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10/11/2016

Pakistan : clé de la stabilité du monde

Le syndrome pakistanais

Christophe Jaffrelot

éditions Fayard

 

Le syndrome pakistanais est un instabilité permanente ayant trois causes : les tensions entre un Etat unitaire et des identités ethniques fortes ; les tensions entre des politiques autoritaires (militaires ou civiles) et des aspirations démocratiques ; des tensions entre des conceptions concurrentes de l'Islam.

Deux racines de leur syndrome : "la peur de l'Inde et la préservation du statut des élites."

Le Pakistan a été créé, par séparation de l'Inde devenant indépendante, sur une base religieuse musulmane, voulue "par une élite décidée à défendre ses intérêts contre les hindous puis contre la plèbe."

"Première opération de "purification ethnique" de l'histoire moderne" Dix millions de personnes déplacées, un million de morts...

Résultat : "faiblesse persistante de la pression fiscale, absence de réforme agraire", "la pauvreté de masse reste la règle", "la monopolisation du pouvoir social par une mince élite, le creusement des inégalités et l'absence de forces de gauche" et "les hommes politiques restent les champions de l'enrichissement personnel."

Au nom de la lutte contre le communisme, puis contre le terrorisme, les USA apportent "une aide civile considérable" et une "manne militaire." "Dès lors qu'ils paient, les Etats-Unis obtiennent du Pakistan des concessions qui affectent sa souveraineté." Ce qui engendre "un solide antiaméricanisme."

"L'Etat pakistanais est en grande partie responsable de l'essor du sectarisme, du jihadisme et du mouvement taliban."

 

 

07/11/2016

De Washington à Obama

Les Présidents américains

André Kaspi / Hélène Harter

éditions Tallandier, collection "Texto, le goût de l'histoire"

 

Impossible d'ignorer que les USA vont élire leur nouveau Président. Pour la première fois de leur histoire, peut-être une femme. Deux professeurs d'université, spécialistes des Etats-Unis, nous proposent une revue historique pour comprendre le mécanisme de l'élection et certaines de ses constantes.

Ainsi, depuis plus d'un siècle, les Démocrates ont cherché le vote des immigrants, bien avant qu'ils ne soient latino-américains. Par contre, les Républicains, le parti de Lincoln et de l'abolition de l'esclavage,  par leur conservatisme, ont largement perdu le vote des afro-américains.

Depuis le début des USA, et la présidence de Washington, la critique contre l'Etat fédéral est récurrente. Le parti républicain de Jefferson s'est même constitué sur cette base. Ce qui nous dénommons la "guerre de sécession", et que les Américains appellent la "guerre civile" est un autre exemple de cette opposition entre l'Etat fédéral et les Etats qui gardent leur système propre pour élire le président, y compris pour les "primaires".

Toujours d'actualité également les limites du pouvoir présidentiel quand le législatif est majoritairement composé d'opposants. Obama en a fait la pénible expérience.

Depuis un siècle l'argent a pris un place grandissante dans le système politique. Et pas seulement pour l'élection du Président. Les "réseaux sociaux" parviendront-ils a diminuer le poids de la publicité politique à la télévision, à la radio, dans la presse écrite ?

Autre information dans ce livre : pour être élu(e) mieux vaut avoir été gouverneur, ou vice-président (même s'il y a autant de vice-présidents battus qu'élus), au minimum sénateur. Aucun député n'a trouvé la voie directe vers la présidence. Et aucun n'ayant jamais eu aucune responsabilité législative ni exécutive. Pourvu que ça dure encore cette fois-ci !

 

17/05/2016

Le dossier noir de la relation franco-syrienne

Les chemins de Damas

Christian Chesnot et Georges Malbrunot

éditions Robert Laffont

 

Le régime syrien n'en finit pas de massacrer son peuple. Les auteurs,  journalistes, l'un à France Inter, l'autre au Figaro décortiquent les relations entre la France et la Syrie.

L'histoire avait bien commencé,  en 1920,  quand la France s'est vue attribuer un "mandat" de gestion de la Syrie et du Liban. La France avait alors favorisé l'émancipation de la minorité alaouite, malmenée par l'empire ottoman, lui octroyant, de plus, un "Territoire" autonome.

Le livre s'ouvre par l'assassinat de l'ambassadeur français à Beyrouth, en 1981. Puis par les attentats de la rue Marbeuf et de la rue des Rosiers en 1982. Crime de la France, aux yeux du régime syrien : avoir sauvé Arafat, encerclé dans Beyrouth. "Pour Damas, qui s'est toujours considéré comme le propriétaire de la cause palestinienne, Arafat est un concurrent qu'il ne faut pas défendre."

"C'est le souvenir de tous ces assassinats qui a entretenu ensuite l'hostilité d'une large partie du Quai d'Orsay à l'encontre de la Syrie."

"Aux obsèques du raïs syrien, Jacques Chirac est le seul chef d'Etat occidental à être présent." "Une fois au pouvoir,Bachar recevra chaque vendredi matin un appel de Jacques Chirac." Celui-ci se rendra compte que le chef de l'Etat syrien n'écoutait pas ses conseils. Même s'il avait eu des velléités de réformes, les durs, et les prédateurs,  du régime ne l'auraient pas permis. "Sous Hafez, il y avait une forme de redistribution. Sous Bachar, on passe directement à la prédation."

"La coopération a porté ses fruits. Nous avons pu déjouer nombre d'attentats ciblant la France"."Si les dommages sur la vie de nos soldats déployés au Liban dans le cadre de la FINUL ont pu être évités, c'est en grande partie grâce à la coopération sécuritaire franco-syrienne."

Mais Chirac ne pardonnera jamais l'assassinat de son ami proche Rafic Hariri.

Quand Sarkozy est élu, "sa seule ligne de conduite, c'est de faire de l'anti-Chirac." "Il va plaider la cause du président syrien partout et même jusqu'à Washington."

 Quand la révolte éclate en 2011, "ils ont réagi comme un régime qui se sait minoritaire :en usant d'une force extrême pour survivre." En face "les intégristes sont hostiles à une révolte pacifique parce que, justement, peu représentés à l'intérieur." "Le pouvoir durcit son implacable combat contre les opposants pacifistes." "L'arrivée des premiers djihadistes étrangers sur le sol syrien permettra au régime de justifier sa théorie du complot."

Le Quai d'Orsay, tenu alors par Alain Juppé, va commettre l'erreur de "croire dur comme fer qu'Assad va tomber." "Il ne voulait pas savoir si le régime allait tenir, mais comment il allait tomber." "Une question de semaines."

L'axe Moscou / Téhéran / Damas / Beyrouth a été complètement sous estimé.

On a assisté à "la montée en puissance de l'aide militaire russe", "l'entrée en force des combattants du Hezbollah". "L'Iran également apporte son soutien financier."

"On a cru qu'on allait convaincre les Russes de voter une résolution contre la Syrie au Conseil de sécurité de l'ONU..."

Fabius va poursuivre la même ligne. "Dans l'équation syrienne, Laurent Fabius va snober Iraniens et Russes." "Comment espérer résoudre la tragédie syrienne sans les associer ?"

"Les Américains ont réalisé que les soi-disants "zones libérées" voulues par la France étaient en fait en train de tomber sous la coupe des groupes djihadistes." "Les Américains ont été très tôt conscients des lacunes de l'opposition et du danger que représentaient les djihadistes." "Le Conseil militaire supérieur de l'Armée syrienne libre est miné par la corruption." "Le Conseil national syrien est occupé par ses querelles intestines."

"L'afflux de militants djihadistes partant des grandes villes françaises pour rejoindre le champ de bataille syrien est une forme de défaite pour la France."

Maintenant, il faut "maintenir les opposants de la Coalition nationale syrienne en respiration artificielle, mais la priorité désormais est d'empêcher la sanctuarisation d'un califat djihadiste moyenâgeux au coeur du Moyen-Orient."

 

 

11/04/2016

Décrypter l'accord transatlantique

Pourquoi Bruxelles brade l'Europe ?

Charlotte Dammane

éditions Hikari

 

J'ai connu Charlotte à une époque où elle portait son nom de jeune fille...puisqu'elle n'était pas encore mariée. Elle était l'assistante de Kader Arif, alors parlementaire européen, membre actif de la commission du commerce extérieur. Elle l'a suivi à son cabinet de ministre des anciens combattants. Beau symbole pour ce fils de harki !

Quand Charlotte m'a informé de la sortie de son livre, je lui ai répondu "Bruxelles", je ne sais pas qui sait. Raccourci habituel, et agaçant, des médias.

A la lecture du livre, la charge porte clairement contre la Commission européenne, bouc-émissaire bien pratique. 

Je n'ai jamais travaillé à la Commission européenne. Je travaillais au Parlement européen. Il me faut donc préciser que la Commission ne décide de rien. Elle propose au Conseil (les représentants de nos 28 Etats membres), ainsi, dans la plupart des cas au le Parlement européen.

La Commission est chargée de négocier au nom de l'Union européenne. Est-il possible d'imaginer 28 négociateurs européens ? Sans parler des ONG qui rêvent d'être présentes pour surveiller les négociateurs.

Les Etats membres donnent à la Commission un mandat. Et elle rend compte à chaque étape, au Conseil et au Parlement. Si la Commission parvient à un accord avec un éventuel partenaire, celui-ci est soumis à l'approbation de chaque Etat membre + du Parlement européen. L'exemple récent de l'accord avec l'Ukraine montre que rien n'est acquis d'avance, et qu'un seul Etat, ou le Parlement européen, peut tout bloquer.

Concernant les négociations avec les USA pour un accord transatlantique, les partis, ONG et médias opposés par principe se sont déjà largement déchaînés. En particulier au moment des élections européennes. Comme si, par principe, un tel échange ne pouvait être que mauvais. Comme si, par postulat, l'Europe était "bradée". Comme si les Etats membres allaient oublier leurs intérêts économiques, et la sensibilité de leur électorat sur ces questions.

Charlotte pose d'entrée la question : "qui gagnera ?". Vraiment pas possible d'imaginer un accord gagnat/gagnant ?

Principaux problèmes : respect des normes, en particulier sanitaires, européennes, "exception culturelle", service public, produits "sensibles" qui seraient en difficulté face à une concurrence américaine, protection des "indications géographiques", accès aux marchés publics et surtout la question de l'arbitrage en cas de désaccord.

Charlotte Dammane a raison d'attirer l'attention sur tous ces problèmes...loin d'être résolus ! Au point que je me demande si je verrai de mon vivant la conclusion positive de ces négociations.

 

07/04/2016

De quel droit ?

Karabakh ou Artsakh ?

 

Que cherchait Staline, en 1921, en plaçant le Karabakh, Artsakh pour les Arméniens qui peuplaient ce territoire à 95 %  sous la tutelle azérie ? Diviser pour régner , bien entendu. Briser les nationalismes de ces montagnards toujours un peu rebelles à l'autorité russe !

Et c'est au nom de cette décision stalinienne, et de "l'intangibilité des frontières" que les habitants de cette région devraient être considérés comme Azéris ?

Le droit des peuples à disposer d'eux mêmes est rarement mis en avant.

Mais qui propose de vider l'Artsakh de tous ses habitants ? La Turquie soutient inconditionnellement l'Azerbaïdjan. Sans honte pour le passé ! Tout le monde se souvient de la façon dont la Turquie a essayé de régler la question arménienne en 1915 : par un génocide...

Si les habitants de l'Artsakh sont "indépendantistes" et n'ont pas intégré l'Arménie, c'est que la communauté internationale ne leur permet pas. Etat non reconnu, comment ses habitants peuvent-ils voyager ? Sinon avec des passeports arméniens ?

L'Azerbaïdjan affirme vouloir "reconquérir" ce territoire légué par Staline. Le plus triste est qu'il pourrait en avoir les moyens militaires. Son budget militaire est égal au total du budget de la pauvre Arménie. Le pétrole et le gaz donnent bien des moyens.

Face à cette menace l'Arménie a besoin du parapluie militaire russe. Les Arméniens se sentent européens. Leur gouvernement négociaient un accord d'association avec l'Union européenne. Poutine y a mis fin en exerçant un chantage même pas déguisé.

Les deux pays sont des démocraties très relatives. Surtout l'Azerbaïdjan. Le nationalisme et les appels guerriers ont toujours et partout servis de masque aux régimes politiques non démocratiques.

Le conflit , n'est pas sans rappeler l'éclatement de la Yougoslavie. Des dirigeants nationalistes se crispant sur les frontières d'un découpage arbitraire décidé par un dirigeant voulant affaiblir un groupe "national". Des "nettoyages ethniques" meurtriers. L'indépendance du Kosovo dont l'existence et le fonctionnement demeurent un problème, malgré l'investissement de la communauté internationale, en particulier l'Union européenne.

Je crains que les affrontements de cette semaine soient les prémisses de bien d'autres.