25/04/2015
Erlandur et les clochards
Les nuits de Reykjavik
Arnaldur Indridason
éditions Métailié noir
Erlandur n'est pas encore commissaire. Il vient d'entrer dans la police. Il est de service de nuit. Avec tous les inconvénients pour sa relation de couple. La nuit, il est le témoin compatissant de la misère du monde, alcoolisme, accidents de la circulation qui en découlent, violences conjugales, tentatives minables de cambriolage, trafics en tous genres. Et les clochards... Il en connaissait un , en particulier, et n'arrive pas à croire au caractère accidentel de sa mort. "Erlandur se demandait si le manque de zèle de ses collègues tenait au statut social de la victime." Donc, en dehors de toute procédure, il s'obstine à poser des questions...jusqu'à connaître la vérité.
Une belle brochettes de personnages touchés par des drames humains avec Reykjavik, et l'Islande, "la pauvreté de la nation", en toile de fond.
11:47 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature, polar
23/04/2015
Du 9.3 à la place Maïdan
Cerise
De Jérôme Enrico
Avec Zoé Adjani, Jonathan Zaccaï
Cerise est une adolescente de banlieue, qui n'a d'intérêt que pour les magazines people, au point d'en devenir déscolarisée et déculturée. Ses SMS sont des monuments d'orthographe. Rebelle contre sa mère comme peuvent l'être les adolescentes. Elle est maquillée comme un camion volé et déguisée comme une fatale Lolita. Elle est donc envoyée chez son père, en Ukraine.
Je ne suis pas allé voir ce film pour la peinture de l'ado rebelle. Mes filles ont passé ce cap depuis un certain nombre d'années, et la question ne se pose pas (pas encore ?) pour ma petite fille. Même si elle a bien changé depuis la photo qui est sur ce blog, mais pour le choc culturel !
Choc culturel avec le lycée français de Kiev, élitiste comme le sont tous les lycées français à l'étranger. Choc culturel avec la vie quotidienne en Ukraine. La grand-mère et ses copines qui la prennent sous leurs ailes lui feront voir la vie d'une autre façon.
Et puis, il y a le mouvement de protestation et d'occupation de la place Maïdan, qui n'était pas prévu au scénario initial, et qui donne une dimension supplémentaire au passage à l'âge adulte de l'adolescente.
Malgré quelques gags plaisants, le film gagnerait à avoir un peu plus de rythme. Notons au passage que Tchernobyl n'est pas vraiment dans la banlieue de Kiev.
Il faut regarder Zoé Adjani pour elle même, et ne pas chercher de points de comparaisons avec sa célèbre tante. Malgré son talent Zoé ne parvient pas à nous faire croire qu'elle n'a que quatorze ans !
11:50 Publié dans Film | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma
20/04/2015
Drames en Méditerranée
Plus de mille personnes noyées en une semaine, il y a de quoi émouvoir. Tous les journaux en parlent.
Je rapproche cet évènement tragique avec deux autres informations : les violences xénophobes en Afrique du Sud, et le résultat des élections législatives en Finlande.
L'Afrique du Sud nous rappelle que l'immense majorité des migrations se font Sud/ Sud et non Sud / Nord. Fuyant le régime très autoritaire (Zimbabwe) d'un pays qui fut un des plus riches d'Afrique, ou un des plus pauvre, le Malawi, ou un pays riche dont les habitants sont pauvres, le Nigéria, les Africains migrent d'abord vers un autre pays africain. Et pas seulement les Africains. Je me souviens avoir visité les réfugiés irakiens en Syrie. Aujourd'hui les Syriens se réfugient d'abord au Liban ou en Jordanie. Les conditions de vie dans ces camps, l'absence de perspective de paix, expliquent largement leur désir de quitter la région.
Les Africains du Sud ne sont pas plus, ni moins, xénophobes que les électeurs de Finlande, pourtant bien loin de Lampedusa, qui ont, trop largement, voté pour le parti "des vrais Finlandais", ou que les électeurs italiens de la "Ligue du Nord", sans parler du Front National...
Toute l'ambiguité des reproches faits à l'Union européenne vient de cette double mission, contradictoire : surveiller , sous entendu pour empêcher les migrants d'arriver, ou secourir ?
L'Union européenne n'a aucun mandat pour sauver des vies. Elle le fait tout de même. 1/3 des vies sauvées le sont dans le cadre de l'organisation européenne "Frontex". Pas assez ? Ou son rôle est d'être le poste avancé de la "forteresse Europe" ?
Comment ne pas noter le silence assourdissant des gouvernements des Etats membres de l'Union européenne ?
Qu'est-il possible de faire ?
- D'abord essayer d'anéantir les réseaux criminels, premiers responsables de ces tragédies. Notre Président l'a répété hier. Tout le monde en sera d'accord. Mais ces criminels ne sont pas sur le sol européen, et il ne sera donc pas facile de les supprimer. Comme pour le trafic de drogue : tant qu'il y aura une forte demande, vous pouvez démanteler une filière, une autre se mettra en place !
- Essayer d'aider les pays de départ et les pays de transit. Quelle serait la situation si François Hollande n'avait pas décidé de l'intervention de l'armée française au Mali devant l'avancée des djihadistes ? Quelle est la responsabilité de Nicolas Sarkozy dans la situation actuelle en Libye, pays d'où partent la presque totalité des embarcations incriminées ?
Les ONG humanitaires demandent une politique d'immigration européenne plus généreuse, plus ouverte. Ouvrir un peu plus changerait-il la donne ? Cela ne serait jamais assez. Depuis le début de l'année 23 000 personnes sont arrivées en Italie. Combien en Grèce et en Espagne ?
J'ai entendu citer en exemple la politique d'immigration légale du Canada. Mais celle-ci est contingentée. Le Canada fait entrer des travailleurs manuels et intellectuels qualifiés, choisis, et n'a pas de pression migratoire de milliers d'immigrés désespérés arrivant sur ses côtes.
Le premier drame me semble être l'échec complet des différentes et successives politiques d'aides au développement dont aucune n'a permis le décollage économique de pays dirigés par des élites prédatrices.
16:14 Publié dans Affaires étrangères | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : migrations, lampedusa
19/04/2015
Suite de l'épopée des Normands de Sicile
Le Hors venu
Viviane Moore
10/18 "grands détectives" n°4084
1156, Palerme. Sur le trône de Sicile, Guillaume Ier, dit "le Mauvais", fils de Roger II, premier roi, normand, de Sicile. Il est Normand, mais son allégeance au Duc de Normandie, roi d'Angleterre, n'est que théorique. Les Normands n'ont pourtant conquis la Sicile, qu'il y a moins d'un siècle. Contre les Musulmans qui l'avaient prise aux Byzantins. "La Sicile avait eu bien des maîtres : Phéniciens, Corinthiens, Romains, Ostrogoths, Grecs, Arabes...et aucun d'entre eux n'avait renoncé volontairement à ses charmes."
Carrefour de civilisations, Palerme abrite des communautés musulmanes, byzantine, juive, lombarde...et normande. Celle qui détient le pouvoir.Plus pour très longtemps, mais cela est une autre histoire !
Héritage des occupations précédentes, le harem tient une grande place.
Pendant que Guillaume fait la guerre, ou part à la chasse, l'émir gère les affaires. En joueur d'échecs, et sans hésiter à réprimer durement les opposants, réels ou supposés. Les Musulmans sont des boucs émissaires parfaits. Il y a même une secte de djihadistes !
Nous retrouvons nos deux héros, partis de Barfleur la même année. Hugues de Tarse veille toujours sur Tancrède d'Anaor, supposé être le petit-fils de Roger II. Une menace pour son oncle Guillaume ? Tancrède se sent "Hors venu" (venu d'ailleurs) bien que natif de Sicile.
Ce n'est qu'à la moitié du roman que l'émir donne l'ordre à Hugues de Tarse d'enquêter sur une série de meurtres. Il trouvera le coupable, et son mobile : la vengeance qui, chacun sait, est une très mauvaise conseillère.
16:52 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature, polar, histoire
17/04/2015
L'invention des origines médiévales de l'Europe
Quand les nations refont l'histoire
Patrick J. Geary (professeur à l'université de Californie)
éditions Flammarion
Un livre salutaire à l'heure de la montée des nationalismes.
Ce spécialiste de l'histoire médiévales démontent les idéologies nées au XIXe siècle qui imprègnent les discours identitaires aujourd'hui.
A la fiction du "nous étions là les premiers", et les manipulations qui s'en suivent, l'auteur oppose une Europe médiévale sans cesse remodelée par les migrations.
"Les peuples de l'Europe sont une réalité en train de se former, un projet en cours : il faut même qu'ils gardent éternellement ce statut." "Les Francs "nés avec le baptême de Clovis" ne sont pas les Francs de Charlemagne, ni ceux du peuple français que Jean-Marie Le Pen espérait rassembler autour de son mouvement politique."
"Ceux qui n'ont pas été baptisés avec Clovis, en particulier les juifs et les musulmans, ne pourraient pas être de vrais Français ?"
"La correspondance entre les peuples du Moyen-Âge et les peuples contemporains est un mythe."
"Un certain nombre d'étiquettes ont fini par être perçues comme des désignation "ethniques". "Au Ive siècle, des bandes militaires s'approprièrent ces étiquettes." "Les noms des peuples étaient moins des moyens de décrire la réalité que des moyens d'affirmer une forme d'unité sous la conduite de chefs qui espéraient monopoliser et incarner les traditions associées à ces noms."
"Les peuples sont redevenus des unités territoriales d'organisation géographique et politique, non des groupes sociaux ou culturels."
"En 212 la citoyenneté fut étendue à presque tous les les habitants libres de l'Empire. La distinction entre citoyen et non citoyen perdit toute signification pour une différence fondée largement sur la richesse." Au début du VIIe siècle, l'opposition entre Romains et Barbares avait perdu toute signification, la citoyenneté romaine ne représentant plus rien." Au IXe siècle, les Romains sont simplement les habitants de la ville de Rome.
"Les rois victorieux projetaient le passé imaginaire de leur famille sur leur peuple en tant que collectivité, ce qui donnait à tous les membres de l'élite militaire le sentiment de partager la même origine." "Les rois barbares mirent aussi la religion au service de la création de ce sentiment d'identité". ("la conversion de Clovis facilita l'amalgame rapide entre Francs et Gallo-Romains" ; Arianisme pour les Goths). "La majorité de la population finit par adopter l'identité de la minorité au pouvoir."
"la grande force de la synthèse franque fut la création d'une société unifiée, à partir du double héritage des traditions romaines et barbares."
Ce livre est dédié à "tous ceux qui comprennent l'importance que peut avoir le passé pour le présent, et la différence qu'il y a entre les deux." "Le passé est un pays étranger dans lequel nous ne nous trouverons jamais."
21:30 Publié dans histoire | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : histoire, nationalisme, europe