27/02/2016
Après la guerre
Après la guerre
Hervé Le Cor
éditions Payot / Rivages / Noir n°983
Après la guerre, la deuxième mondiale, à Bordeaux. "Les ports sont des lieux de désordre et d'intranquillité."
Il y a Jean, le père, rescapé d'un camp de concentration. Il revient avec des idées de vengeance.
Il y a Daniel, le fils qui a l'âge pour partir faire son service militaire dans une guerre coloniale qui n'est pas la sienne. "L'Algérie en train de remodeler le peuple français autour d'un ennemi commun cerné par tout un vocabulaire assassin : le frisé, le bronzé, le bicot, le crouille, le raton."
Il y a le flic pourri, sans scrupule, prêt à tout. "L'infamie des flics français. Après avoir raflé les Juifs et traqué les résistants, au service du Maréchal et de la Gestapo, ils se sentaient tout soudain l'âme républicaine et se pressaient tout soudain dans les couloirs de la préfecture en bras de chemise, brassards tricolores au biceps, pour offrir leurs services à ceux qu'ils avaient pourchassés pendant quatre ans. Et on avait envie d'y croire. Les gens, ils veulent oublier toute cette merde."
Au total, un polar noir aux nombreux cadavres, dans l'atmosphère des années 50, avec un engagement politique assez clairement marqué.
"Quelques collabos déjà recasés sur qui l'épuration passera, plus tard, comme un nuage insignifiant, à peine une ombre : vraies ordures, faux résistants, flics, préfets, chefs de cabinet qui ont organisé les rafles, contresigné les demandes d'arrestations, outrepassé et anticipé les ordres boches mais ont senti le vent tourner en 43 et se sont inventé des actes de bravoure et fabriqué des alibis, ont sauvé utilement quelques Juifs et gardé traces de cet héroïsme pour le moment venu."
"Après le bourgeois, l'alcool est le pire ennemi de l'ouvrier. Son poison familier. Un des opium qui tiennent le peuple hébété dans sa misère."
"Il suffira d'utiliser la presse, bonne fille qui se laisse faire tous les bâtards qu'on veut"
"Quand on est flic, il faut être un sentimental : envisager toutes les passions, n'en éprouver aucune."
"Il faut aimer les vivants parce que les morts s'en foutent et vous laissent tout le restant de vos jours avec vos remords et votre chagrin."
"C'était un temps déraisonnable , on avait mis les morts à table, on faisait des châteaux de sable, on prenait les loups pour des chiens, tout changeait de pôle et d'épaule, la pièce était-elle ou non drôle ? moi si j'y tenais mal mon rôle, c'était de n'y comprendre rien" (Aragon)
16:01 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature, polar
26/02/2016
les jeunes en Iran
Love story à l'iranienne
Scénario : Jane Deuxard
Dessin et couleur : Deloupy
éditions Delcourt, collection "mirages"
Jane Deuxard n'existe pas. Sous ce pseudo se cache un couple de journalistes qui préfère rester anonyme afin de ne pas mettre en danger les jeunes Iraniennes et Iraniens qui se sont confiés à eux sur un sujet sensible : l'Amour, y compris leur sexualité.
Il s'agit donc de Love stories. A travers les histoires d'amour se dessine l'Iran d'aujourd'hui, et sa dictature. Car les dictatures, en particulier religieuses, veulent régenter la vie des gens y compris leur façon de s'habiller, avec des contrôles omniprésents, et, bien entendu , leur vie intime.
Au delà de la dictature, il y a le conservatisme de la société, le poids des traditions : mariages arrangés par les parents, certificats de virginité imposés, place de la femme qui doit rester à la maison...Le poids des familles vaut celui des religieux.
Ils ne croient plus à la politique : la révolution de 79 a été confisquée par les religieux, les révoltes de 2009 n'ont pas abouti. Ils ne croient pas aux "modérés" ou aux "réformateurs". Ils subissent en attendant la prochaine explosion.
10:06 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : bd, iran
25/02/2016
Hail Cesar
Avé César
de Joël et Ethan Coen
avec George Clooney, Scarlett Johansson, Ralph Fiennes, Tilda Swinton, Josh Brolin
Hommage ou critique, pour ce film sur le cinéma ? Une série de pastiches comme autant de sketches : de péplum, de western, de ballet nautique, de film musical, de film d'espionnage anti-communiste primaire... Avec, en bonus, une visite des coulisses d'un grand studio.
Le film vaut également par sa brillante distribution !
18:21 Publié dans Film | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma
22/02/2016
Armées paysannes rouges, blanches et vertes
La guerre civile russe
1917/1922
Jean-Jacques Marie
éditions "Autrement"
La semaine dernière, j'ai parlé de deux romans se déroulant pendant la guerre civile russe. Que dit Jean-Jacques Marie, historien spécialiste de cette région et de cette époque ?
Le pays en est sorti totalement ruiné, exsangue, épuisé, affamé." "Pendant l'hiver 21/22 la famine ressuscite le cannibalisme et sème des centaines de milliers de morts." Les "lourdes pertes civiles sont du même ordre de grandeur que celles de la guerre de Sécession" (que les Américains appellent la guerre "civile"). "La guerre civile est la plus cruelle des guerres". "Il y a bien eu terreur blanche, terreur rouge et terreur verte". "Guerre civile internationale", puis qu'une douzaine de gouvernements étrangers s'en mêlent.
En 1917, les socialistes-révolutionnaires "opposent aux soviets la légitimité de l'assemblée constituante, seule détentrice du pouvoir légal." Les bolcheviks décrètent sa dissolution le lendemain de sa première et unique réunion. Les soldats ne veulent plus de la guerre. "Une immense jacquerie dévale sur la Russie." Le Congrès des Soviets décide "une paix immédiate" ainsi que la confisquation des terres des grands propriétaires et de l'Eglise qui devront être, ensuite, réparties entre les paysans.
"Les paysans ne veulent surtout pas voir revenir les propriétaires que les armées blanches traînent dans leurs fourgons et qui veulent récupérer leurs propriétés." "La débauche de leurs officiers couronne le pillage généralisé de la population, surtout paysanne, par les armées blanches. Là sont les germes de leur défaite finale."
Les paysans, las du pillage des Blancs et mécontents des réquisitions des Rouges, se soulèvent" et forment les armées "vertes". "Chaque conquête, ou presque, d'une ville par une armée verte se termine par un gigantesque pillage, en général distribué gratuitement à la population villageoise."
Pour répondre au sabotage des fonctionnaires de la banque centrale qui refusent de fournir de l'argent au gouvernement bolchévique, celui-ci crée la "commission extraordinaire de lutte contre le sabotage et la contre-révolution ("Tcheka", qui deviendra le KGB). Cette "commission" est mise sous le contrôle de Staline.
Afin de "priver d'espoir l'ennemi", les bolcheviks décident d'abattre toute la famille impériale.
"Les Rouges avaient de magnifiques orateurs qui croyaient à l'instauration du paradis sur la terre, et qui savaient entraîner les paysans par le mirage du paradis." "Les Verts ne proposaient que la révolte locale." "Derrière les Blancs, se profilaient les propriétaires terriens."
"La défaite de Wrangel en novembre 1920 semble marquer la fin de la guerre civile." "Si la victoire militaire est totale, le bilan politique n'est pas brillant." "La fin de la guerre civile rend le communisme de guerre aussi insupportable aux paysans à qui l'on confisque presque toute leur récolte qu'aux ouvriers décharnés." "La plupart des bolcheviks tombent, victimes de la contre-révolution stalinienne."
08:10 Publié dans histoire | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : histoire
19/02/2016
Brexit
Les Britanniques voudraient que l'Europe soit à leur image. Ils ne sont pas les seuls. Les Français aussi voudraient que les 27 autres pays pensent comme eux !
Mais ce que les Britanniques font systématiquement depuis leur entrée dans le "club", c'est de vouloir en changer les règles, de participer aux négociations pour influencer autant que possible les décisions, pour finalement décider de ne pas en être. Un pied dedans, un pied dehors et des exceptions dans tous les domaines. Et ils en voudraient encore plus ! Avoir un droit de regard sur l'Euro, sans qu'il soit question d'adopter la monnaie unique...Tony Blair le demandait déjà...et Lionel Jospin le refusait !
Les hommes politiques britanniques ont la fâcheuse tendance à déclarer à leurs électeurs que tout ce qui va mal est de la faute de "Bruxelles". Ils ne sont pas les seuls. Comme beaucoup d'autres, les politiciens français, et pas seulement les anti-européens, ont également tendance à faire la même chose.
La différence est qu'en Angleterre ces propos sont relayés, attisés, exagérés, par des journaux à grand tirage, au bord de l'hystérie , et en plein dans la caricature et même le mensonge.
Il en résultera très probablement un résultat négatif au référendum, quelque soit le compromis que Cameron pourra arracher de ses 27 homologues.
Cameron sait qu'une sortie de l'Union européenne sera une catastrophe pour son pays. Toutes les études sur la question le montre clairement. La City fait pression sur lui. Mais, pour tenter de contrer la montée du parti nationaliste UKIP, il a joué un jeu politicien et démagogique qui est en train de se retourner contre lui.
Il ne lui restera plus qu'à négocier un statut de membre "associé", fidèle" au principe qui prévaut depuis le début : un pied dedans, pour influencer les décisions, un pied dehors, pour en être exempté.
11:54 Publié dans EUROPE | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : brexit