18/02/2016
Mieux comprendre l'Ukraine
La garde blanche
Mikhaïl Boulgakov
éditions Robert Laffont / collection "Bouquins"
Depuis mon voyage en Ukraine, je me promettais de lire l'auteur ukrainien le plus connu, Mikhaïl Boulgakov, et en particulier cette "Garde blanche", roman qui raconte la guerre civile à Kiev. Le roman n'a été publié en URSS dans son intégralité qu'en 1989..."De tous les livres que j'ai écrit, c'est lui que je préfère", affirmait Boulgakov en 1924.
La particularité de l'Ukraine par rapport à la Russie, lors de la guerre civile qui a suivi la prise du pouvoir par les bolchéviques en 1917, a été l'existence d'un fort courant nationaliste souhaitant l'indépendance. Les nationalistes de gauche formèrent en 17 le premier gouvernement ukrainien, renversé en janvier 18 par les bolcheviks, eux-mêmes chassés par un gouvernement fantoche mis en place par les Allemands, et qui repartira dans les fourgons de l'occupant en novembre 18.
L'histoire est vue à travers les membres d'une famille de la classe moyenne de Kiev. "Est-il possible de vivre ?" dans cette période. Difficilement, manifestement !
"L'un croit, l'autre ne croit pas, mais vous vous conduisez tous exactement de la même façon."
"Quelqu'un paiera-t-il pour le sang versé ? Non. Personne."
"Les moujiks avaient leur petite idée, ce qu'ils voulaient, c'était de toute éternité la vraie réforme paysanne dont ils rêvaient : la terre aux paysans ;et plus jamais de gros propriétaires fonciers, et plus jamais les canailles de la ville qui viennent prendre le blé. Il y avait des dizaines de milliers d'hommes qui revenaient de la guerre et qui savaient se servir d'une arme à feu. Une Ukraine féérique, idéale, sans seigneur polonais, sans officiers russes"
08:20 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature, ukraine
16/02/2016
Hiver 1920, en Russie
Hiver rouge
Dan Smith
éditions du Cherche Midi
Hiver 1920 : la guerre civile touche à sa fin et le "communisme de guerre" atteint les limites de ce que peuvent endurer les paysans. "La révolte paysanne, causée par les dures lois de réquisition du grain, se donnait le nom d'Armée bleue." Elle prend la suite de l'armée "verte" formée par les paysans "pour protéger leurs terres et leur bétail". L'armée "blanche", battue, s'est repliée en Crimée. L'armé "noire" des anarchistes ukrainiens est en difficulté. "Ce n'est plus la guerre, c'est le chaos."
Un déserteur de l'armée rouge rentre au village : femme et enfants ne sont plus là. Il part à leur recherche dans les immensités glacées. Il est à la recherche de lui même, et de ses idéaux, autant que de sa famille.
Sa quête est émaillée de rebondissements, et de descriptions des "atrocités dont l'homme est capable envers ses semblables." "A quoi bon mener une campagne de terreur si ce n'était pour terroriser ?" Avec des bourreaux "ivres de pouvoir et de cruauté."
Malheureusement, l'auteur a tendance à mettre les atrocités essentiellement sur le compte des bolcheviks, et en particulier le NKVD, qui deviendra le KGB, alors que les historiens considèrent que les atrocités ont été affreusement bien partagées, les officiers de l'armée "blanche", et ses cosaques, se montrant particulièrement cruels.
08:57 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature
15/02/2016
Icare
En vrille
Deon Meyer
éditions du Seuil
J'adore Deon Meyer, journaliste et écrivain sud-africain qui nous promène dans la région du Cap. Dans ce roman nous voilà sur la "route des vins", dans la "crique des Français" ("Franschhoek). Quand Louis XIV a pris la funeste décision de révoquer l'Edit de Nantes, de nombreux Huguenots ont quitté notre pays. Souvent vers les Pays-Bas. Et de là certains sont partis pour l'Afrique du Sud, avec les Boers. Emmenant avec eux quelques ceps de vigne.
Deux histoires se développent en parallèle , et comme toutes les parallèles , avec la perspective, elles finissent pas se rejoindre.
Les Du Toit sont vignerons de père en fils (ainé). Les derniers de la lignée, voulant sortir du système des quotas hérité de l'apartheid, veulent faire de la qualité, en s'inspirant de la Californie...et de la France. "Les gens sont aussi complexes qu'un assemblage de cépages". Des cépages nobles (chardonnay, pinot noir) sont importés clandestinement. Mais "le chardonnay et le pinot noir n'aiment pas la chaleur."
Pendant que François raconte l'histoire de sa famille, une enquête criminelle se poursuit. Les Du Toit peuvent-ils être suspects dans l'assassinat du créateur d'un site internet fournissant des alibis aux conjoints adultères ? "L'accusé est innocent tant que l'Etat n'a pas prouvé le contraire ."
"Dans les films, à la télé, la vie d'un flic n'est qu'action et satisfaction, mais dans la vie réelle, les choses sont bien différentes. Dix pour cent d'action, quatre-vingt dix pour cent de corvées fastidieuses, de routine, de travail administratif."
08:57 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature, polar
08/02/2016
Polar islandais sur un glacier glaçant
Opération Napoléon
Arnaldur Indridason
éditions Métailié noir
1945 : un avion s'écrase sur un glacier islandais. Allemand ? Américain ?
1999 : les forces spéciales américaines arrivent en force pour récupérer l'avion dont le nez pointe à travers la glace. La zone est bouclée. Les Islandais n'ont pas le droit d'y aller voir.
L'auteur est islandais et se livre à une charge assez violente contre la présence arrogante des Américains en Islande, où ils ont succédé aux Britanniques en 41. Le fait que la base américaine représente une rentrée financière importante pour ce petit pays est une circonstance aggravante.
Un jeune sauveteur islandais en exercice sur le glacier se trouve au mauvais endroit au mauvais moment. Les forces spéciales américaines sont prêtes à tuer pour garder le secret que représente cet avion. Sa sœur se lance à sa recherche et ne tarde pas à devenir, elle aussi une cible. Les morts se multiplieront sur son chemin qui l'amènera jusqu'en Patagonie.
Les aventures se passent à grande vitesse. Le roman a tout pour devenir un film.
Sur le plan historique, s'il est vrai que certains membres de l'état major allemand souhaitaient une paix séparée avec les Alliés contre les Russes, il ne semble pas que cela ait été le choix d'Hitler...ni des Américains, même par anticommunisme.
La liberté du romancier n'est-elle pas de réécrire l'histoire ?
"L'histoire n'est qu'un tissu de mensonges. Il y a eu tant de dissimulations, tant de choses inventées de toutes pièces. Nous avons dit la vérité sur des mensonges et menti sur la vérité. Nous réécrivons l'histoire en fonction de nos intérêts."
16:56 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature, polar
28/01/2016
Limassol
Le poète de Gaza
Yishaï Saris
Grand prix de littérature policière
éditions "Actes Sud" et Babel noir poche n°75
Un agent des "services" israéliens, spécialisé dans la mise en échec des attentats suicide, se voit confier la mission d'attirer un vieux poète de Gaza à Limassol (d'où le titre de la version originale) afin de supprimer son fils, chef d'un réseau de terroriste.
Yishaï Sarid est le fils de Yossi Sarid, récemment décédé. Il était leader du Meretz, parti politique de centre gauche, animateur du mouvement "La paix maintenant". La preuve que tous les Israéliens ne soutiennent pas la politique expansionniste et belliqueuse de l'actuel gouvernement du Likoud et ses alliés religieux. A chaque élection je regrette que ce parti n'obtienne pas plus de suffrages. A l'époque où j'étais Secrétaire général du Parti Socialiste Européen, j'avais été invité à prendre la parole à son congrès. Afin de préparer mon intervention, j'avais lu attentivement les statuts du parti et sa déclaration de principes. Que du bonheur ! Un vrai parti laïc voulant la paix. "Un jour toutes ces barrières tomberont et nous vivrons tous ensemble", tout en dénonçant "l'accroissement exponentiel du nombre de Juifs qui s'installent dans les vieilles bâtisses arabes de Jérusalem". Après le congrès les assistants de Yossi Sarid m'avait organisé un voyage à Gaza. A l'époque, le Hamas ne gouvernait pas Gaza, mais déposait des bombes dans les cinémas pour les obliger à fermer.
Tout cela pour dire que Yishaï, dans la ligne de son père soulève la question du fonctionnement de l'Etat israélien et de ses services de sécurité, la question de la coexistence entre Israéliens et Palestiniens, le problème de la lutte contre le terrorisme, y compris en utilisant la torture.
"ça n'arrête pas de construire chez vous. Le même pays, la même terre, le même sable. Vous avez tout et nous rien." "La haine a pris possession de tous nos enfants."
"Le plus important dans l'écriture, c'est de ne pas désespérer. Comme en amour."
"Le seul remède que le genre humain a trouvé pour soulager ses angoisses. La foi."
"La capacité d'émerveillement nous accompagne apparemment jusqu'à la tombe"
"En bon talmudiste, il aimait questionner l'évidence".
15:38 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature, polar