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12/04/2017

Lamentation d'une pécheresse

Lamentation

C.J. Sansom

éditions Belfond

 

1546 : Londres, quelques mois avant la mort d'Henri VIII. Bien qu'il soit impensable d'évoquer l'hypothèse de la mort du roi,malgré sa décrépitude évidente, ses jambes pleines d'ulcères à cause de son diabète,   les différentes factions sont en lutte d'influence. La politique religieuse du souverain, louvoyante est le terrain propice à ces confrontations...et à quelques épurations. 

Afin de pouvoir divorcer de Catherine d'Aragon et se marier avec Ann Boleyn, Henri avait rompu avec Rome. Il n'avait pas hésité à saisir les monastères et a en tirer l'argent dont il avait besoin pour financer sa guerre contre la France. A la grande déception de ceux qui espéraient que cet argent servirait à aider les plus pauvres. Mais, pour le reste, il ne souhaitait pas pour autant s'aligner sur les positions religieuses des luthériens et s'accommodait fors bien de pratiques religieuses copiées sur les catholiques, mais sans le Pape.  Comme le Pape, il interdit la lecture de la bible par les "petites" gens. "Il n'a fait preuve d'aucune constance en matière de religion. Une année Lord Cromwell met en place la vraie réforme ; l'année suivante, il est exécuté." "Pour comprendre le roi, il suffit de se rappeler qu'il croit sincèrement que Dieu l'animé chef de l'Eglise d'Angleterre." Dans son testament , il demande que des messes tout à fait traditionnelles soient célébrées pour le repos de son âme.

Les anabaptistes qui considéraient que selon le vrai christianisme les différences sociales devraient être abolies et que tous les biens devaient être mis en commun, étaient "la bête noire de toute l'élite politique". Massacrés à Münster, aussi bien par les dirigeants protestants que catholiques,  certains s'étaient réfugiés en Angleterre.

En 1546, sa sixième épouse, Catherine Parr penche vers la réforme et certains membres du Conseil du Roi voudrait bien la faire chuter. La régence et la tutelle du jeune prince Edouard, qui n'avait pas dix ans,  était un enjeu d'importance.

Une grande chasse aux "hérétiques" est ouverte pendant quelques mois sur le thème de la "transsubstantiation", avec autodafés de la longue liste de livres qu'il était interdit de posséder. Il arrive même que les bourreaux ne se contentent pas de brûler des livres mais aussi des malheureux préférant mourir que d'accepter que "le corps et le sang du Christ soient présents dans l'hostie au cours de la célébration de l'eucharistie durant la messe." Discussion dont nous sommes bien loin aujourd'hui...

La reine a écrit, pour elle même, comme une sorte de confession, sa "Lamentation d'une pécheresse", très marquée par le protestantisme. Elle y écrivait notamment : "ce sont la foi et l'étude de la Bible qui assurent le salut, et non pas les vains rituels." "Elle s'était lourdement trompé en imaginant qu'à ce moment la balance penchait vers la Réforme." Et Henri VIII avait prouvé qu'il n'hésitait pas à répudier, ou à faire décapiter, ses épouses. Heureusement pour elle, son manuscrit ne parle pas de la messe et de ce qui s'y passe. 

Tout cela à l'occasion d'une enquête policière menée par l'avocat Matthew Shardlake, héros récurrent de C.J. Sansom.

 

16:23 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature, histoire

05/04/2017

De l'Empire à la République

Comités secrets du Parlement

1870/1871

éditions Perrin, en collaboration avec l'Assemblée Nationale

Présentation d'Eric Bonhomme

 

Le règlement du Corps Législatif du Second Empire prévoit que celui-ci peut se réunir en "comité secret", donc à "huis-clos", afin d'éviter la pression du public. Les participants sont tenus au secret, mais un compte-rendu est tout de même rédigé par les services. Il n'a été rendu public qu'en 2011.

En août 1870 la situation militaire justifie ces séances. Le 4 septembre, la République sera proclamée à l'Hotel de Ville de Paris après la défaite des armées françaises.

 En mars 1871, c'est l'insurrection parisienne qui émeut les parlementaires, qui veulent en débattre entre eux, à Versailles, sous la protection de l'armée prussienne.

Le premier comité secret montre le refus de la majorité du Corps Législatif d'envisager la défaite. Chez les Républicains, la levée en masse constitue un mythe tenace.

La séance du 26 août porte sur la proposition d'armer le peuple de Paris, de passer d'une garde nationale bourgeoise à une milice populaire. Comme le souligne le député républicain de gauche Raspail, le corps législatif a "d'avantage peur de la garde nationale que des Prussiens." Jules Favre propose la prise du pouvoir par l'Assemblée. La question est également posée de l'organisation d'une guerre de partisans dans les zones occupées par l'ennemi. "Armez les citoyens" (Jules Favre).

La séance de mars 1871 porte sur la proposition d'organiser rapidement des élections municipales à Paris , afin de contre balancer la Commune. Mais la Droite ne parle que de répression de l'insurrection , de défense de l'ordre et ajourne l'organisation d'élections municipales à Paris la républicaine. L'ennemi principal n'est pas le Prussien, mais l'ouvrier parisien insurgé. "Le pays doit s'unir à l'armée pour réprimer le désordre." tandis que Victor Schoelcher (célèbre auteur de la loi d'abolition de l'esclavage en 1848)  s'écrie "essayons tous les moyens qui peuvent prévenir l'effusion de sang."

Les Républicains, pourtant minoritaires sont les véritables animateurs de ces séances.

Dans ces réunions parlementaires il est intéressant de voir combien la procédure est instrumentalisée à des fins politiques. En 70 sous la présidence du maître des forges Schneider, en 71 sous la présidence de Jules Grévy, orchestrateur de la politique de Thiers (La République sera conservatrice ou ne sera pas).

 

 

17:53 Publié dans histoire | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : histoire

08/03/2017

C'est la guerre de 14/18

Le dernier assaut

Tardi

Chansons de Dominique Grange

Musique d'Accordzéam

éditions Casterman

 

J'aime les dessins de Tardi. Parmi mes albums préférés : Adèle Blanc-Sec, Nestor Burma et ses illustrations de "Voyage au bout de la nuit" et "Mort à crédit". Un auteur d'extrême droite illustré par un dessinateur d'extrême gauche. J'ai parlé récemment d'"Avril et le monde truqué ", adapté au cinéma. "Le dernier assaut" est dans la veine de ses deux albums intitulés "Putain de guerre", également sur la guerre de 14/18. La même description de l'horreur et des souffrances, à travers les yeux d'un brancardier. "On aurait pu le croire indifférent Augustin, mais il savait qu'il n'oublierait jamais, qu'il aurait toujours les hurlements de douleur dans les oreilles et l'horrible vision des corps déchiquetés sur la toile sanglante du brancard."

L'album revient aussi sur le rôle des tirailleurs venus d'Afrique, souvent placés en première ligne.Il y a également les Anglais, les Canadiens, et même, ce qui est moins connu, les Portugais.

Il y a les gaz asphyxiants, malgré l'interdiction par la Convention de Genève.

Le livre est accompagné d'un CD de chansons de Dominique Grange, compagne de Tardi, et surtout chanteuse emblématique pour toute ma génération de Mai 68. Elle avait sorti un album, illustré par Tardi, intitulé "1968/2008, n'effacez pas nos traces". Sa voix est toujours aussi claire et n'a pas "pris une ride". Les textes sont, bien entendu, contre la guerre.

 

08:40 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : bd, histoire

12/02/2017

un temps d'intolérance religieuse

La ville qui n'aimait pas son roi

Jean D'Aillon

Livre de poche policier n°32147

 

La couverture peut prêter à confusion. Elle représente Henri IV alors que le roi dont il est question est Henri III. La ville "qui n'aimait pas son roi", c'est Paris que le souverain a été obligé de fuir devant la menace que faisait peser sur lui l'alliance d' Henri de Guise, Duc de Lorraine avec les bourgeois parisiens ultra-catholiques "qui voulait se libérer du joug royal et payer moins d'impôts,  regroupés dans la "Sainte Ligue".

L'intrigue policière passe au second plan derrière la tension des évènements historiques. Même si nous savons comment tout cela s'est terminé.

L'auteur prend le parti d'Henri III, "malade, toussant, édenté, boitant à cause de ses fistules, le teint blême, le regard fuyant",  et justifie l'assassinat du Duc de Guise : c'était une question de survie pour lui. ("J'y aurais laissé la vie") "Les Lorrains disposaient de troupes bien équipées et de milliers de mercenaires payés par l'Espagne.""Le Balafré demandait tout, hormis la couronne et que le cardinal de Bourbon soit déclaré l'héritier du trône", à la place de l'hérétique Henri de Navarre. Henri III convoque les Etats généraux à Blois. "Pour le roi ce fut un échec et une nouvelle humiliation. Les trois ordres étaient dirigés par ses ennemis."

Après avoir tenté en vain de concilier les inconciliables, Catherine de Médicis "expira après avoir recommandé au roi de se réconcilier avec son beau-frère (Henri de Navarre), de cesser les persécutions contre les catholiques et d'établir dans le royaume la liberté de religion."

Henri III sera poignardé à son tour par Jacques Clément,  moine fanatisé par les ultra-catholiques qui lui avaient fait croire que son geste lui donnerait un accès direct au paradis. Tentant, même sans promesse de vierges...

"Cette guerre civile n'était pas seulement entre les hommes, entre les familles. Elle se livrait aussi à l'intérieur de leur esprit. Personne ne pouvait en sortir intact.

 

18:13 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature, polar, histoire

08/02/2017

Un médecin dans la tourmente 1914/1916

Un médecin dans la tourmente

Le carnet de guerre de René de Saint-Périer

1914/1916

Présenté par Jacques Gélis

Etampes Histoire

 

Mon ami Jacques Gélis, historien professeur émérite de Paris VIII, présente le carnet de guerre du Marquis de Saint-Périer, châtelain de Morigny (à côté d'Etampes), médecin réquisitionné pendant la guerre, affecté à l'hôpital installé dans les locaux du lycée de Beauvais. Puisque la guerre devait être brève. Avec l'intermède d'un repli en Vendée, dans la crainte de l'avancée allemande.

J'ai été surpris de lire que le lycée de Beauvais portait, et porte toujours, le nom de Félix Faure, connu surtout pour sa mort "glorieuse" dans les bras de sa maîtresse. A moins que ce ne soit l'anti-dreyfusard féroce qui ait été honoré ? Il n'était ni natif, ni élu de Beauvais...

Le départ ne correspond pas à l'image d'Epinal de l'enthousiasme patriotique. Les départs se font "avec calme et courage ; pas de cris, pas de chants, une grande résignation. Pauvres gens".

"L'état déplorable de l'organisation des services sanitaires de l'armée" choque beaucoup ce médecin qui revient à plusieurs reprises sur "l'incurie et la stupidité de l'administration du service de santé". "La conséquence de ces dysfonctionnements n'est rien moins que la survie de centaines de blessés du champ de bataille en attente de soins." "Confusion et désordre inouï ; la désorganisation est complète". "Le gâchis n'a pu être plus grand en 1870". "L'incohérence de l'administration sanitaire de l'armée ne s'est pas modifiée." "Le service de santé est digne de nos bons alliés les Russes : vols, incurie, gaspillage, négligence et stupidité..." "Les questions administratives du service de santé sont, pour la plupart, aussi stupides sur le fond qu'inintelligibles par la forme. Elles se contredisent fréquemment. L'absurdité est habituelle à un militaire."

Il se vit mal en "réparateur de pauvres poilus que l'on va réexpédier". "Je comprends les psychoses des combattants."

Problèmes principaux : le tétanos, la tuberculose et les conséquences de l'alcoolisme.

Probablement parce qu'il est médecin, la guerre, "école de la brutalité et de la violence", "fléau sans nom, digne de l'inqualifiable méchanceté des hommes", "guerre abominable et maudite" lui fait horreur. "L'horreur de cette lutte sans but possible".  D'autant que, rapidement, on n'en voit pas l'issue rapide qui était espérée. "Désillusion quant à l'idée d'une victoire rapide".Il dénonce donc, dans son carnet intime,  "la monstruosité de cette guerre abominable". "Il est douloureux, malgré l'accoutumance professionnelle, de voir mourir des hommes jeunes et plein de vie, frappés brutalement par la plus monstrueuse des iniquités humaines qu'est la guerre."

"Il n'y a plus rien à attendre d'une humanité aussi barbare, et je vois l'inanité de mes rêves de progrès."

Bien que fils de militaire gradé, il est devenu anti-militariste : "malveillant et borné comme le sont les militaires surtout de grade élevé." "Désillusion et colère croissante à l'égard de la caste des officiers supérieurs de carrière, leur morgue, leur absence de clairvoyance, leur incompétence, leur bêtise, leur inhumanité à l'égard des poilus." "Ce n'est pas une comparaison flatteuse que d'être assimilé à un militaire.""Je me sens de moins en moins militaire, à mesure que je connais mieux l'esprit qui règne dans l'armée, je suis arrivé sans parti pris à l'armée et j'en partirai nettement anti-militariste."

"Il ne faut pas demander de logique à une administration, surtout militaire." "une conduite logique serait incompatible avec l'administration militaire."

Comme l'écrit Jacques Gélis : "il témoigne de l'évolution de l'esprit public dans le pays au cours de l'année 1915, le désarroi qui gagne les Français. la désillusion de René de Saint-Périer étant à la hauteur des espérances qu'il avait mises dans le succès des armées françaises."

 

 

 

 

08:35 Publié dans histoire | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : histoire