22/06/2011
le roman de Liliane Bettencourt
Un milliard de secrets
Marie-France Etchegoin
Editions Robert Laffont
Un milliard, c'est la somme offerte par Madame Liliane Bettencourt à son ami François-Marie Banier. "Le fric-frac du siècle dans le temple du capitalisme français". "Les gens s'ennuient tant qu'ils acceptent presque tout si on les divertit". François-Marie avait, avant de connaître la femme la plus riche de France, déjà profité des largesses de deux autres vieilles dames très riches.
J'avais peu lu les articles de journaux concernant cette affaire, considérant que ce monde n'était décidément pas le mien. Ce monde de femmes, qui ont pour mérite principal d'être des héritières, des rentières, ayant une idée toute relative de la valeur du travail et de l'argent. "Travaillez plus pour gagner plus". Cela a du amuser Liliane quand elle finançait, légalement et illégalement, la campagne du petit Nicolas de Neuilly.
"La milliardaire incarne jusqu'à la caricature l'ordre bourgeois, la droite capitaliste, les dynasties industrielles construites entre les deux guerres et compromises sous l'Occupation".
"Elles n'ont rien construit. Tour leur a été donné". "L'argent est là, comme l'air que l'on respire".
Le mari n'a pas d'objection : François-Marie est un homosexuel notoire. Madame Bettencourt fait ce qu'elle veut de sa fortune, qu'elle ne dilapide pas. "Chaque jour, l'héritière, ou plutôt la rentière, empoche près de 14 millions d'euros". Elle peut bien en distribuer un peu..."Elle peut s'offrir, si cela lui chante, un artiste. Ami, homme de compagnie, confident...qu'importe le statut."
Pour son argent de poche, et pour s'occuper, André Bettencourt mène sa carrière politique. Il est souvent ministre. Il est peu présent au domicile conjugal. Contrairement à son épouse il n'a pas de fortune personnelle. Seulement un grand manoir de quatorze pièces dans sa circonscription de Normandie.
Ce livre d'une journaliste du Nouvel Observateur se lit comme un roman, qu'il aurait pu être si un écrivain avait eu assez d'imagination. Balzac est celui qui me vient à l'esprit. Marie-France Etchegoin fait souvent référence à Mauriac. "Observation de vies minuscules et de vices majuscules". "A travers le trou de la serrure : la vie des riches dans le ghetto de Neuilly". "Les jeux de l'amour et du pouvoir, la comédie de l'argent et du mensonge". Mais il y a également "un thriller sur les luttes au couteau dans les multinationales". Et "les incestueuses relations du pouvoir et de la fortune". Entre l'argent et la politique. Entre la politique et la "justice". Eric Woerth et son épouse, victimes expiatoires, y perdront leur emploi.
Au centre, il y a "l'obsession du complot et de l'argent", l'argent, "qui corrompt jusqu'au cœur des hommes" (et des femmes !). Et la guerre des clans pour s'en approprier la plus grande part. Les ressentiments. "Les universelles rancœurs familiales et éternelles questions d'héritage". Décuplées par les sommes impliquées.
Mais, "toute ressemblance avec des individus existant ou ayant existé n'est en rien fortuite. Rien n'est inventé !".
08:42 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature
18/06/2011
Le Président a disparu : le Poulpe le recherche !
La vacance du petit Nicolas
Le poulpe
Pierre Cherruau et Renaud Dely
Editions de la Baleine
"Toute ressemblance avec des faits réels, des personnes vivantes ou ayant vécu, ne serait que le fruit du hasard".
Il est certain que "le Poulpe" est un personnage de fiction. Il a même la particularité de vivre des aventures romanesques écrites par des auteurs différents.
Cette fois ci, il s'agit d'un auteur de romans policiers (dont, déjà, une aventure du Poulpe) et d'un journaliste politique.
Tous les autres personnages sont des caricatures de responsables politiques, bien connus, que Le Poulpe est amené à rencontrer dans son enquête pour retrouver le Président de la République qui, lui même, "le nain de Neuilly", "le Conducator de l'Elysée", n'est pas épargné, "avec ses yeux de maquignon de comice agricole", "son attitude de comédien de série B" qui "refaisait son coup du "est-ce que vous trouvez ça normal ?".
Le lecteur croise donc "le visage d'honnête homme d'Eric Woerth", "le regard de mutant de Brice Hortefeux, "l'illuminée du Poitou", "le Che Guevarra des PTT", Faurisson et "sa voix nasillarde. Forcément nasillarde", "Titine", "pas du genre à laisser sa part à la cantine, souriante comme une porte de prison, un air de mère matonne à faire régner la terreur dans les cours de promenade. On se serait cru au parloir. C'était le Bureau national du PS !", chez DSK "un piano, à queue, évidemment" (c'était avant l'aventure du Sofitel...), "Nanard", "un gars capable de braquer 350 millions d'euros dans les caisses du Lyonnais et d'en ressortir avec les félicitations du jury et la compassion du public pour "préjudice moral", jamais vu", et quelques autres...
Jubilatoire !
08:43 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature
12/06/2011
100 photos de René Burri
100 photos pour la liberté de la presse
René Burri
Au profit de "Reporters sans frontières"
100 photos du Suisse René Burri, qui a commencé sa carrière de photographe en 1946.
La majorité des photos présentées sont en noir et blanc et ont été prises lorsque Burri travaillait pour la fameuse agence Magnum.
La photo de couverture est un célèbre portrait de "Che" Guevarra. Ce qui est amusant quand ont connaît les dénonciations de "Reporters sans frontières" à l'encontre du régime cubain.
Autre portrait célèbre : celui de Picasso.
Beaucoup de scène de rues dans cet album, à commencer par La Havane, mais aussi l'Argentine, l'Egypte, le Vietnam, Chicago, Berlin et son mur.
Beaucoup de formes géométriques pour mettre en valeur l'architecture de Brasilia, et celle de Le Corbusier.
"Les images sont comme les taxis aux heures de pointe..." (René Burri)
08:33 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : photos
11/06/2011
Le Chili de Pinochet n'est pas mort
L’obscure mémoire des armes
Ramon Diaz-Eterovic
Editions Métaillé noir
La dernière aventure du détective privé Heredia. J’ai déjà parlé sur ce blog de « La couleur de la peau ». Heredia est un détective littéraire, qui complète ses maigres revenus en écrivant des résumés de livres. « On doit constamment être saoul d’écriture pour ne pas être détruit par la réalité » (Ray Bradbury). Il vit avec un chat philosophe baptisé « Simenon ». Avec lui, il ne peut être question d’une banale enquête. « Chercher la trace cachée, la vérité derrière les apparences »
« L’obscure mémoire des armes » nous parle de la période de la dictature militaire au Chili. Personne n’a oublié Pinochet. « Je ne crois pas les hypocrites qui prétendent ne pas avoir su ou ceux qui disaient être enfermés dans une bulle qui les empêchait de voir ce qui se passait ». Amnistie et donc impunité ? Le débat faisait encore rage il y a deux semaines quand j’étais en Uruguay. Droit des victimes à la vengeance, si la justice ne passe pas ? « La vérité et la justice suivent parfois des chemins opposés ». Les anciens tortionnaires continuent-ils à commanditer des meurtres pour effacer leurs traces ? Sont-ils réellement devenus inactifs et inoffensifs ?
« Le courage consiste à dire ou faire quelque chose au moment opportun. Le reste n’est que remords ou compromissions »
« La politique, la sociologie, l’économie et autres sciences occultes prétendent expliquer le comportement erratique de l’homme depuis ses premiers pas sur la terre »
« Le poids des ans pèse comme une condamnation à l’heure de chercher un emploi »
« L’heure est venue, je suppose, de commencer à vivre de souvenirs »
« On ne peut échapper aux pressions de la mémoire. Tôt ou tard, que ça plaise ou non, on doit se rendre au rendez-vous qu’elle nous impose »
« Tout ce qui vaut la peine d’être consommé a une charmante odeur de cholestérol »
« Même les chats les plus farouches ont besoin d’une caresse de temps en temps »
« Un livre, un bon lit, une table bien garnie, une musique pour vous caresser les oreilles »
« La vie : sans doutes et sans mystères, elle ne serait qu’une succession de jours monotones »
08:24 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature
09/06/2011
des primaires qui ont un sens
L'Uruguay gouverné à gauche
Problèmes d'Amérique latine n°74
Editions Choiseul
Regroupant toutes les forces de gauche, depuis le centre gauche jusqu'à ceux qui veulent changer le monde, le Frente Amplio (le "front large"), avec les Présidents Tabaré Vazquez puis Mujica, mène une politique délibérément réformiste et résolument progressiste, en s'appuyant sur l'exemple du "battlisme" du début du XXe siècle : la priorité a été donnée au travail qualifié et, pour cela, le budget de l'éducation a été doublé et un plan d'accès universel à l'informatique mis en place."Il faut livrer bataille pour que les gens apprennent à apprendre tout au long de leur vie".
Une taxe progressive et directe a été instaurée sur les hauts revenus et un "Système national intégré de santé" a été créé, permettant l'accès universel aux soins.
"Le problème de la pauvreté, auparavant perçu comme un "problème des pauvres, à résoudre par les pauvres" est devenu celui de la société dans son ensemble".
La taxe sur les entreprises a été différenciée : diminuée si les bénéfices sont investis dans la recherche et l'appareil productif.
Les gouvernements du Frente Amplio ont fortifié l'Etat dans son rôle de régulateur et mis un terme au processus lent et graduel de dérégulation et de libéralisation de l'économie, tout en protégeant et renforçant les organisations syndicales, par exemple en rendant obligatoire les négociations salariales, y compris pour les ouvriers agricoles.
Cela n'a pas fait fuir les capitaux, au contraire, puisque l'investissement a battu des records historiques, ce qui permet à l'économie de sortir du secteur primaire.
Les Tupmaros, dont est issu le président Mujica, est la seule guérilla d'Amérique du Sud qui a réussi, après sa défaite militaire, à se transformer en parti de gouvernement, sans pour autant renier son passé, et à proposer, en alliance avec les socialistes et les communistes, une alternative électorale crédible. Reconversion probablement rendue plus facile par le fait que les Tupamaros n'ont jamais eu recours au terrorisme.
Ce "Front Large" s'est constitué non pas à travers des discussions théoriques mais grâce à la participation à des actions communes.
Toutes les sensibilités de la gauche participent aux "primaires ouvertes" organisées pour désigner les candidats, mais seul le vainqueur de ces primaires se présente aux élections, ce qui donne tout son sens à l'opération.
08:35 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : politique