10/10/2009
Tokyo
Tokyo
Mo Hayder
Pocket n°12844
Sur les couvertures de ses livres son nom est écrit quatre fois plus gros que le titre de l'ouvrage : un signe qui ne trompe pas sur la notoriété de l'auteur(e).
Je me suis donc senti obligé de découvrir l'œuvre de cette anglaise blonde aux yeux bleus.
Ma spécialiste des "thrillers" m'a conseillé Tokyo, lauréat du prix SNCF du polar européen, prix des lectrices d'ELLE, et qui figure dans la sélection "100 polars" de la FNAC.
Ce livre est écrit à la première personne, mais il y a deux "premières personnes", dont les histoires se rejoignent : d'une part une jeune femme, anglaise, qui arrive à Tokyo pour faire des recherches historiques qui l'obsèdent, et travaille, pour survivre, comme "hôtesse" dans un club, et d'autre part un lettré chinois qui raconte l'angoisse devant l'arrivée des envahisseurs japonais, à Nankin, en décembre 1937 (300.000 morts, niés par de nombreux historiens japonais.
Le lecteur est conduit, doucement mais surement, vers le double suspens, intense, des cent dernières pages, avec une phrase finale qui n'est pas franchement optimiste : "en ce monde aucun de nous n'en a pour très longtemps".
Remarque : je n'ai pas trouvé dans ce livre, qui ne manque pas de tendresse(s), la moindre trace d'humour, même macabre.
Questions :
Comment peut-on imaginer des choses pareilles ?
Comment de telles horreurs peuvent-elles être inspirées par des faits réels ?
Jusqu'au l'être humain est-il prêt à aller dans son pacte faustien à la recherche de l'immortalité ?
"Il n'y a rien d'autre que la superstition pour éclairer les errements de notre monde"
"La patience transforme la feuille de mûrier en soie"
"Le Japon et la Chine avaient en commun d'avoir traversé des années où les seules protéines accessibles au peuple étaient celles des cocons de vers à soie"
"On mange d'abord avec les yeux" (proverbe japonais)
08:30 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature
09/10/2009
le dernier Woody Allen
Whatever works
(Du moment que ça marche...)
De Woody Allen
Avec Larry David et Evan Rachel Wood
Woody Allen ne joue pas dans ce film, dernier en date du maestro, mais Larry David est son double parfait dans le rôle de ce misanthrope grincheux ("comment faire confiance à l'espèce humaine pour qui il a été nécessaire d'inventer les chasses d'eau automatiques..."), confronté à une petite jeune débarquant du sud profond.
Woody Allen très présent dans les thèmes et les façons de les traiter : il ne manque que le psy !
Il y a le sexe, mais sans scène de sexe, la mort, mais sans mort, il y a donc la vie, avec tous ces hasards, impossibles à maîtriser, ni même à rationnaliser. Il y a New-York, dont on ne parle pas mais que l'on voit.
Les répliques sont cinglantes, les dialogues d'autant plus savoureux que l'auteur se défoule sur les néoconservateurs, dans une Amérique "où un noir peut se faire élire Président, mais n'a aucune chance de se faire prendre en taxi".
Un film "Woody Allen pur jus", qui donne le sourire et met de bonne humeur.
08:54 Publié dans Film | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma
08/10/2009
Hédonisme
Les libertins baroques
Contre histoire de la philosophie 3
Michel Onfray
Editions Grasset
J'ai découvert Michel Onfray par son excellent "Contre manuel" de philosophie, et je me retrouve assez dans son hédonisme. J'avais trouvé son "Traité d'athéologie" ravageur, plein de pertinences et d'impertinences.
Les "libertins baroques" ne sont pas athées. Ils ne s'en prennent pas à Dieu, mais n'épargnent pas ceux qui en ont fait leur fonds de commerce."On épargne Dieu en tant que tel", mais "la Terre devient le seul horizon". " Les libertins baroques créent la laïcité, le principe de séparation des deux domaines bien distincts : la Foi et la Raison."
"Le libertin veut bien croire en Dieu, mais n'a pas envie que cette croyance produise trop d'effets sur sa raison, son intelligence, ses mœurs, l'usage de soi, de son temps, de son corps, de sa chair", en réaction à la haine paulienne des corps ; "le libertinage philosophique entretient donc une relation intime avec le libertinage de mœurs." "Penser librement pour vivre librement".
J'avoue que je ne me souviens pas d'avoir jamais entendu parler de Charron, La Mothe Le Vayer, Saint-Evremond. Cyrano de Bergerac me faisait plus penser à D'Artagnan, Roxane ou Gérard Depardieu qu'à Montaigne...
La conclusion logique de cette lignée philosophique vient avec Spinoza et "sa revendication d'une liberté d'analyse totale, sur tous les domaines ; l'abandon des modèles théologiques au profit du modèle scientifique ; la proposition d'une morale débarrassée du ciel et soucieuse des seuls effets produits sur terre."
Depuis 1492, le monde "n'est plus européen, blanc et chrétien mais planétaire, coloré et naturel, multiple."
"Philosopher n'est pas apprendre à mourir, mais à mieux vivre en attendant la mort".
La même année que le "Discours de la méthode" de Descartes, en 1637, parait "La supercherie dévoilée" de Cristovano Ferreira, jésuite portugais, missionnaire au Japon, converti au bouddhisme zen. Il démontre, trop en avance sur son temps, "l'incompatibilité absolue entre la religion et l'usage sain d'une raison correcte".
Le "Grand Siècle", celui de Louis XIV, classique, catholique et monarchiste, est aussi celui de "la force anonyme libertaire qui fleurit partout", de "la circulation de manuscrits anonymes d'une radicalité sidérante".
Ce livre m'a donné envie de lire les autres tomes de cette "Contre histoire de la philosophie".
"J'aime, donc je suis" (Saint-Evremond)
"Nous avons plus d'intérêt à jouir du monde qu'à le connaître" (Saint-Evremond)
09:09 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : philosophie
07/10/2009
Un VRP de haut niveau
Quel est le rôle du Président de la République française ?
Nicolas Sarkozy au Kazakhstan en "visite d'Etat", le plus haut niveau protocolaire. Accompagné de quelques ministres. Pas de Secrétaire d'Etat aux Droits de l'Homme. Mieux vaut s'occuper du sport, elle n'aurait pas sa place dans un tel pays où les opposants sont muselés, où la liberté de la presse est inexistante, en particulier sur Internet, et celle de manifester très restreinte.
Accompagné, surtout de nombreux chefs d'entreprises, comme toujours maintenant à chacun de ses déplacements. Des dizaines de contrats sont à la signature, en particulier pour construire un oléoduc et pour vendre du matériel de communication militaire.
Tant mieux pour les entreprises françaises.
Mais est-ce le rôle du Président de la République ? Imagine-t-on le général De Gaulle à Québec, à Phnom-Penh, François Mitterrand à Cancun, transformés en représentants de commerce ?
Ne serait-ce pas plutôt le rôle du Premier Ministre ?
Justement François Fillon était au Kazakhstan il y a peu...
Le tempérament de l'hyper Président, ajouté au quinquennat, ont fait évolué le rôle du Président de la République, dans un sens que son prestigieux fondateur n'aurait jamais imaginé...
08:42 Publié dans vie politique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : politique, kazakstan
06/10/2009
l'épreuve de Julien Dray
L'épreuve
Julien Dray
Editions "Le cherche midi"
Il y a bientôt un an, à 6heures 35, le matin, soixante policiers procèdent à des perquisitions simultanées pour tenter de prouver que le député Julien Dray a bénéficié de "chèques de complaisance" de la part d'associations qu'il a aidé à naître, notamment "SOS racisme" et la Fédération des Lycéens.
Pendant que sa femme et ses enfants voient les policiers envahir leur appartement parisien, il est dans son logement de l'Essonne, où se trouve sa permanence de député.
Alors qu'il ne sait pas encore ce qui lui est reproché, la presse, manifestement avertie, le présente comme un acheteur compulsif, collectionneur de montres très chères ("ma collection de montres de luxe -j'aimerais bien qu'elle existe", vivant au dessus des moyens d'un député.
Combattant politique blessé, manifestement prêt à faire autre chose que de la politique dans la dernière période de sa vie, Julien Dray clame son innocence, et dans ce livre thérapie, s'adresse successivement aux un(e)s et aux autres pour dire sa détresse, ses indignations, dressant au passage un tableau très noir du PS, de la justice, de la presse.
Il dénonce les journalistes, "trop paresseux pour mener leur propre enquête", "qui se prennent non seulement pour des juges et des policiers, mais aussi pour des experts comptables", "juge, jury exécuteur", "les chiens" comme a dit Mitterrand (François), lui qui ne portait jamais de montre, aux obsèques de Pierre Bérégovoy, victime, lui aussi, d'un lynchage médiatique.
François Mitterrand qui a été le seul parlementaire de gauche, avant Julien Dray, à bénéficier de l'"honneur" d'avoir son bureau perquisitionné à l'Assemblée nationale.
Julien Dray décrit "une pratique journalistique consistant à devenir le porte-voix et le diffuseur d'officines qui recourent à l'intox et à la manipulation de l'opinion, jusqu'à prendre les couleurs du harcèlement". Il a gagné son premier procès pour diffamation contre "Le Point", les autres sont en attente. Cela a fait, à peine, un entrefilet dans les journaux.
Il raconte la saisie de son calepin bourré de chiffres qui se révèlent être non pas les relevés de ses mouvements financiers...mais de son taux quotidien de diabète !
Il dénonce la réforme de la justice qui met l'enquête préliminaire sous la responsabilité non pas d'un juge d'instruction, mais directement sous la tutelle du "parquet" et donc du ministre de la justice et il propose une "sécurité sociale de la justice".
Il voit un lien entre ses velléités d'être Premier Secrétaire du PS, et ses ennuis.
Il regrette amèrement l'attitude de "prudence" de Martine Aubry, et de Ségolène Royal qu'il a appuyée de toutes ses forces lors de l'élection présidentielle.
Il regrette "ces petites mesquineries que l'on se permet quand on voit un homme amoindri, et que l'on ne le sent plus en capacité de nuire".
"Quand la tension monte, les uns et les autres succombent à leurs pires travers et se livrent à des escarmouches où tous les coups sont permis, et même certains que l'on ne délivrerait pas à nos adversaires politiques".
"Nous n'avons plus de colonne vertébrale idéologique. Nous n'avons plus de projet qui fasse immédiatement sens dans l'esprit de nos concitoyens ou qui leur donne simplement envie".
"Sans ligne idéologique, nous sommes dans l'opportunisme et l'empirisme le plus total".
Il tente de se consoler avec Lévinas : "Ce qui n'aura pas d'importance dans cinq ans n'a pas d'importance aujourd'hui.", Adriano Sofi : "Etre fidèle à soi-même, tel qu'on a été, est une nécessité urgente et stupide" et la maxime "J'ai perdu mes certitudes mais gardé mes convictions".
"On est qu'un petit caillou, tout petit. Il y a une Histoire qui nous dépasse et qui continue. Il faut tout relativiser au regard de celle-ci."
08:40 Publié dans vie politique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : politique, littérature