Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

21/08/2010

la sagesse des fous

La sagesse des fous

 

Einar Karason

 

Points P 2232, collection « Les grands romans »

 

 

Les négociations d’adhésion de l’Islande à l’Union européenne ont commencé : un bon prétexte pour se faire une idée un peu plus précise du pays, à travers sa littérature, au delà de l'irremplaçable commissaire Erlandur, créé par Arnaldur Indridason.

 

Le narrateur raconte l’histoire de sa famille,  une saga qui commence avec le siècle, et donc avec son grand-père, chercheur d’or reconverti, par la force des choses,  en spécialiste ès pièces détachées.

Avec son épouse Solveig, ils eurent sept enfants. Bonne occasion pour une galerie de portraits : deux jumeaux, l’un interné en psychiatrie, l’autre médecin psychiatre, un champion d’athlétisme devenu directeur de banque, deux filles, l’une mariée à un marin pêcheur, l’autre à un pasteur, un « prince de la récup », bien meilleur que son père dans ce domaine, et le père du narrateur, génial touche à tout, plus souvent ruiné que riche.

 

Puis vient la seconde génération, celle des cousin(s), qui prouve qu’il n’y a pas de déterminisme génétique, tant ils divergent dans l’évolution de leurs vies, jusqu’à vivre dans des « mondes » différents, par un « entrecroisement des fils du destin ».

« Bien démuni celui qui n’a pas de frère ! ».

Les fêtes de famille sont des occasions de se retrouver, malgré les tiraillements, généralement dus à des histoires d’argent.

 

La vie politique est à peine évoquée : accord d’indépendance d’avec le Danemark, relations avec les voisins nordiques, la guerre, l’occupation allemande, la présence américaine, ainsi que les « progrès » : le nylon, le tergal, la radio, puis la radio pirate…

Je me souviens, moi aussi, des ces vieux postes radios dont les longueurs d’ondes affichaient des noms de villes lointaines et souvent inconnues qui invitaient à l’évasion dans le vaste monde. Contrairement au narrateur, j’ignorais totalement où pouvait se trouver « Hilversum », et je ne pouvais pas, alors, chercher sur Internet.

 

« Ne te prends jamais en pitié ».

« C’est la vie qui fait l’homme ».

« Vies de souffrances et de chagrins ».

« Néanmoins, la vie vaut la peine d’être vécue ! »

 

La « sagesse de fous » (titre de l’ouvrage) est « celle qui est exprimée par le plus grand nombre ».

 

08:35 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature

19/08/2010

Main basse sur le riz

Main basse sur le riz

 

Jean-Pierre Boris

 

Editions Fayard et Arte

 

 

Jean-Pierre Boris a longtemps tenu la chronique « matières premières » de RFI. Chronique aujourd’hui disparue, malheureusement car elle donnait une assez bonne idée des problèmes économiques du monde réel.

 

Au printemps 2008 le manque de riz amène au bord de l’explosion Port-au-Prince, Dakar, Le Caire et Manille. En quelques semaines, le prix moyen du riz s’était trouvé multiplié par cinq !

 

Ce livre démontre deux choses :

a)    il n’y avait pas manque de riz, celui-ci n’était pas au bon endroit au bon moment ;

b)    cette crise pourrait être la répétition générale d’une crise beaucoup plus grave et durable ayant des causes structurelles.

 

Il n’y avait pas réellement de pénurie :

-        le gouvernement de Thaïlande, principal exportateur mondial de riz, qui fournit 1/3 des échanges mondiaux, avait décidé de retarder les exportations en raison du retard des récoltes ;

-        le gouvernement vietnamien avait décidé de garder un million de tonnes pour les habitants du nord du pays ;

-        le gouvernement indien, à la veille d’élections difficiles (finalement gagnées) avait décidé que par un grain de riz ne partirait à l’exportation, afin de prévenir toute pénurie au mauvais moment ;

-         le gouvernement philippin, premier importateur mondial de riz,  avait décidé d’acheter deux fois plus de riz que de besoins. Une seule explication : la corruption, les commissions touchées par les acheteurs ;

-        Le choc pétrolier a rendu plus cher le transport ;

-        La spéculation, petite ou grande, a fait le reste. « Quand l’offre se fait plus rare, les pays africains sont les derniers servis ».

 

Des crises, plus graves encore, pourraient survenir dans les années à venir :

-        En raison de l’augmentation de la population mondiale, la consommation mondiale de riz progresse plus rapidement que la production ;

-        La mise au point de nouvelles variétés, adaptées au changement climatique, avec un meilleur rendement met 15 ans, et la recherche agronomique dans ce domaine a été  délaissée pendant 20 ans ;

-        Les agricultures locales ont été trop longtemps délaissées. Là où elles reprennent, puisque la Banque mondiale s’est rendue compte de ses erreurs,  elles manquent de moyens, tout le long de la chaîne de production et de commercialisation. Il reste, généralement, dans beaucoup de pays, moins cher d’importer du riz que de le produire ;

-        Les pays asiatiques, logiquement, réservent prioritairement leurs productions pour les populations locales, et l’Inde peut être importatrice plutôt qu’exportatrice ;

-        Le « libéralisme » a brisé toute velléité d’intervention étatique. « On disait « moins d’Etat, mieux d’Etat », mais ces Etats africains étaient si faibles que « moins d’Etat » signifiait plus d’Etat du tout » ;

-        La faim, ou la sous-alimentation frappent un milliard d’êtres humains. Le terrain est propice à la peur de manquer.

08:06 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0)

18/08/2010

BD et cinéma

Pilote

 

Le journal qui fait son cinéma

 

La BD, nouvelle star du 7ème art

 

 

Après un numéro évoquant les 40 ans de mai 68, puis un autre consacré à 69,  année érotique, Pilote consacre son numéro annuel, au cinéma, avec en couverture une caricature de Marilyn par Jul.

 

120 auteurs, réalisateurs et dessinateurs racontent les liens, leurs connexions, entre la bande dessinée et le cinéma.

 

J’ai particulièrement aimé :

-        Le dessin de Vuillemin sur la « magie » du cinéma ;

-        Les « adaptations improbables » de BD au cinéma par Pétillon ;

-        Le « langage cinématographique », en particulier les cadrages, expliqués, en dessins, par Gotlib ;

-        Astérix et Obélix, en chair et en os, à « Vivement Dimanche », avec Drucker ;

-        « La bande dessinée, c’est comme le cinéma », d’Emile Bravo ;

-        Mézières et Christin qui racontent le « making of » d’un film ;

 

A lire en attendant la sortie cet automne de l’adaptation du « Chat du rabbin » de Joann Sfar.

08:26 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : bd, cinéma

14/08/2010

Le piège de Bangkok

Le piège de Bangkok

 

SAS 180

 

Gérard De Villiers

 

Si les marchands d’armes prospèrent, c’est que certains ont besoin d’eux.

Les premiers chapitres contiennent une liste, non exhaustive, de rébellions armées, souvent soutenues par de grandes puissances comme les USA et la Russie.

 

Comme au « bon » vieux temps de la guerre froide, ce roman raconte les manœuvres concurrentes d’agents américains et russes,  pour éviter qu’un marchand d’armes important ne tombe entre les mains de l’autre camp.

La raison d’Etats finira par l’emporter : les USA ont besoin de la complicité, au moins passive, de la Russie dans le conflit afghan.

 

L’auteur connaît manifestement bien Bangkok, et le livre pourrait, accessoirement, servir de guide des meilleurs hôtels, restaurants et centre commerciaux. Je suis tout de même sceptique sur la possibilité d’acheter des chemises hawaïennes chez le très chic Jim Thomson, spécialiste des soieries haut de gamme !

 

Une déception : j’espérais que De Villiers, souvent bien informé, y parlerait de la vie politique interne thaïlandaise, autrement que par le biais de la corruption.

 

Il y a bientôt dix ans que je ne suis pas retourné dans cette ville. J’ai été surpris de lire que le Novotel était devenu le lieu de rencontre des prostituées russes. Et, si j’y retourne un jour, j’ai bien l’intention, non pas d’aller au Novotel, mais,  comme le super héros, d’aller admirer la ville du haut du bar du 64ème étage de la « State Tower ».

08:08 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : littérature

12/08/2010

à propos de l'Iran

Le Shah

 

Ryszard Kapuscinski

 

Flammarion

 

 

Comme la plupart des gens, j’ai découvert Kapuscinski en lisant « Ebène », superbe livre sur l’Afrique.

Son livre sur le Shah d’Iran, écrit  alors qu’il était journaliste dans ce pays, à la fin des années 70, jusqu’en 1980, au moment de la chute du Shah et de l’arrivée au pouvoir de l’ayatollah Khomeiny, livre publié à Varsovie en 1982 et en France en 1986, était épuisé depuis longtemps.

Très bonne idée de le rééditer.

La description des mécanismes de la dictature, les grandes tendances historiques du pays nous aident à comprendre la situation actuelle.

 

Trois ans après sa mort,  certains lui reprochent d’avoir été plus un romancier qu’un journaliste. C’est faire beaucoup d’honneur aux journalistes que de faire semblant de croire qu’ils recoupent toujours leurs informations, qu’ils ne se contentent pas de quelques témoignages partiels et partiaux. C’est faire beaucoup d’honneur aux romanciers que de faire semblant de croire qu’ils sont toujours passionnants à lire.

Ce livre mêle, pour le plus grand intérêt du lecteur, rappels historiques, témoignages, reportages, réflexions et analyses.

La description de la dictature est aussi impitoyable de celle-ci.

 

Le Shah n’est pas le descendant d’une longue dynastie. Son père, officier ne sachant ni lire ni écrire, a réussi un coup d’Etat avec l’aide de l’Angleterre, et a été obligé, encore par les Anglais,  de laisser la couronne à son fils pour avoir été trop proche des nazis allemands, non sans avoir accumuler une immense fortune en pillant le pays.

Ce sont les Anglais, et les Américains, qui,  pour conserver l’exploitation du pétrole iranien, ont renversé le premier ministre Mossadegh, symbole de la démocratie et de la souveraineté. « Mossadegh peut être destitué de ses fonctions, mais personne ne peut le destituer de l’Histoire ».

 

Le Shah en a tiré la leçon, comme celle de la destitution de son père : il était là pour « tenir » le pays et donc le pétrole.

Il « tient » le pays au prix d’une répression féroce : arrestations arbitraires,  100.000 prisonniers politiques, opposants liquidés sans procès.

 

« Sur le plan social, le pétrole cause peu de soucis, car il n’engendre pas vraiment de prolétariat. Le  gouvernement n’est donc pas obligé d’en partager les revenus, dont il peut disposer à sa guise ». « Le seul et unique trésorier de cette gigantesque manne d’argent sera le Shah en personne. » « La pétro-bourgeoisie est une classe qui ne produit rien. Son unique occupation consiste à consommer sans retenue ».

La même réflexion pourrait être faite pour les émirats pétroliers arabes ou africains.

« Son train de vie, sa manière de gouverner finissent par devenir une provocation. Cela se produit lorsqu’un sentiment d’impunité s’installe parmi l’élite. Tout lui est permis. »

 

Le Shah commande, avec l’argent du pétrole,  des milliers d’équipements civils et militaires, surtout militaires, dont les Iraniens n’ont aucun usage, car le pays manque de techniciens et d’ingénieurs pour les utiliser. Les étudiants préfèrent rester dans les pays où ils ont fait leurs études.

« Personne n’est capable de faire voler les hélicoptères ou conduire les tanks. Cette armée n’est rien d’autre qu’un instrument de terreur intérieure ». Le budget de l’armée est quintuplé, mais il faut 40 000 spécialistes américains pour utiliser les, inutiles,  équipements modernes.

 

Complexé, le Shah portait des chaussures à talonnettes. Et comme tous les hyper complexés, il veut accaparer le pouvoir...et être aimé : « le Shah appartient à cette catégorie de gens qui ont un besoin vital d’être loués, adorés, applaudis. Pour eux, c’est un moyen de surmonter leur faiblesse et leur fragilité ».

 

« Le fait de ne pas connaître son propre pays a contribué à sa perte. Le Shah passait sa vie enfermé dans son palais. Le Shah ne savait pas attendre. Or, en politique, il faut savoir attendre ».

 

Pourquoi les mollahs règnent aujourd’hui ?

« Toute dictature s’accompagne d’une renaissance progressive de traditions, croyances et symboles anciens. » « Le mollah est la voie de leur enfance ».

 « De tous ceux qui ont créé la résistance iranienne, qui ont été ses chefs, qui ont dirigé les fedayin, les moudjahidin et autres groupes de résistance, nul n’a survécu. »

« La révolution a conduit au pouvoir des hommes complètement nouveaux, inconnus du public. Ces nouveaux venus sont plus porteurs d’ambition que de compétences».

« La démocratie devait être soutenue par la majorité, or la majorité voulait ce que Khomeiny voulait, une république islamique. »

 

« Il n’est pas d’absurdité que l’esprit humain ne puisse inventer »

« Nous nous trouvons dans un monde où le droit consiste non pas à protéger l’être humain mais à détruire l’adversaire ».

08:53 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature