06/04/2017
Un Etat-guérilla en mutation
Corée du Nord
Philippe Pons
éditions Gallimard
Il y a quelques années, j'ai raconté dans ce blog mon voyage dans ce pays si fermé. Philippe Pons, journaliste au Monde, propose une analyse très fouillée du passé, du présent et du futur de ce qu'il appelle cet "Etat guérilla".
La Corée, colonisée par le Japon à partir de 1905, , est sortie exsangue de la guerre qui a déchiré la péninsule après la dernière guerre mondiale, faisant au moins deux millions de morts coréens. D'un coté l'URSS et la Chine de Mao, de l'autre les Etats-Unis d'Amérique et ses alliés, dont la France. Il faut donc penser la RPDC dans le contexte de son histoire nationale qui explique, au moins en partie, pour quoi elle s'est transformée en "Etat forteresse", cherchant des marges de manoeuvre face à ses mentors chinois et russe. "La RPDC vit depuis plus d'un demi-siècle figée dans l'ère postcoloniale et la guerre froide."
"Un nationalisme ethnique exacerbé a progressivement évincé le marxisme- léninisme." "Un système totalitaire, "socialiste" dans sa forme, nationaliste dans sa substance. La Constitution de 1998 écarte toute référence au marxisme." Au pratiques staliniennes (répression, purges, camps de travail) s'ajoutent les méthodes de contrôle de la police d'occupation japonaise visant à réguler la vie quotidienne en jouant de la délation et de la surveillance mutuelle.
L'écroulement du bloc soviétique et la transformation de l'économie chinoise ont eu des répercussions catastrophiques pour l'économie de la RPDC. Famines, et pour survivre : marché noir et corruption généralisée après l'effondrement du système de distribution publique. Le décalage entre l'idéologie et la réalité est patent, même pour les Nord-Coréens.
La politique de W Bush a son égard ("axe du mal" en 2002) a renforcé la mentalité d'assiégé permanent, "la militarisation à outrance absorbant les ressources nationales. La primauté accordée aux dépenses militaires s'opéra au détriment des conditions de vie." "Le pays le plus militarisé du monde" avec une surreprésentation des militaires dans l'appareil du pouvoir. L'intervention militaire américaine a été une leçon pour les dirigeants de la RPDC, paranoïaques non sans raison. Devenir une puissance nucléaire leur semble la seule façon d'éviter le sort de Sadam Hussein.
La Chine, même si elle désapprouve la politique des dirigeants nord-coréens, ne se débarrassera de la famille Kim que si celle-ci ne "tient plus le pays, et la remplacera alors par une junte militaire. La présence de ce "glacis" lui est indispensable.
La Corée du Sud ne pousse pas à l'effondrement du régime : elle a tiré les leçons de la réunification allemande et de son prix. D'autant que l'écart entre le nord et le sud est beaucoup plus important qu'il ne l'était entre l'oued et l'est.
07:54 Publié dans Affaires étrangères | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : affaires étrangères, corée
16/01/2017
Vers la paix civile en Colombie ?
La Colombie de A à Z
Jean-Jacques Kourliandsky
André Versaille éditeur
Jean-Jacques Kourliandsky, chercheur à l'IRIS (Institut des Relations Internationales et Stratégiques) est incontestablement un des meilleurs connaisseurs français de l'Amérique latine.
Le prix Nobel de la paix ayant été attribué au président colombien Santos pour ses efforts de paix civile avec les FARC, ayant eu la chance de rencontrer le président Santos il y a quelques années, à Bogota, ayant rencontré également Kourliandsky, mais pas lors du même voyage, j'ai voulu me plonger dans ce livre d'une centaine d'entrées, présentées par ordre alphabétique, afin de mieux avoir à l'esprit les enjeux.
Comme toujours en géopolitique, il faut avoir à l'esprit la géographie , l'histoire, la culture...C'est ce que permet ce petit livre, dans lequel il ne faut pas chercher les adresses des meilleurs hôtels, bars et restaurants, ni des boutiques d'artisanat ! Mais le lecteur y trouvera, en particulier, les problématiques du trafic de de cocaïne, du poids du puissant voisin nord-américain, et de ses multi-nationales fruitières, des luttes des syndicats de travailleurs agricoles...
08:05 Publié dans Affaires étrangères | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : colombie
11/11/2016
Le choix des électeurs
La majorité des électeurs a voté pour Hillary Clinton...et est en colère aujourd'hui...
Trump, comme W Bush il y a quelques années n'a été élu que grâce à un système qui favorise les petits Etats. Comme pour les élections des Sénateurs en France, ou comme dans les institutions européennes qui favorisent les petits Etats... Ici comme là bas, les électeurs ne sont pas tous égaux.
Même s'ils sont minoritaires, ils furent nombreux à voter pour un homme dont le principe correspondait à leur aspiration : rendre sa grandeur à l'Amérique ! Et si elle l'est moins, c'est bien entendu la faute des métèques, au premier rang des quels les musulmans et les latinos.
Pas beaucoup de Latinos chez nous, mais pour le reste le discours peut être repris à l'identique et trouvera les mêmes échos. Marine Le Pen s'en réjouit déjà.
Comment expliquer que des gens aient voté pour quelqu'un qui promettait à la fois un plan de relance de mille milliards et une baisse des impôts ?
Le président élu ne tiendra probablement pas toutes ses promesses faites dans l'ambiance de la campagne électorale, par exemple mettre Hillary en prison, mais un grand vent réactionnaire souffle sur les USA, la composition du Sénat, de la Chambre, bientôt de la Cour suprême... Environnement, politique sociale, droit des femmes à disposer de leur corps, droit des homosexuels...
13:42 Publié dans Affaires étrangères | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : élections usa
10/11/2016
Pakistan : clé de la stabilité du monde
Le syndrome pakistanais
Christophe Jaffrelot
éditions Fayard
Le syndrome pakistanais est un instabilité permanente ayant trois causes : les tensions entre un Etat unitaire et des identités ethniques fortes ; les tensions entre des politiques autoritaires (militaires ou civiles) et des aspirations démocratiques ; des tensions entre des conceptions concurrentes de l'Islam.
Deux racines de leur syndrome : "la peur de l'Inde et la préservation du statut des élites."
Le Pakistan a été créé, par séparation de l'Inde devenant indépendante, sur une base religieuse musulmane, voulue "par une élite décidée à défendre ses intérêts contre les hindous puis contre la plèbe."
"Première opération de "purification ethnique" de l'histoire moderne" Dix millions de personnes déplacées, un million de morts...
Résultat : "faiblesse persistante de la pression fiscale, absence de réforme agraire", "la pauvreté de masse reste la règle", "la monopolisation du pouvoir social par une mince élite, le creusement des inégalités et l'absence de forces de gauche" et "les hommes politiques restent les champions de l'enrichissement personnel."
Au nom de la lutte contre le communisme, puis contre le terrorisme, les USA apportent "une aide civile considérable" et une "manne militaire." "Dès lors qu'ils paient, les Etats-Unis obtiennent du Pakistan des concessions qui affectent sa souveraineté." Ce qui engendre "un solide antiaméricanisme."
"L'Etat pakistanais est en grande partie responsable de l'essor du sectarisme, du jihadisme et du mouvement taliban."
08:23 Publié dans Affaires étrangères | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : pakistan
07/11/2016
De Washington à Obama
Les Présidents américains
André Kaspi / Hélène Harter
éditions Tallandier, collection "Texto, le goût de l'histoire"
Impossible d'ignorer que les USA vont élire leur nouveau Président. Pour la première fois de leur histoire, peut-être une femme. Deux professeurs d'université, spécialistes des Etats-Unis, nous proposent une revue historique pour comprendre le mécanisme de l'élection et certaines de ses constantes.
Ainsi, depuis plus d'un siècle, les Démocrates ont cherché le vote des immigrants, bien avant qu'ils ne soient latino-américains. Par contre, les Républicains, le parti de Lincoln et de l'abolition de l'esclavage, par leur conservatisme, ont largement perdu le vote des afro-américains.
Depuis le début des USA, et la présidence de Washington, la critique contre l'Etat fédéral est récurrente. Le parti républicain de Jefferson s'est même constitué sur cette base. Ce qui nous dénommons la "guerre de sécession", et que les Américains appellent la "guerre civile" est un autre exemple de cette opposition entre l'Etat fédéral et les Etats qui gardent leur système propre pour élire le président, y compris pour les "primaires".
Toujours d'actualité également les limites du pouvoir présidentiel quand le législatif est majoritairement composé d'opposants. Obama en a fait la pénible expérience.
Depuis un siècle l'argent a pris un place grandissante dans le système politique. Et pas seulement pour l'élection du Président. Les "réseaux sociaux" parviendront-ils a diminuer le poids de la publicité politique à la télévision, à la radio, dans la presse écrite ?
Autre information dans ce livre : pour être élu(e) mieux vaut avoir été gouverneur, ou vice-président (même s'il y a autant de vice-présidents battus qu'élus), au minimum sénateur. Aucun député n'a trouvé la voie directe vers la présidence. Et aucun n'ayant jamais eu aucune responsabilité législative ni exécutive. Pourvu que ça dure encore cette fois-ci !
08:38 Publié dans Affaires étrangères | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : élections américaines