les choses n'iraient peut-être pas si mal si les dirigeants africains réinvestissaient sur place l'argent volé"
"La vérité est que les malheureux en Afrique ne voient de toute manière rien des flux de l'aide"
Elle a raison de souligner que l'aide n'a pas empêcher le taux de pauvreté de s'accroître de façon vertigineuse, et le niveau d'alphabétisation de baisser.
Entre 1.000 et 2.000 milliards d'aide depuis les indépendances, donc quelques décennies, cela peut paraître énorme. Mais doit être relativisé et comparé, par exemple, aux 10.000 milliards dépensés depuis 10 ans par les USA dans la lutte contre le terrorisme, sans parler des 700 milliards annuels du budget américain de la défense, ou des 3.000 milliards échangés chaque jour sur les marchés boursiers.
Ses conclusions sont discutables : il faut arrêter progressivement l'aide ("elle fait partie du problème, pas de la solution"), sauf l'aide humanitaire, afin de responsabiliser les Africains.
"Les guerres civiles de Somalie peuvent être attribuée à une compétition entre factions pour le contrôle de l'importante aide alimentaire."
L'aide serait au développement "la maladie dont elle prétend être le traitement".
Le problème, c'est que cette solution risque de déresponsabiliser un peu plus les riches.
Les solutions qu'elle préconise sont également discutables, en particulier, de se tourner résolument vers la Chine.
Elle a raison de préconiser de se tourner vers les investisseurs privés (et pas seulement les Chinois), mais elle généralise un peu vite quand elle écrit : " les investisseurs ne sont plus des spéculateurs à court terme". Surtout qu'elle reconnaît elle-même : "Faire des affaires en Afrique est un cauchemar".
Ce livre a le mérite de poser une nouvelle fois, mais de façon directe la question : "comment l'Afrique peut-elle sortir de la situation actuelle ?", en y ajoutant une autre : "les Occidentaux doivent-ils, peuvent-ils l'y aider ?"
"L'aide fait partie intégrante de l'industrie du spectacle"
"L'aide internationale est devenue un bien culturel"
"La moralité pénétrée de culpabilité de l'Occident progressiste"
"Avec la Banque mondiale, le FMI, les agences de l'ONU, les agences gouvernementales et les 25.000 ONG enregistrées, l'aide est le gagne-pain d'un demi-million de personnes" "Les donateurs occidentaux ont une industrie de l'aide à entretenir"
"L'une des caractéristiques de la guerre froide fut l'empressement de l'Occident de soutenir, financer et épauler une bande de dictateurs pathologiques"
"Les fameuses conditions imposées pour l'aide n'ont pas plus de valeur que la feuille de papier sur laquelle elles figurent, car les donateurs cherchent désespérément à donner"
"L'ennui avec le modèle de dépendance de l'aide, c'est qu'il maintient le continent dans une perpétuelle enfance" ; "L'aide encourage un comportement de chasseur de rentes"
"A leur apogée, les flux du plan Marshall représentaient seulement 2,5% du PNB des pays bénéficiaires, pour une durée limitée. L'Afrique reçoit une assistance, considérée comme une source de revenus permanente, presque équivalente à 15% de son PNB."
"L'Afrique montre que l'abondance des terres et des ressources naturelles n'est pas une garantie du succès économique" ; "La dépendance à l'égard des ressources naturelles s'est révélée plutôt une malédiction qu'une bénédiction"
"On ne voit guère de représentants élus de l'Afrique, ou de hauts fonctionnaires africains chargés du dossier du développement, offrir leur opinion sur les mesures à prendre, ou suggérer ce qui devrait être fait pour sauver le continent de la régression. Cette responsabilité semble laissée à des musiciens qui résident hors du continent"
08:06 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : afrique
04/09/2011
lutte contre l'obscurantisme
Aesculapius
Les mystères de Druon de Brévaux
Andrea H. Japp
Editions Flammarion
Du même auteur, j’ai déjà parlé dans ce blog de « Monestarium » (Livre de poche) et « La croix de perdition ».
Andrea H. Japp invente le personnage d’Héluise, fille de médecin condamné par l’Inquisition et qui, pour échapper à celle-ci, se transforme en Druon de Brévaux, « mire » (médecin laïc) et chevalier, au temps du roi Philippe le Bel.
Son errance l’amène au château d’une baronne veuve énergique, en butte à une conspiration, via les massacres commis par une bête tellement énorme qu’elle ne peut être que l’incarnation du diable.
Andrea H. Japp arrive, sans peine, à nous convaincre des capacités des femmes, (c’et un roman très féministe), mais pas au fait qu’une femme du XIVe siècle, même grimée, puisse se faire passer pour un homme.
Il est vrai que depuis le XIIe siècle, les femmes n’avaient plus de droit d’exercer la médecine, même comme « miresse », sous peine d’être considérées comme des « sorcières ».
« On se lasse vite de la beauté, rarement de l’esprit »
« Tant d’êtres sont morts à cause des convictions des autres »
« C’est un travers classique de l’esprit : ne retenir que ce qui appuie notre conviction »
« Il existe une pléthore de vérités, puis qu’on les façonne, pour la plupart »
08:21 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature