13/11/2010
Un livre très politique du prix Nobel de littérature
Histoire de Mayta
Mario Vargas Llosa
Prix Nobel de littérature 2010
Folio 4022
Même sans aller au Pérou, même sans Prix Nobel de littérature, donc même sans prétextes, un livre passionnant, littéraire et politique.
C'est l'histoire de Mayta, militant dans un groupuscule trotskiste, issu d'une scission. Pabliste, ou non ?
"Il était encore dans cette adolescence où la politique consistait exclusivement en sentiments, indignation morale, rébellion, idéalisme, rêves, générosité, mystique."
"La recherche de la perfection, de la pureté. Quand on poursuit cela, en politique, on arrive à l'irréalité."
"A cette époque, cela semblait impossible qu'un garçon dévot devînt communiste".
C'était avant qu'un prête péruvien, Gustavo Gutierrez, ne théorise la "théologie de la libération".
"Il n'est pas possible que le remède contre tant d'iniquité soit la promesse de la vie éternelle."
"Quand Dieu mourut dans son cœur, il crut avec la même ardeur à la révolution".
Un jour se présente la possibilité de l'action directe. "La révolution cubaine eut raison des inhibitions. La révolution sembla se mettre à la portée de tous ceux qui avaient l'audace de se battre". Mayta cède à la tentation de la participation à un coup de force, qui échoue lamentablement, dans l'indifférence, sinon l'hostilité, des paysans et des mineurs. Dans la région de Jauja (voir Tintin et le temple du soleil !).
Mais, "les révolutionnaires ne se repentent pas. Ils font leur autocritique."
Ce roman, toujours actuel, a été écrit en 1984, et la date n'est pas sans importance. Cette année là, le terrorisme du "Sentier lumineux" ("Le marxisme-léninisme est le sentier lumineux du futur" = 70.000 morts entre 1980 et 2000) est à son paroxysme et le président Fujimori, aujourd'hui en prison, donne les pleins pouvoirs à l'armée pour lutter contre les groupes révolutionnaires. Les communautés paysannes sont prises entre deux feux, entre deux violences.
"Tout cette violence n'a apporté que de la violence. Et les choses n'ont pas changé." "A la misère et au chômage s'est ajoutée la tuerie".
C'est donc tout un pan de l'Histoire récente du Pérou qui se profile en toile de fond.
"Informer, c'est maintenant interpréter la réalité selon les désirs, les craintes ou les convenances".
"La plupart des gens sont honnêtes parce qu'ils n'ont pas d'autre alternative".
08:26 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature
10/11/2010
Tintin et les Incas
Le temple du soleil
Les aventures de Tintin
Hergé
Casterman
Relecture de l’inusable Tintin, avant de partir, ainsi qu’au retour du Pérou, même si la réalité contemporaine n’a plus grand-chose à voir, à part le « pisco » toujours aussi populaire.
Suite des « 7boules de cristal », à la recherche du professeur Tournesol, Tintin, accompagné de Milou et du capitaine Haddock se retrouve au Pérou.
Le port de Callao, n’est, ni plus ni moins que le port de Lima. Le nom du bateau évoque l’empereur inca Pachacutec (« celui qui change le monde »).
Le « train de Andes », avec des passages à 4.800 mètres d’altitude, part toujours deux fois par semaine en direction de Huancayo, région dans laquelle se trouve Jauga.
L’album a le mérite de bien montrer les trois zones géographiques du Pérou : le littoral, la cordillère des Andes, et la jungle amazonienne.
Le trésor caché des Incas (à Vilcabamba ?) fait autant fantasmer que celui des Templiers…
Le Temple du soleil du Machu Picchu a des dimensions beaucoup plus modestes que dans Tintin, et mon guide sur place, qui connait bien l’œuvre d’Hergé, récuse totalement l’idée de sacrifices humains. Il est également persuadé que les Incas, ces « fils du soleil » (et de la « terre mère ») connaissaient parfaitement le phénomène des éclipses du soleil.
08:04 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : littérature
23/10/2010
le dernier Caton
Le dernier Caton
Matilde Asensi
Folio policier n°508
Matilde Asensi s'est fait connaître avec "Iacobus", un thriller plus ésotérique qu'historique consacré à Saint Jacques de Compostelle.
Ce nouveau roman met en scène une religieuse sicilienne, travaillant aux archives secrètes du Vatican.
Intrigue : des reliques de la "vraie Croix" disparaissent partout dans le monde. Toutes les Eglises chrétiennes sont en émoi.
Sont soupçonnés les "stavrophilakes" ( de "stavros", la croix et "philake", gardien), confrérie fondée en 341, ayant à leur tête un "Caton", nom donné en l'honneur de l'ardent adversaire de Jules César (d'où le titre du roman), afin de garder la Croix découverte en 326 par Sainte Hélène, la mère de l'empereur Constantin, chrétienne bien avant son fils.
Confrérie passée à la clandestinité au moment de la prise de Jérusalem...par les pillards appelés "croisés" !
Le fait est que la vraie Croix a disparu lors de l'avant dernière croisade, au XIIIe siècle.
Pour retrouver la vraie croix, et ses gardiens clandestins, la sœur Ottavia mène l'enquête flanquée d'un garde suisse spécialiste de l'effacement des côtés obscurs de l'Eglise, et d'un professeur de paléographie, copte.
Sur les traces des gardiens de la croix, de Ravenne à Alexandrie, en passant par Constantinople, tous les trois devront réussir des épreuves initiatiques, "dantesques", rivalisant d'érudition, avec l'aide du "Purgatoire" de Dante.
Transformé en film le scénario nécessiterait de nombreux effets spéciaux.
J'ai préféré les aspects historiques, et même religieux, que l'idylle "à l'eau de rose" qui naît entre la religieuse et le professeur...
"Irénée, un des pères de l'Eglise mentionne comme premier pape Lineo et non Pierre."
"Les quatre évangiles, dont la copie la plus ancienne date du IVe siècle, ont été écrits après les Epîtres de Paul"
"Au début du christianisme, la Croix ne fit l'objet d'aucune adoration. Les premiers Chrétiens ignorèrent complètement l'instrument du martyr".
"L'usage du monogramme de Constantin ("Par ce signe tu vaincras") a été abandonné au VIe siècle."
"Sous le pontificat de Jean-Paul II, aux tendances conservatrices bien marquées, il avait été impossible de mener à bien certains travaux de recherche historique."
"Le pouvoir accumulé par les cardinaux nommés par Jean-Paul II durant plus de vingt ans rendait impossible l'élection par le conclave d'un pape progressiste."
"Est-il bon que la femme prie Dieu la tête découverte ? " (Première épître de Paul aux Corinthiens)
"Si la vérité blesse, il n'est pas utile de la connaître"
"Heureux homme celui qui supporte l'épreuve"
"Fais attention à ce que tu désires, car tu peux l'obtenir"
08:03 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature
20/10/2010
BD sud-africaine
Ma mère était une très belle femme
Karlien De Villiers
Editions "çà et là"
Karlien De Villers raconte son enfance et son adolescence. Avec sincérité mais avec pudeur. Elle reconnaît avoir été influencée par Marjane Satrapi et son "Persepolis".
Karlien raconte la séparation de ses parents, le remariage de son père, sa haine pour la nouvelle femme de son père, sa mère qui se réfugie dans la religion, le cancer du fumeur qui tue sa mère.
Ce qui donne, au moins à nos yeux, une dimension supplémentaire à ce récit, est que tout cela se passe dans les années 70 et 80, en Afrique du Sud. Karlien est la fille de Johan De Villiers et de Petronella Kruger, couple d'Afrikaners. Avec des dessins clairs, faussement naïfs, bien coloriés, Karlien montre le racisme ordinaire et "naturel" des blancs qui trouvent normal que les noirs se trouvent sur les plages pour y vendre des glaces, mais pas pour se baigner. Miss Afrique du Sud qui ne pouvait être que blanche. Les métis chassés de chez eux pour faire de la place pour les blancs. L'apartheid y compris entre Afrikaners et anglophones.
La peur du "communisme" et du terrorisme. Les "troubles". La paranoïa. L'Etat policier.
Malgré la situation politique intenable, la vie, et la mort, continuent.
Comme Marjane Satrapi, Karlien va partir en Europe, puis revenir dans son pays, qui lui aussi, comme elle, se sera transformé.
Un livre humain et touchant à plus d'un titre.
14:21 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature, bd
16/10/2010
le pic du diable
Le pic du diable
Deon Meyer
Point policier P 2015
Un voyage en Afrique du Sud = un bon prétexte pour lire un roman policier de Deon Meyer !
J’avais bien aimé « Lemmer invisible » et plus encore son dernier livre « 13 heures ».
Le « pic du diable », nom d’un pic à proximité de la ville du Cap, porte sur la question de la justice. Avons-nous le droit de nous faire justice ? Et pour exacerber le problème, l’exemple pris est celui des enfants. Je n’ai, heureusement, pas eu à subir cette atroce expérience, mais je suppose que, comme tous les pères, j’aurais eu envie de faire souffrir horriblement le bourreau d’un de mes enfants, l’envie de meurtre n’étant pas la moindre. Surtout quand on est persuadé que « la société ne remplit pas ses devoirs envers nos enfants ». Et l’on sait que les violeurs et les pédophiles souffrent d’une pathologie qui porte à la récidive. Alors les violeurs pédophiles…
La question est encore plus tragique en Afrique, où le SIDA est très répandu, ainsi que cette croyance folle prétendant que faire l’amour avec une enfant peut guérir de cette maladie.
Bien entendu le livre pose la question de l’erreur judiciaire possible, encore plus irrémédiable quand on se fait justice soi même.
Le roman montre qu’il n’y a pas de réponses simples et définitives.
A part ça, il est beaucoup question (trop) d’alcoolisme, et de la lutte du héros, l’inspecteur Grissel, pour s’en sortir.
Et puis, il y a les problèmes de l’Afrique du Sud post apartheid : les énormes différences sociales, le racisme qui n’a pas disparu d’un coup de baguette magique, la discrimination positive, qui peut être perçue comme une injustice, les Afrikans, minorité à laquelle l’auteur appartient, et qui tente de défendre sa langue.
Je lirai d’autres livres de Deon Meyer, mais je n’oublie pas les conseils de lecture de l’ami Frédéric, pour, j’espère, mon prochain voyage en Afrique du Sud…
12:31 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : littérature