10/09/2009
Mes valises diplomatiques
Mes valises diplomatiques
Les tribulations d'une épouse d'ambassadeur
Brigid Keenan
Editions Payot
Il faut tout d'abord préciser que l'auteur n'est pas une épouse comme les autres : elle est d'abord une journaliste renommée travaillant pour les plus grands journaux britanniques, et quand elle écrit son "journal", elle ne le fait pas en pensant à ses futurs petits enfants, mais d'abord à de potentiels lecteurs, à qui elle veut "vendre" des histoires.
Elle est Britannique et cela se sent, dans le choix des anecdotes (par exemple l'horreur de découvrir le saucisson de cheval), comme dans la façon de les raconter. Les journaux anglais sont différents des journaux français.
Elle nous promène, de façon agréable et humoristique, à travers le monde : Kazakhstan, Ethiopie, Gambie, Inde, Syrie, Caraïbes...et même Bruxelles (Elle raconte comment, dans cette ville, le gynécologue accoucheur lui refuse la péridurale car "tout accouchement implique souffrance").
Son mari n'est pas vraiment "ambassadeur", et Brigid raconte comment l'ambassadeur britannique prend soin d'éviter le mot : il est fonctionnaire, "délégué" de la Commission européenne. "Il incarne la dernière création en date de la diplomatie internationale". Si un jour le Traité de Lisbonne est adopté il prévoit la création d'un véritable "Service d'action extérieure" de l'Union européenne, qui ne sera plus seulement celui de la Commission.
Ce livre se trouve, fort justement, au rayon "écrivains voyageurs", mais il pose, avec sensibilité, la question de ces épouses, "conjointes accompagnatrices", obligées, pour suivre leur mari, d'abandonner leur travail qui, parfois, les passionne, alors qu'elles peuvent n'avoir aucun goût pour l'organisation de réceptions. Elle parle également, avec l'inquiétude rétrospective d'une mère, des perturbations subies par les enfants (puis adolescents) de ces adultes qui changent d'affectation, et donc de pays, tous les trois/quatre ans.
"Les Kazakhs sont passés en quelques années de la yourte au centre commercial"
"La femme est comme une marmite : tout ce qu'on y met peut bouillir"
"Samarkand constituait le plus bel endroit au monde. Hélas ! Les édifices religieux se sont mués en vastes boutiques pour touristes"
08:41 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature
03/09/2009
Les espions du Vatican
Les espions du Vatican
Espionnage et intrigues de Napoléon à la Shoah
David Alvarez
Editions du Nouveau monde
Le titre, et le sous-titre sont aguichants à souhait, mais frisent l'arnaque.
1) Le titre américain parle des espions "in" Vatican, à l'intérieur de celui-ci, et l'auteur explique que le Vatican, à partir de la perte des Etats pontificaux (le seul service d'espionnage qu'a eu le Pape était pour surveiller les patriotes italiens au sein de ses Etats, au XIXe siècle), a bien été incapable d'avoir un service de renseignements. Le Vatican n'aurait même pas été capable d'organiser un "contre-espionnage" pour sécuriser ses informations et ses communications. En particulier à l'égard des services d'espionnage italiens, très infiltrés, et interceptant toutes les communications vaticanes, même codées. "Le Saint-Siège était une cible facile pour les services de renseignements étrangers : ses procédures de sécurité étaient minimales, ses canaux de communications vulnérables".
Sa seule protection est sa tradition de discrétion, "une culture administrative qui insistait sur la prudence, le secret, l'obéissance et la loyauté".
Les nonces apostoliques et autres éminences étaient des religieux qui n'ont jamais été formés à recueillir des renseignements autres que religieux.
2) Il s'agit d'un très sérieux ouvrage universitaire, avec de nombreuses redites, probablement pédagogiques, publié à l'origine par l'université du Kansas. A l'image de l'historien américain Robert Paxton, qui a bousculé la vision de l'Histoire de la France de Vichy, grâce à son regard distancié et plus objectif que les historiens français, David Alarez a fait un vrai travail d'historien, prisonnier d'aucun "cliché", ni d'aucune idée toute faite.
Mais cela ne se lit pas comme un roman...
"Le Vatican ne chercha pas à mobiliser ses ressources ecclésiastiques pour recueillir des renseignements militaires ou politiques"
"Aucun service n'a jamais été chargé de rassembler et d'analyser systématiquement les informations qui arrivaient". "Le Vatican était un récipiendaire passif des informations"
"La plupart des opérations de renseignements étaient dirigées contre les menaces internes à l'orthodoxie catholique"
"Tout le monde dit toujours que le service diplomatique du Saint-Siège est le meilleur du monde. Si le nôtre est le premier, je voudrais bien voir les seconds" Domenico Tardino, Secrétaire d'Etat adjoint du Vatican
"Le Vatican a eu très tôt connaissance de l'existence de la "solution finale". Dès l'automne 1941, le nombre de gouvernements informés sur la question ne cessa de croître". "Indubitablement le Vatican possédait des renseignements sur la solution finale."
"L'espionnage, qui allait influencer de manière spectaculaire la conduite de la guerre et de la diplomatie, échappa complètement au Vatican."
08:37 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature
30/08/2009
Oscar Wilde et le meurtre aux chandelles
Oscar Wilde et le meurtre aux chandelles
Gyles Brandreth
10/18, grands détectives
Oscar Wilde est plus qu'un auteur incontournable de la fin du XIXe siècle, c'est également un personnage hors du commun, auteur de traits d'esprit que l'on répète encore aujourd'hui avec gourmandise et qui remplissent les dictionnaires de citations. ("Il avait mis du génie dans sa vie, et seulement du talent dans son œuvre").
La -bonne- idée de l'auteur est d'avoir fait d'Oscar Wilde, un "grand détective", en s'appuyant sur l'amitié, réelle, d'Oscar et d'Arthur Conan Doyle. Oscar, admirateur de Sherlock Holmes ("cette parfaite machine à raisonner et à observer"), entre donc dans les pas de celui-ci. Et il mène l'enquête, en dandy mondain, en faux dilettante.
Il lui faudra un peu plus de six mois pour prouver la culpabilité de l'assassin, avec élégance, entre gentlemen.
Cela donne un livre hybride, "à la manière de", entre Sherlock Holmes et Oscar Wilde.
Celles et ceux qui aiment l'un et l'autre se régaleront.
"La constance est l'ultime refuge de ceux qui manquent d'imagination"
"Elle débordait de charme et de vitalité-le secret de la séduction"
"Le mariage est aussi démoralisant que les cigarettes, et bien plus coûteux"
"C'est sur le passé que nous nous appuyons, mais c'est le futur qui nous stimule"
"J'ai des goûts simples : je me contente de ce qu'il y a de meilleur"
"Les femmes sont faites pour être aimées et non pour être comprises"
08:55 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature
22/08/2009
L'homme du lac
L'homme du lac
Arnaldur Indridason
Editions Métailié
Prix du roman policier des lecteurs de l'Express
Après "la Voix", Grand prix de la littérature policière en 2007, dont j'ai déjà parlé, la suite des aventures du commissaire Erlendur Sveinson.
Le traducteur nous explique qu'en Islande, l'individu est toujours désigné par son prénom, suivi du prénom de son père. Ainsi le commissaire Erlendur Sveinson, est le fils de Svein, comme l'auteur, Arnaldur, est le fils d'Indrida.
Une fois dépassée la difficulté de ces noms avec des consonances peu habituelles pour nous, la lecture est aisée.
Cette aventure ne nous amène pas uniquement en Islande, mais également, au rythme nordique tranquille, à Leipzig, du temps de la RDA, et met en scène de jeunes idéalistes communistes islandais, formés en Allemagne de l'Est, dans l'espoir d'en faire, en raison de la présence d'une importante base américaine, des espions, et qui reviennent presque tous aussi brisés que leurs rêves d'une société plus juste.
Aujourd'hui, la guerre froide est terminée, les Américains n'ont plus besoin d'être présents en Islande, et ce pays a fait l'actualité en raison d'une crise bancaire encore plus spectaculaire qu'ailleurs. Le gouvernement conservateur a été largement battu aux élections, et la Gauche, enfin arrivée au pouvoir, a entamé la procédure de demande d'adhésion à l'Union européenne.
"Les hommes n'ont aucune limite quand il s'agit d'être lamentables"
"L'Islande est un des pires endroits au monde. Le climat est une horreur, avec ce froid et cette obscurité éternellement battus par les vents."
"Heureux ceux qui n'ont pas vu et qui ont cru" (évangile selon Saint Jean, à propos de Thomas...et de tous ceux qui ont cru sans avoir vu la réalité)
09:00 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature
20/08/2009
après la chute
Après la chute (1989-2005)
Extraits de "Après la guerre" de Tony Judt
"Pour empêcher les Allemands de l'Est de quitter leur pays, les dirigeants allemands de l'Ouest entreprirent de l'abolir"
"Dans les trois années qui suivirent l'unification, les transferts de l'Ouest de l'Allemagne vers l'Est s'éleva à 1.200 milliards d'euros"
"Dans les années de déclin, le patriotisme resurgit, tel un substitut commode du socialisme"
"Le Kosovo, c'est votre Algérie dans l'Orléanais" (Malraux)
"Le passage tant attendu du capitalisme au socialisme avait été théorisé ad nauseam, mais nul n'avait songé à offrir un avant projet de transition du socialisme au capitalisme"
"Les frontières ne sont pas entre les pays, mais entre les régions urbaines prospères et un cœur rural négligé et déshérité"
"Quand l'Etat vendit ses intérêts, ce sont les mêmes hommes qui devaient vendre...et acheter. Sous couvert de privatisation, ce fut le triomphe de la kleptocratie"
"La plupart des intellectuels d'opposition ne réussirent pas leur conversion en politiciens"
"Le premier marqueur est la ressource linguistique, un indicateur de standing social"
"Les loteries ne sont qu'un autre moyen de lever des recettes publiques :elles sont juste plus régressives"
"Ce qui unit vraiment l'Europe, c'est le foot !"
"La Commission européenne consacre désormais ses efforts à déréguler les marchés"
"L'Union européenne reste le plus grand dénominateur commun des intérêts égoïstes de ses membres".
08:01 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature