11/02/2010
identités
Les identités meurtrières
Amin Maalouf
Livre de poche n°15005
Préscience du Livre de poche de rééditer, en 2008, ce petit livre de 1998.
Prémonition d'Amin Maalouf qui écrivait en 1998 : "Rien n'interdit de penser qu'un jour un Noir sera élu président des Etats-Unis".
Alors que le débat sur "l'identité nationale" lancé par le gouvernement patauge (au mieux), il est salutaire de revenir aux notions fondamentales : le désir d'identité est légitime. "La mondialisation accélérée provoque, en réaction, un renforcement du besoin d'identité"."Il ne doit être traité ni par la persécution, ni par la complaisance". Pour qu'il ne soit pas "meurtrier", il faut que "personne ne se sente exclu de la civilisation commune qui est en train de naître, du sentiment d'appartenir à l'aventure humaine."
"En tout homme se rencontrent des appartenances multiples"
"Mon identité, c'est ce qui fait que je ne suis identique à aucune autre personne"
"L'humanité entière n'est faite que de cas particuliers, la vie est créatrice de différences"
"L'identité n'est pas donnée une fois pour toutes, elle se construit et se transforme tout au long de l'existence"
"Lorsqu'on a été brimé à cause de sa religion, lorsqu'on a été humilié ou raillé à cause de sa peau ou de son accent, ou de ses habits rapiécés, on ne l'oubliera pas"
"Si les hommes de tous pays, de toutes conditions, de toutes croyances se transforment aussi facilement en massacreurs, si les fanatiques de tous poils parviennent aussi facilement à s'imposer comme défenseurs de l'identité, c'est parce que la conception "tribale" de l'identité qui prévaut encore dans le monde entier favorise une telle dérive".
"Plus un immigré sentira sa culture d'origine respecté, plus il s'ouvrira à la culture du pays d'accueil"
"Lorsqu'on sent sa langue méprisée, sa religion bafouée, sa culture dévalorisée, on réagit en affichant avec ostentation les signes de sa différence"
"On ne peut avoir les bras ouverts que si l'on a la tête haute"
"La tolérance ne me satisfait pas. Je n'ai aucune envie d'être toléré, j'exige que l'on me considère comme un citoyen à part entière quelles que soient mes croyances"
"Le postulat de base de l'universalité, c'est de considérer qu'il y a des droits inhérents à la dignité de la personne humaine, que nul ne devrait dénier à ses semblables, à cause de leur religion, de leur couleur, de leur nationalité, de leur sexe, ou pour toute autre raison"
"Respecter quelqu'un, respecter son histoire, c'est considérer qu'il appartient à la même humanité, et non à une humanité différente, à une humanité au rabais".
"Ce qui doit être respecté, absolument, et sans la moindre concession, c'est la dignité des êtres humains, de tous les êtres humains, femmes, hommes et enfants, quelles que soient leurs croyances et leur couleur"
"Respecter des "traditions" ou des lois discriminatoires, c'est mépriser leurs victimes"
"On exagère trop souvent l'influence des religions sur les peuples, tandis qu'on néglige, à l'inverse, l'influence des peuples sur les religions"
"La société façonne la religion qui, à son tour, façonne la société"
"Les sociétés sûres d'elles se reflètent dans une religion confiante, sereine et ouverte ; les sociétés mal assurées se reflètent dans une religion frileuse, bigote, sourcilleuse."
"Tout dans l'Histoire s'exprime par des symboles"
"L'Occident ne veut pas qu'on lui ressemble, il veut seulement qu'on lui obéisse"
"Je n'ai jamais compris comment un Etat qui se disait "laïc" avait pu désigner certains de ses ressortissants par l'appellation de "Français musulmans", et les priver de certains de leurs droits pour la seule raison qu'ils étaient d'une autre religion que la sienne..."
"Une laïcité sans démocratie est un désastre à la fois pour la démocratie et pour la laïcité"
"L'Histoire ne suit jamais le chemin qu'on lui trace parce qu'elle n'est que ce qu'en font les hommes"
"Chacun d'entre nous devrait être encouragé à assumer sa propre diversité, à concevoir son identité comme étant la somme de ses diverses appartenances"
10:01 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature, identité
07/02/2010
blessure d'amour propre
Blessure d'amour propre
Martin Veyron
Editions Dargaud
Au début des années 80 paraissait, aux éditions "l'écho des savanes", "L'amour propre ne le reste jamais très longtemps", de Martin Veyron.
A la fin de "L'amour propre", le "héros" (Martin Veyron affirmait que ce n'était pas autobiographique, ce qui était facile à croire), le personnage principal, donc, se retrouvait papa d'une petite fille.
Le temps a passé bien vite. Presque trente ans plus tard le papa devient grand-père. Toujours dessinateur, il a des problèmes avec sa prostate, et avec son inspiration, et est toujours fauché. Autobiographique ?
Il se retourne alors vers ce qui a fait son inoubliable succès : le "point G" et les "femmes fontaines".
Cela m'a donné envie de relire "L'amour propre", et je ne l'ai pas regretté.
Album beaucoup plus "hard" : la période était-elle plus permissive, ou Martin Veyron est-il moins excité ?
Reste, au moins pour ma génération, et celle de Martin Veyron, la douceur de la nostalgie du temps qui passe, et nos fantasmes pas tout à fait estompés...
08:28 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature, bd
04/02/2010
petit dictionnaire des mots de la crise
Petit dictionnaire des mots
De la crise
Philippe Frémeaux
Dessins de Gérard Mathieu
Editions "Alternatives économiques"
Les problèmes économiques sérieux, et leurs conséquences sociales, présentés avec humour, aussi bien dans le texte que les dessins, dans ce tout petit livre.
C'est clair et pédagogique, donc percutant.
A travers des mots comme "aléa moral", "titrisation" et "bonus" il est expliqué clairement que les banques et traders peuvent se permettre de prendre des risques inconsidérés avec de l'argent qui ne leur appartient pas : les gains sont privés, les pertes à la charge des épargnants et des contribuables.
En 2008, alors que les banques perdaient des milliards, 18 milliards de $ de bonus ont été distribués, et les salaires des grands dirigeants n'ont pas baissé.
"Le marché des créances titrisées avait atteint 11 000 milliards de $ aux Etats-Unis en 2006. Elles étaient finalement revendues à des épargnants et finissaient, par exemple, dans votre compte-épargne retraite ou votre assurance-vie". "AIG s'en était fait une spécialité et garantissait, à la veille de la crise, pour 2 600 milliards de $ de créances titrisées. L'équivalent d'une année du PIB français." "La déconfiture d'AIG a coûté 170 milliards de $ aux contribuables américains".
"Qui a beaucoup d'actifs peut rester inactifs"
"La seule solution pour dépenser plus sans gagner plus, c'est de s'endetter"
"Quand l'Etat s'endette, ce sont ceux qui gagnent suffisamment pour épargner qui lui prêtent de l'argent. Et si l'Etat augmentait juste un peu les impôts payés par les plus aisés plutôt que de leur emprunter de l'argent ?"
"Le marché ne fonctionne jamais sans règles. Le néolibéralisme est le fruit d'une puissante intervention politique au profit des plus puissants et des plus riches". "La dérèglementation consiste à donner plus de place aux mécanismes du marché dans la gestion des services publics."
08:58 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : crise
31/01/2010
une histoire alternative des Etats-Unis
Une histoire populaire de
L’empire américain
Howard Zinn, Mike Konopacki, Paul Buhle
Editions Vertige graphic
Il s’agit de la mise en bandes dessinées, en noir et blanc, par le dessinateur Mike Konopacki, du livre du professeur de sciences politiques à l’université de Boston, Howard Zinn, sous la direction de l’éditeur et scénariste Paul Buhle.
Histoire « Populaire » ? Tout dépend du sens que l’on donne à ce mot, car il faut bien du courage pour prendre à « rebrousse poil » l’orgueil démesuré des Américains pour leur pays. Histoire « radicale » assurément que ses adversaires dans le pays traitent probablement de « communiste », mais qui devrait avoir du succès dans les pays où le sentiment anti-américain est aussi présent que le coca-cola.
« Tout au long de notre histoire, notre armée n’a pas été utilisée pour des objectifs moraux mais pour étendre le pouvoir économique, politique et militaire. »
Tout y passe pour démontrer cette phrase : la guerre américano-mexicaine de 1846, les guerres indiennes (massacre de Wounded Knee en 1890), la terrible répression des grévistes en 1892, les 103 interventions américaines dans d’autres pays entre 1798 et 1895, Cuba, les Philippines, la Première guerre mondiale, « une aubaine pour les industriels et les banquiers des Etats-Unis, le massacre des mineurs grévistes du Colorado, la ségrégation et la lutte pour les droits civiques, le Vietnam, bien entendu, la lutte contre les progressistes latino-américains, au profit des pires dictatures, pour finir par l’Irak et une conclusion : « Qu’est-ce qu’un Empire sans guerre ni conquête ? ».
Le parti-pris est évident, mais, en face, la propagande est tellement puissante et systématique…
08:25 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : bd, histoire
30/01/2010
Mort d'un trimardeur
Mort d'un trimardeur
Arthur Upfield
Grands détectives 10/18 n°2345
Sélection FNAC 2009 "100 polars"
Réédité en 2009, ce livre, publié pour la première fois en Australie en 1945, est, selon l'éditeur, l'un des meilleurs d'Arthur Upfield, bourgeois anglais "expédié" par ses parents en Australie à la fin du XIXe siècle, et considéré comme "le père du polar ethnologique".
Pour ceux qui aiment le dépaysement, ce livre n'a pas pris une ride, sauf peut-être le mot "trimardeur", dont il ne reste que le mot d'argot "trimer" (travailler dur), plus utilisé par mon père que par mes petits enfants...
Le "grand détective" d'Arthur Upfield est l'inspecteur Bonaparte, dit "Bony", métis qui allie les qualités d'observation des aborigènes à la culture britannique, "enquêteur qui a pour spécialité les crimes commis dans la brousse australienne".
Ses aventures se déroulent le long d'une trentaine de volumes 10/18.
Celle-ci se déroule en "Nouvelle-Galles du Sud". J'ai regardé sur la carte : c'est la région de Sydney et Melbourne, mais l'enquête se déroule en plein "bush" australien, "au milieu de nulle part".
Impossible de découvrir le coupable de cette série de meurtres avant le dernier chapitre tant l'auteur s'amuse à nous lancer sur de fausses pistes.
"Pourquoi les hommes s'entêtent-ils à croire que le succès dépend de l'activité musculaire ?"
"Il avait atteint l'âge où la beauté de la personnalité est plus appréciée que la beauté de l'enveloppe corporelle".
08:51 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature