11/05/2014
La "reine des bandits" béninoise
Le cantique des cannibales
Florent Couao-Zotti
Éditions « Le serpent à plumes »
Ce livre est dédié à « toutes les Africaines de l’ombre, féministes au ras du sol qui, tous les jours, tentent péniblement d’arracher au soleil quelques particules de rêve… »
Il met en vedette une « amazone », bandit au grand cœur qui redistribue au petit peuple dont elle est issue. Le personnage est inspiré de Phoolan Devi, la fameuse « reine des bandits » indienne.
S’y mêle une histoire d’amour avec un jeune et fougueux inspecteur de police au cœur pur.
Quelques maux de l’Afrique y sont évoqués, comme le trafic d’enfants et la condition des femmes. « Que faire d’une liberté quand on est pauvre et misérable ? », « la débrouillardise étant ce qu’on peut faire de mieux pour ne pas mourir. »
Quelques maux plus politiques également : la justice aux ordres, la police brutale et vénale, l’état des prisons, et surtout, à travers la campagne électorale du président sortant, l’état de la démocratie dans de trop nombreux pays africains.
Le tout dans une langue poétique et imagée propre à la plupart des écrivains africains francophones qui démontrent que l’Afrique est l’élément moteur de l’avenir de la francophonie.
11:52 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature, afrique
09/05/2014
Un été en Provence
De Rose Bosch
Avec Jean Reno, Anna Galiena
Pour cause de séparation soudaine de leurs parents, deux adolescents, et un petit, descendent pour la première fois en Provence, en vacances chez leur grand-père qu'ils ne connaissent pas, en raison de la brouille entre le patriarche et sa fille, la mère des petits-enfants.
Chez lui, "c'est la télé qui nous regarde" !
Choc des générations, des cultures, de la ville versus la campagne, dans ce mas isolé. Heureusement, Mamie est là pour mettre de l'huile dans les rouages. A propos d'huile, celle, d'olive, bien entendu, contribue également au glissement vers la concorde générale, ainsi que l'abrivado, son taureau noir et ses chevaux blancs, et la fête au village, avec ses razeteurs au charme irrésistible, pour une adolescente parisienne.
Marseille, à quarante kilomètres, est un autre monde, et "là-bas, c'est le Vaucluse, ce n'est rien..." Seule la Camargue trouve grâce comparée aux Alpilles. Même si je n'ai pas trouvé crédible ses plages désertes alors que l'action est censée se dérouler pendant les vacances scolaires d'été...
Contrairement à ce que pensaient ses petits-enfants, le grand-père bourru n'est pas psychorigide, mais, au contraire, un être sensible. Les grands-pères d'aujourd'hui étaient jeunes en 68 et dans les années 70, et leur passé a pu être turbulent et/ou contestataire.
A noter l'apparition, sympathique, pour quelques scènes, d'Hugues Aufray, en vieux motard chanteur de Bob Dylan.
08:37 Publié dans Film | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : cinéma
08/05/2014
Jospin tire les leçons du bonapartisme
Lionel Jospin
Éditions du Seuil
Je n'ai jamais aimé Napoléon : pas républicain, pas démocrate non plus, méprisant pour la vie de ses hommes, despote mais habile propagandiste. "Prébendier à l'intérieur, prédateur à l'extérieur". Pour lui, "le peuple est une force qu'il faut séduire par la propagande ou dompter".
Sa gloire continue aujourd'hui encore et, pire, certaines forces politiques continuent à souhaiter un homme (ou une femme) providentiel et un régime "fort", hyper centralisé, dans lequel il n'est demandé au peuple que d'approuver les décisions du "Guide".
Lionel Jospin, en se basant sur son expérience de l'exercice du pouvoir, trace à grands traits les quinze années de Napoléon Bonaparte, puis les aléas du "bonapartisme", en débouchant sur le "populisme" d'aujourd'hui, "ce bonapartisme sans Bonaparte". Ces aspects du passé éclairent le présent. "La fortune du bonapartisme se nourrit toujours de la faiblesse de la République".
Lionel Jospin décrit Napoléon Bonaparte : "un soldat passionné, impérieux, impatient et qui ne supporte pas l'opposition ; qui a "la volonté d'avoir le pays tout entier sous contrôle au moment de faire la guerre".
"Napoléon, en quinze ans, ne contribue pas décisivement au développement économique de la France, parce que sa première préoccupation n'est pas l'économie mais la guerre."
Dix-huit ans après l'abolition "pour toujours" de la noblesse héréditaire, l'ancienne et la nouvelle noblesse sont à nouveau dites "héréditaires". En 1814, la République ne renaît pas parce que l'idée en a été ruinée en France par l'Empire et son rêve dynastique."
"Pour ceux qui cherchent à estimer si une telle épopée a servi les intérêts de la France, la réponse est clairement non."
"Pour la France, c'est au minimum 600 000 hommes qui ne reviendront pas de la guerre."
"La France avait de remarquables atouts pour être la première puissance du XIXe siècle. Avec l'Empire, elle les gâche".
À propos du "second Empire", Lionel Jospin donne la "trame du bonapartisme : nature dictatoriale du pouvoir, répression des opposants, utilisation de la police à des fins politiques, manipulation de l'opinion par la propagande, centralisation de l'État, recherche de la gloire extérieure."
16:29 Publié dans histoire | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : jospin, bonapartisme
07/05/2014
Prix de la BD historique
Scénario : Wilfrid Lupano, Dessin et couleur : Jérémie Moreau
Éditions Delcourt
Une demi-douzaine de prix en France et à l'étranger, dont le "prix de la bande dessinée historique".
1814 : un navire français fait naufrage. Les villageois d'Hartlepool retrouvent un survivant. Il porte un uniforme français. C'est donc un ennemi qu'il faut prendre. Une cour martiale est improvisée pour prononcer un jugement.
L'accusé est-il Français ? Il ne répond rien... puisque c'est un singe, la mascotte de l'équipage. Mais les villageois n'ont jamais vu de Français, ni de singe !
Il est forcément coupable puisqu'il vient d'ailleurs, qu'il est impossible de comprendre les sons qu'il émet. Il sera donc pendu !
Un peu dramatique, mais avec assez d'humour pour faire passer le message :
Le racisme est basé sur l'ignorance !
Avec une mise en garde "contre le penchant naturel à la cruauté qui sommeille en chacun de nous", même si j'ai l'impression que, chez moi, il dort assez profondément...
11:13 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : bd
06/05/2014
Le génocide en Biélorussie et en Ukraine
Martin Dean
Éditions Calmann-Lévy
Ce que démontre ce livre de l'historien américain Martin Dean, c'est que le génocide des Juifs en Ukraine et en Biélorussie n'aurait jamais pu revêtir cette ampleur (deux millions d'assassinats) sans la participation active des policiers locaux qui épaulaient les forces allemandes d'occupation.
Difficile de ne pas penser aux rôles de certains fonctionnaires français, de certains policiers et gendarmes dans notre pays...
"Lorsque la plupart des crimes sont commis par la police, c'est le signe même du règne de la terreur".
Beaucoup d'habitants d'Ukraine, de Biélorussie, mais aussi de Pologne, n'étaient pas mécontents de voir arriver les Allemands, car ils espéraient ainsi être débarrassés du joug soviétique. Certains allèrent même jusqu'à collaborer activement. "Comme toutes les forces d'occupation ou presque, en recourant à l'argent et aux faveurs, les Allemands purent trouver des collaborateurs."
"Les nazis ne prêtèrent pas attention aux aspirations des peuples conquis de l'Union soviétique".
"L'impact des réquisitions allemandes contribua au retournement d'une grande partie de la population contre les nouvelles forces d'occupation." "L'exploitation économique, associée à la répression politique détermina le retournement contre les occupants allemands."
"Les Polonais étaient la cible principale de la répression soviétique".
Les Juifs polonais étaient pris entre la dictature soviétique et la dictature antisémite allemande.
"Les deux systèmes totalitaires cherchaient à écraser l'éventuelle résistance des vestiges de l'Etat polonais".
"Ce fut la rude politique soviétique de déportations qui contribua à éviter aux Juifs polonais le sort de leurs frères dans la Shoah."
"Dans les premiers jours de l'occupation allemande, l'incitation aux pogroms fut une politique délibérée."
A l'automne 1941, les massacres furent généralisés. Les plus terribles furent ceux de Kiev (Babi Yar, 30.000 morts, y compris femmes et enfants) et la liquidation du ghetto de Riga (25 000 morts).
Les policiers locaux jouèrent "un rôle considérable dans le fonctionnement du régime d'occupation allemand". "Ils recherchaient le pouvoir et des gains faciles".
"Les Allemands comptaient sur les policiers locaux parce qu'ils ne connaissaient ni le pays, ni la langue".
"La majorité des Juifs furent massacrés pendant la "seconde vague", en 1942, lors de la liquidation des ghettos." "Les forces les plus nombreuses étaient celles de la police locale". "On ne connait aucun exemple de policier fusillé pour avoir refusé d'abattre des Juifs". "Plusieurs milliers de rescapés des ghettos liquidés furent massacrés par des partisans nationalistes ukrainiens."
"La campagne contre les Juifs ne s'acheva pas avec la liquidation des ghettos. Les Juifs furent traqués dans les forêts par la police locale, notamment les gardes forestiers." "Les exemples de dénonciation abondent". "Les volontaires ne manquèrent pas pour "la chasse aux Juifs", et la constitution des pelotons d'exécution".
"Mais, sans l'aide de non-Juifs, les Juifs n'auraient pas pu organiser leur propre résistance."
Lors de l'avancée des troupes russes, "la plupart des anciens policiers désertèrent ou se rendirent sans combattre". "Presque tous les sous-officiers réussirent à s'échapper". "La justice soviétique s'en prenait en général aux moins coupables, à ceux qui n'avaient pas jugé nécessaire de fuir à l'Ouest."
"La participation locale n'atténue en rien la responsabilité nazie."
15:59 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : shoah, ukraine