06/01/2023
entre Cherbourg et le Pakistan
Les sentiers obscurs de Karachi
Olivier Truc
éditions Métailié
Olivier Truc est journaliste, au Monde. Il s'est fait connaitre comme auteur de romans policiers avec "Le dernier Lapon", et il a continué dans la même veine avec "Les enquêtes de la police des rennes".
Il nous surprend avec ce polar en nous entraînant au Pakistan.
En France on se souvient de cette histoire de "rétrocommissions" sur la vente de sous-marins. Argent ayant contribué à la campagne présidentielle de Balladur. Chirac élu président, un brin rancunier, avait bloqué les versements de ces commissions et il se raconte que ces non-paiements avait provoqué, en 2002, un attentat contre les techniciens français présents à Karachi. Autre hypothèse : les Français auraient fait des rétentions de transferts de technologie prévus au contrat.
Pour les Pakistanais, un attentat parmi d'autres, au rythme d'un par semaine, en moyenne. Généralement contre les Chiites baloutches. "Le gouvernement s'en prend à toutes les minorités religieuses.
Un journaliste français se rend sur place pour essayer d'y voir plus clair.
"Karachi n'est plus une ville. Mais un cri de détresse. Qui résonne. Des quatre côtés. On ne tire plus en l'air à Karachi. Les balles atteignent désormais les rêves des habitants..."
"La vérité restera cachée à ceux qui ne veulent pas la voir, et seulement à ceux-là. Seule la justice restera cachée."
"La littérature pouvait prendre le relais du journalisme. Là où une enquête pouvait buter sur l'incapacité d'apporter des preuves pour faire éclater la vérité, la littérature pouvait s'en affranchir et permettre de panser les plaies, de punir les coupables, d'apporter une forme de justice virtuelle, faute de justice des hommes."
08:33 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : polar
04/01/2023
Drôle et intelligent
La revanche des bibliothécaires
Tom Gauld
éditions 2024
Tom Gauld est le dessinateur attitré du supplément littéraire de l'édition dominicale du Guardian. Il se moque gentiment des amateurs de livres aux rangs desquels il se compte. Les écrivains ne sont pas oubliés.
Des "bandes dessinées" au sens propre du terme puisque la plupart de ses "planches" se présentent par une suite de quatre dessins.
"la résolution du nouvel an : cette année, je vais lire pour le plaisir"
"quelle devrait être ma résolution de nouvel an ? ne plus acheter de livres avant d'avoir lu tous eux que tu as acheté l'année dernière ! "
"la réorganisation de mes étagères : livres que je veux lire ; livres que je devrais lire ; livres que je souhaite qu'on voie en arrière plan sur zoom ; livres que même un confinement de plusieurs mois ne peut m'inciter à lire."
"Elaine eut soudain l'horrible sentiment qu'elle ne pourrait résoudre les problèmes de son roman en changeant simplement la police de caractères."
08:18 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : bd
02/01/2023
Grossesses et maternités à la Cour (XVIIe-XVIIIe)
Donner vie au royaume
Pascale Mormiche
CNRS éditions
Les questions de la fécondité se posent de manière aigüe dans les familles royales et princières françaises. La reine n'est vraiment reconnue dans sa fonction qu'après avoir enfanté. Les corps des femmes sont scrutés. Les retards de règles sont une affaire publique.
Dans ce passage de l'intime à l'officiel , l'auteure repense le rôle des reines qui tentent de faire respecter leur pudeur et mettent en place des pratiques de restriction des naissances pour ne plus être des "moules à enfants".
C'est la naissance, et les premiers mois, de deux cent enfants de la monarchie française qui ont ainsi été étudiés. Sans compter les cinq fausses couches, en moyenne, que connait chaque princesse. Ni les accouchements clandestins de certaines favorites.
Textes à l'appui, l'auteure, docteure en histoire moderne, agrégée, tord le cou à la légende du phimosis de Louis XVI, père, hors mariage, d'une enfant, Philippe Ernestine Lambriquet, née en 1778, fille reconnue et élevée comme telle. Inversion des responsabilités répandue par Marie-Antoinette qui n'aimait pas son époux, qui le lui rendait bien.
Autre légende balayée : la reine n'accouchait pas en public mais dans l'intimité entourée de ses amies les plus proches.
"la science de l'accouchement est la science du toucher"
08:13 Publié dans histoire | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : histoire
30/12/2022
En Géorgie
La baignoire de Staline
Renaud S. Lyautey
Seuil / cadre noir
Les Géorgiens se sentent très proches des Ukrainiens. Comme en Ukraine la Géorgie a deux régions séparatistes, aidées par la Russie, avec présence militaire russe : l'Abkhazie et l'Ossétie. Les politiciens tentés par un rapprochement avec l'Union européenne sont contrés par les forces pro-russes. La Géorgie a manifestement servi de terrain d'essai à Poutine, avec la bénédiction de Nicolas Sarkozy, alors président de la République française qui assurait la présidence tournante de l'UE. Un remake des accords de Munich, Sarko assurant le rôle de Chamberlain, sans les scrupules de Daladier. Hitler ne s'était pas contenté des Sudètes, Poutine ne se contenterait pas du Donbass. Il rêve de reconstruire l'Empire russe.
La Géorgie est la terre natale de Staline...et de Béria, chef du KGB ! Staline avait fait construire un ensemble balnéaire important en marge duquel Staline s'était fait construire un immense palais dans lequel se trouvait la baignoire du dictateur, volée pour être revendue par des habitants qui manquent de tout.
"En Russie, encore aujourd'hui, la question du legs historique de l'URSS est un enjeu national. Des groupes d'historiens s'affrontent quotidiennement. Et le pouvoir russe actuel, à l'évidence, se considère comme le dépositaire de ce legs. Au prix des pires travestissements. On réécrit l'histoire. On réhabilité Staline. Et on veille à ce que nul n'écorne les épisodes les plus glorieux de la guerre froide."
C'est un polar, donc il y a des meurtres et une enquête.
Renaud S. Lyautey est diplomate et fut ambassadeur en Géorgie. Il nous fait visiter le pays.
"la frontière invisible entre les empires perse et ottoman".
"A la violence des moeurs caucasiennes répondait une nonchalance orientale."
"un peuple solidement campé sur ses deux jambes depuis la nuit des temps, qu'aucun envahisseur - qu'il fût byzantin, persan, arabe, turcs ou russe - n'était jamais parvenu à déloger, ni même à assimiler."
"Quand les Russes ont entamé la conquête des nations du Caucase aux dépens des Persans, au début du XIXe siècles, ils ont , en quelques sorte, découvert le Sud."
"La criminologie, même dans les versions les plus modernes , était une science de l'échec. Certes, on finissait presque toujours par deviner ce qui s'était passé. Avec un peu de chance, on arrêtait même des suspects. Mais on ne faisait pas revenir les morts."
07:45 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : polar, géorgie
28/12/2022
Gouvernante de Marcel Proust
Monsieur Proust
Céleste Albaret
adaptation : Corinne Maier
dessins : Stéphane Manel
éditions Seghers
Céleste Albaret a été la gouvernante de Proust de 1913 à sa mort en 1922. à sa suite nous nous introduisons dans l'intimité de l'écrivain avec ses routines de vie et d'écriture, de visites et de sorties nocturnes.
Les dessins de Stéphane Manel nous aide à nous immerger.
En voyant les manuscrits, je ne comprends pas comment Céleste arrivait à les déchiffrer et à les classer !
Pas besoin d'avoir lu "la recherche", dont je n'ai lu que l'adaptation en BD, pour aimer ce livre qui nous éclaire non seulement sur Proust mort il y a cent ans, mais aussi sur la vie de la bourgeoisie de cette époque et les relations avec la domesticité.
"J'ai compris au fil des nuits que la recherche de M.Proust ça été de se mettre hors du temps pour le retrouver."
"Mon père venait d'un village de la Beauce. Il est devenu professeur de médecine à force de travail. Il voulait que je travaille mais je ne voulais pas d'un métier, je voulais écrire. La vraie vie, la vie enfin découverte et éclaircie, la seule vie pleinement vécue, c'est la littérature"
"Céleste, la vérité de la vie est dans l'observation et la mémoire ; sinon elle ne fait que passer."
(confidences de Marcel Proust à Céleste Albret)
08:28 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature