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10/02/2011

Tunisie : incertitudes

La lutte contre la corruption

 

Le président de la commission "d'établissement des faits sur les affaires de malversation et de corruption" est, lui aussi,  unanimement respecté. Ce qui ne semble pas être le cas de tous les membres de sa commission.

Il dit avoir reçu "carte blanche" du gouvernement intérimaire, et tous les moyens requis, y compris informatiques.

Il a reçu 800 dossiers en trois jours et le "n° vert" mis en place est saturé.

Tous les corps administratifs ont l'obligation de transmettre les dossiers.

La commission disposera d'experts dans les domaines fiscal, financier, douanier et immobilier.

Elle va s'appuyer sur la Convention de l'ONU de 2003 contre la corruption.

Quand les faits seront avérés, les dossiers seront transmis au parquet.

La formation de juges spécialisés est souhaitée.

 

Conclusion du président de la commission : "Que Dieu nous aide dans ce grand bazar !"

 

 

Les "acteurs du changement politique"

 

Le mouvement des jeunes qui ont marché sur Tunis et obtenu le départ de Ben Ali avait pour slogan "Dignité - Liberté- Travail", avec un "ras-le-bol" contre un régime méprisant ne leur offrant aucune perspective d'avenir, malgré leurs formations.

Nous n'avons malheureusement rencontré aucun d'entre eux.

Personne ne se présente comme leur représentant, et les responsables de la "société civile" ou des partis politiques que nous avons rencontrés en nombre ne prétendent pas l'être.

Le "Conseil National pour les Libertés" (ONG) s'efforce d'organiser une convergence entre les "résistants" et les "vainqueurs", ce qui prouve bien qu'il n'existe pas de liens entre les uns et les autres.

 

Comme l'a dit le représentant du "Congrès pour la République" : "le peuple a été plus vite que l'opposition".

 

Personne ne semble craindre un danger islamiste.

Les responsables du parti Ennadha considère que leur islam politique s'inscrit dans le cadre d'une société pluraliste et libre et d'un Etat laïc, comme en Turquie, même s'il n'est pas question pour eux d'imiter des modèles étrangers, ni turc ni, encore moins iranien.

Pour eux la laïcité est la stricte neutralité de l'Etat, "pas comme en France où l'Etat intervient dans les affaires religieuses".

Il n'est pas question de remettre en cause l'égalité hommes/femmes.

Leur parti n'est pas théocratique et ils sont contre une dictature au nom de Dieu ou de l'islam.

Ils font le parallèle avec les partis démocrates-chrétiens.

Ils sont contre le terrorisme de groupuscule au nom de Dieu, mais également contre le terrorisme d'Etat.

Ils demandent si l'Union européenne est prête à accepter le choix du peuple s'ils obtiennent démocratiquement une majorité ?

 

 

Dans quels délais ?

 

Tout le monde est unanime pour considérer que le délai constitutionnel de deux mois pour tenir une élection présidentielle est impossible.

 

C'est pour un an que le Parlement devrait donner pouvoir aux Président et gouvernement intérimaires de légiférer par décrets.

 

Personne ne semble se formaliser sur le délai annoncé, de plus ou moins six mois,  tant les forces politiques doivent avoir le temps de s'organiser.

 

Seuls les ambassadeurs des pays de l'UE nous ont parlé de l'attente d'un échéancier.

L'ambassadeur danois, considérant qu'il n'y a pas de démocratie sans partis politiques, suggère une aide des "familles" politiques européennes à leurs partenaires tunisiens.

 

 

Les incertitudes sécuritaires

 

Des incidents violents continuent à se produire.

Certaines entreprises sont victimes de racket.

Tous nos interlocuteurs incriminent des éléments de la police de l'ancien régime voulant semer le trouble.

Aujourd'hui, le maintien de l'ordre est d'abord de la responsabilité de l'armée, et la coordination générale est placée sous les ordres du chef d'état major de l'armée (celui qui refusé de tirer sur les manifestants et a obligé Ben Ali à partir), avec l'accord du ministre de la justice.

 

Une aide de l'UE à la réforme des forces de sécurité a été évoquée, en particulier pour les former au respect des droits humains.

 

Toutes les zones touristiques sont l'objet d'une vigilance particulière.

08:40 Publié dans Voyage | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : voyages, tunisie

09/02/2011

Tunsie : transition vers la démocratie

Le maintien des structures de l'Etat

 

Bien entendu tous les opposants à l'ancien régime font remarquer que toutes les structures restent en place,  et protestent contre la nomination de Gouverneurs de province tous issus de l'ancien régime.

Les ministres ont changé, les responsables administratifs des ministères sont demeurés en poste. Ce qui provoque quelques rancœurs. Même si tous affirment ne pas avoir d'esprit de revanche, certains demandent un "nettoyage".

"Le dictateur est parti, le système est resté" (Ben Jaafar).

"La dictature demeure" (Hamma Hammami)

 

 

Une force de proposition : la commission des réformes politiques

 

Comme pour les deux autres commissions, la mise en place est en train de se faire.

 

Le président de cette commission, Iyad Ben Achour, frère de la présidente de l'association des femmes démocrates, universitaire,   est unanimement respecté.

 

La commission, composée essentiellement de juristes,  va commencer par faire des propositions concernant la suppression de toutes les lois anti-démocratiques.

 

Dans la perspective des élections, la commission fera des propositions concernant le code électoral, la création d'une "Commission électorale indépendante", l'organisation de la campagne électorale, etc.

La commission fera également des propositions dans les domaines des libertés d'expression, d'association et politiques.

 

Le président de la commission a annoncé des rencontres bihebdomadaires avec la "société civile" afin de prendre note des demandes et suggestions.  

 

Le "Conseil des Libertés", l'"association des avocats" et le "Parti de la gauche moderne" critiquent la mise en place de ces commissions.

Plusieurs associations font remarquer que c'est Ben Ali, avant de partir,  qui en a décidé la création.

 

 

Un point sensible : la justice et les droits de l'Homme

 

Le gouvernement provisoire a donné des signes positifs, en particulier en adoptant quatre protocoles internationaux, dont les Conventions contre la torture et la protection des personnes contre les disparitions forcées, et le Statut de la Cour Pénale Internationale, ainsi qu'un projet de loi d'amnistie politique et de libération conditionnelle des prisonniers de conscience en attendant leur réhabilitation.

 

Toutes les organisations de défense des Droits de l'Homme, et "l'Association des magistrats",  insistent sur l'indépendance de la justice, qui doit être garantie par un Conseil Supérieur de la Magistrature indépendant du pouvoir politique, et par le statut des magistrats.

Le ministre de la justice en est d'accord.

L'association des magistrats demande des mesures de lutte contre la corruption au sein de la magistrature.

Les magistrats sanctionnés par le pouvoir précédent ont été réhabilités.

Comme le constate le Président du "Parti de la gauche moderne" : "les gendarmes se sont révoltés, pas les juges !"

14 tribunaux ont été incendiés. Par des provocateurs ?

Le programme "justice" de l'UE pourrait enfin être mis en place.

 

La commission d'"établissement des faits sur les abus", présidée par l'ancien président de la Ligue des droits de l'Homme,  comme les deux autres se met en place. Nous avons vu des dizaines de personnes faire la file pour venir témoigner.

La commission a un droit de convocation, mais n'est pas un tribunal.

Elle souhaite constituer des archives et remonter dans le temps.

 

La création d'une commission "Vérité, justice, réconciliation" a  été évoquée.

 

La disparition de la police politique est unanimement réclamée.

 

Le droit des femmes est, pour tous,  la "ligne rouge" à ne pas franchir, et même à améliorer. (à suivre)

08:37 Publié dans Voyage | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : voyages, tunisie

08/02/2011

Retour de Tunisie

Une page de l'Histoire de la démocratie en train de s'écrire

 

  

Une transition légaliste vers la démocratie.

 

La position du Premier ministre, qui tire sa légitimité de la Constitution actuelle, mais aussi celle de la grande majorité de nos interlocuteurs, est de se tenir le plus près possible de la Constitution actuelle, dont tout le monde, pourtant, souligne les incompatibilités avec l'organisation d'élections libres et démocratiques.

La centrale syndicale UGTT a également adopté cette position,  après un débat interne.

 

Seul le Parti communiste demande la tenue d'une "Conférence nationale", sur le modèle de ce qui a été fait dans plusieurs pays africains.

Il propose que  cette Conférence nomme un gouvernement provisoire d'union nationale organisant la transition.

 

Tous nos autres interlocuteurs acceptent le gouvernement intérimaire nommé par le Premier ministre.

Pour Nejib Chebbi, grande figure de l'opposition, et nouveau ministre, ce gouvernement intérimaire est l'alliance des réformateurs de l'ancien régime et d'une partie de la "société civile" qui veut participer à la transition vers la démocratie car "tout est à construire".

 

 

L'inconvénient de "coller" à la Constitution

 

Même si toutes les dispositions anti-démocratiques de l'actuelle Constitution étaient "oubliées", un inconvénient majeur demeurerait : les premières élections démocratiques seraient présidentielles, ce qui ne peut pas être sans influence sur le type de système politique qui suivra.

Pour le Premier ministre intérimaire, comme pour le Président de la commission des réformes, ou Nejib Chebbi,  ce sera au Président élu de décider s'il convoque une assemblée constituante ou s'il propose,  par référendum,  une nouvelle Constitution (qui pourrait avoir été préparée par la commission des réformes politiques).

Une seule certitude : le gouvernement intérimaire a demandé à l'ONU et à l'Union européenne de l'assister pour préparer, et financer,  les élections.

 

 

Pas de contre-pouvoir

 

Nous n'avons rencontré aucun parlementaire, et peu de nos interlocuteurs ont fait référence à leur existence, tant ils semblent illégitimes.

 

Cette semaine, le Parlement, qui dans un système démocratique est le contre-pouvoir de l'exécutif,  sera réuni pour qu'il donne le droit au Premier ministre et au Président,  de gouverner par "décrets-lois", ce que la Constitution permet, pour six mois.

 

Seule une minorité invoque "la légitimité révolutionnaire" pour exercer un contre-pouvoir face à ce gouvernement,  à la légitimité faible.  La centrale syndicale UGTT et l'association des avocats proposent, comme Mustapha Ben Jaafar, opposant historique,   la création d'un "Comité de sauvegarde de la révolution", dont la composition n'a pas été arrêtée, mais qui pourrait, en plus de son rôle de contre-pouvoir, préparer une nouvelle Constitution.

Le paradoxe de "l'association des avocats", juristes invétérés, est de demander que ce "Comité de sauvegarde de la révolution" soit créé par un "décret-loi" du gouvernement provisoire...

 

De nombreuses associations, dont la Ligue des Droits de l'Homme,  refusent ce qui pourrait rappeler le "Comité de salut public" de la Révolution française, conduisant à la Terreur ou aux "gardiens de la révolution".

 

La Ligue des Droits de l'Homme considère que c'est à la "société civile" d'être ce contre-pouvoir vigilant ("pas besoin d'un "Comité pour cela!").

 

Des propositions sont faites pour la création d'un "Comité des sages".

 

Tout le monde considère que la seule légitimité est celle du suffrage universel.

La majorité, légaliste,  considère qu'une légitimité juridique doit  persister en attendant que celui-ci se prononce. (à suivre)

08:36 Publié dans Voyage | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : voyages, tunisie

04/12/2010

Petite histoire congolaise

Quelques cartes postales à envoyer.

L'hôtel, pourtant très cher, refuse de s'en occuper.

Impossible d'aller à la poste en partant à 7 heures et demie le matin et en rentrant largement après l'heure de fermeture des bureaux.

Ce matin, je peux me permettre de prendre le bus de 8 heures 30. Je demande donc où se trouve la poste. A 150 mètres, mais, même en plein jour et en plein centre ville,  l'hôtel me confie aux bons soins d'un accompagnateur.

Après quelques minutes de marche, nous arrivons à la poste, ouverte, mais sans personne derrière les guichets. Un panneau indique très lisiblement que l'ouverture est à 8 heures, même le samedi.

Un gardien nous renseigne : "la poste ouvre à 8 heures, mais les guichetiers arrivent à 9 heures..."

 

14:42 Publié dans Voyage | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : voyages

01/11/2010

Pas de téquila à Taquile

Facile de comprendre pourquoi cela s'appelle "l'altiplano" : c'est en altitude, et c'est plat : une plaine avec des montagnes enneigées autour.

A 3 800 mètres, l'air est pur autour du lac Titicaca ("le puma gris"), et la seule industrie ici est le tourisme. Mon guide m'explique que c'est au fond du lac que repose le monde englouti de l'Atlantide, et que son peuple, les Aymaras, en sont les survivants. Ne voulant pas me facher avec lui, je ne lui répond pas que les Basques et les Canariens m'ont déjà raconté la même histoire...

A terre, il faut beau et chaud. Comme la veille au Machu Picchu j'ai évité la pluie matinale et automnale. Sur le lac, véritable mer intérieure, les vagues sont des clapotis, mais au bout d'un moment je rentre à l'intérieur du bateau : la brise de mer est trop fraîche !

Sur l'île de Taquile m'attend l'épreuve pendant laquelle je vais payer la fatigue et les réveils au milieu de la nuit : 500 mètres de pente très très raide. A une telle altitude, sans entraînement,  le rythme cardiaque s'emballe vite et le souffle se fait très court, même en faisant de tout petit pas. Pire que le Golgotha, sans la croix, mais avec moins de stations. Les habitants de l'île remontent à dos d'hommes, de femmes et d'enfants tout ce dont ils ont besoin et que les bâteaux leur ont amené. J'ai même vu un homme avec une armoire sur son dos. Ils ont beau être habitués, eux aussi souffrent dans la montée. Pas d'ânes, pas de lamas, pas de brouettes. Je sais que les Incas ne connaissaient pas la roue, mais depuis ? Autre problème que connaissent bien tous les insulaires : tout ce qui vient de la terre ferme coûte plus cher, puisqu'il faut payer le passage en bâteau. Est-ce pour cela qu'ils et elles gardent leurs habits traditionnels ? Ou pour se distinguer des Aymaras, majoritaires sur la terre ferme ?

En haut la récompense : une vue magnifique sur le lac et les montagnes alentour, et le repas frugal au restaurant communal ouvert en 2007 : soupe au quinoa, truite du lac et "maté de coca" : les feuilles de coca en infusion, breuvage réputé pour améliiorer la respiration en altitude et vaincre la fatigue. Dans la salle de la coopérative, qui ressemble plus à un hangard qu'à une boutique, s'aligne des bonnets tricotés, sans originalité. J'entends des touristes dirent qu'ils sont plus chers qu'ailleurs (une dizaine d'euros). Je décide donc d'attendre une meilleure occasion.

Fujimori a été le seul Président péruvien a venir sur l'île : il a fait installer des toilettes et des panneaux solaires. Il est aujourd'hui en prison, pour malversations et atteintes aux droits humains, mais les habitants de l'île n'en ont cure : ils considèrent tous les politiciens comme corrompus et ne detestent pas les dirigeants énergiques. La fille de Fujimori, Keiko, candidate à l'élection présidentielle de l'année prochaine vient de faire une tournée triomphale dans la région qui, de plus, est peuplée de nombreux descendants d'immigrés asiatiques. 

Cap sur les îles flottantes. Bien avant l'arrivée des Espagnols, les Uros ont fui les Incas qui réduisaient les autres peuples en esclavage. Ils ont construit de grands bâteaux en roseaux, avec de petites maisons en roseaux dessus. Puis ils ont coupé les racines des roseaux, rajouté des tiges de roseaux, trouvé la techniques pour assembler de petites îles flottantes. Aujourd'hui les Uros, et leur langue, ont disparu, mais il y a toujours des îles flottantes, avec des maisons en roseaux dessus, et des gens qui n'ont plus le droit de chasser ni de pecher, parce que le lac a été déclaré "réserve naturelle", et qui vivent donc de petit artisanat répétitif,  qu'ils vendent aux touristes.

 Avant de nous séparer,  mon guide me dit sa fatigue de faire tous les jours le même trajet, alors qu'il aimerait faire découvrir bien d'autres aspects de sa région. Je le comprends. Je suis au Pérou depuis moins de trois jours et je suis gavé de flutte andine que l'on se croit obligé d'offrir aux touristes en permanence.

 

14:29 Publié dans Voyage | Lien permanent | Commentaires (4)