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20/12/2008

les îles heureuses d'Océanie

Les îles heureuses d'Océanie

 

Le Pacifique à la pagaie

 

Paul Theroux

 

Editions Grasset

 

 

Paul Theroux est un écrivain voyageur.

Après plusieurs récits ferroviaires, il abandonne les chemins de fer pour nous conter son voyage en Océanie. Un long voyage solitaire,  après la rupture de son mariage. Sans vouloir tout dévoiler, soyez rassuré(e)s : à la fin du voyage, et du livre, il retrouve l'Amour !

 

"Dieu bénisse ces îles rêveuses

Dieu bénisse ces justes républiques

Qui donnent à l'homme un refuge" (Rudyard Kipling).

 

Le sous-titre "le Pacifique à la pagaie" est un peu exagéré. L'auteur utilise,  pour voyager,  avions et bateaux, mais il voyage avec un kayak pliant qui lui permet d'aller dans des endroits  isolés, là où les touristes ne vont généralement pas.

 

J'ai retrouvé, avec plaisir, l'évocation de pays que je ne connais que superficiellement, pour y avoir posé mes valises quelques jours, sans kayak et sans pagaie :

 

La Papouasie-Nouvelle-Guinée, et le problème de Bougainville dont les habitants souhaitent leur indépendance (un référendum est prévu, entre 2015 et 2020,  à une date indéterminée...) parce qu'ils souffrent de la pollution venant de l'exploitation des mines de cuivre, sans en toucher les dividendes. Les Australiens, lassés par la guérilla, ont fermé les mines...

 

Les îles Salomon, "les îles les plus sauvages du Pacifique",  dont la capitale, Honiara, est "si pauvre, vétuste, délabrée et incroyablement sale" ; "le sentiment que le monde est ailleurs".

"Si j'étais roi, le pire châtiment que je pourrais infliger à mes ennemis serait de les bannir dans les Salomon" (Jack London).

 

Vanuatu : "le cannibalisme fût un privilège réservé aux chefs et aux nobles" ; "les mangeurs d'hommes du Pacifique ont tous évolué, ou peut-être dégénéré, en mangeurs de jambon en boîte".

Comme Tabani et Le Clézio (voir mes notes sur leurs livres), il évoque le personnage mythique de John Frum et les "mythes du cargo" qui promettaient qu'un cargo apporterait la prospérité. "John Frum est revenu sous la forme du développement et du progrès".

 

Fidji : corruption politique, coups d'Etat militaires,  peur raciale, et tourisme : "Que l'on soit capable d'imaginer qu'une race fière de son passé cannibale, puisse exceller dans la fabrication des saladiers, n'est pas seulement un mystère culturel, mais la preuve que les touristes croiront n'importe quoi tant qu'ils auront de l'argent".

Les Fidjiens sont aujourd'hui, en particulier en Irak, "de parfaits mercenaires".

 

Deux communautés face et face, et qui depuis un siècle ne se mélangent pas ("il n'existe entre eux ni entente, ni mariage") : les Fidjiens d'origine, qui possèdent la terre, et renégocient durement les baux accordés, il y a 99 ans,  par leurs ancêtres aux Fidjiens venus d'Inde, "importés" par les Britanniques pour cultiver la canne à sucre, qui ne paie plus aujourd'hui, puisque l'Union européenne n'en garantit plus le prix. Fidjiens indiens qui, en plus de la canne à sucre, s'étaient spécialisés dans le commerce. Commerces pillés à chaque coup d'Etat. Fidjiens d'origine indienne qui aujourd'hui partent dès qu'ils le peuvent vers la Nouvelle Zélande ou l'Australie. 

Ils ne sont pas les seuls : "Il y a plus de Polynésiens à Auckland que dans toute autre ville".

 

Les îles Cook, où cohabitent toutes les "Eglises" imaginables, des mormons aux Adventistes, en passant par les témoins de Jéhovah,  et sur l'atoll d'Aitutaki, où il n'y a "ni chien ni voiture", la poste d'Aruntanga, où le postier m'a conseillé de prendre avec moi les cartes postales qu'il venait d'oblitérer, les collectionneurs étant friands de ces raretés.

 

 

"Le Pacifique fut évalué et pillé par le missionnaire, le marchand et le planteur, souvent la même personne".

 

"Tant d'explorateurs, de voyageurs et de touristes qui ont voulu inventer le Pacifique et en faire un paradis. Le nom même de Pacifique est un leurre".

 

08:00 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature, océanie

13/12/2008

Raga

Raga

 

Approche du continent invisible

 

J.M.G. Le Clézio

 

Prix Nobel de littérature

 

Points n° P1798

 

"L'Océanie, c'est le continent invisible".

 

Le Clézio raconte son voyage à Vanuatu, en 2005, plus spécialement à Raga, ancien nom de l'île de Pentecôte ("L'île  des pentes et des côtes"). A quelques kilomètres, et à des années lumière, de Port Vila, la capitale où je me trouvais la semaine dernière.

 

"Un continent fait de mer plutôt que de terre".

"Le continent de rêve". Mais Le Clézio cite Henri Michaux : "Nous ne sommes pas un siècle à paradis". Et il dénonce les "envahisseurs", les "fourre-tout du rêve", "le rendez-vous des prédateurs",  "les vahinés de quatorze ans mariées à Gauguin". "La réalité est dans le viol des corps et des consciences, et dans les révoltes qui s'ensuivent".

 

"L'invention des outils néolithiques qui eut pour conséquence une brutale augmentation de la population, et de ce fait, une nécessité de terres nouvelles". "La plus téméraire odyssée maritime de tous les temps".

"La plupart des sites d'habitation des premiers hommes ont été à l'intérieur des terres. Sur la côte règnent les tempêtes, la peur des invasions, les fièvres, les moustiques".

 

En 1800, il y avait environ un million d'habitants dans l'archipel. En 1935, il n'y en avait plus que 35.000.

Le "blackbirding" s'est développé au moment où la guerre de sécession a marqué l'arrêt de la "traite" avec l'Afrique." "Les habitants étaient kidnappés pour être revendus sur les plantations de coton ou de canne à sucre, en Australie, aux Fidji, ou dans les mines de nickel de la Nouvelle Calédonie.

"La mondialisation c'est sans doute, avant tout, celle des épidémies."

 

"Bougainville, qui donne à l'archipel le doux nom de "Grandes Cyclades", puis Cook qui le baptise du triste nom de Nouvelles Hébrides, en souvenir de son pays natal."

 

"La terre n'est pas une propriété mais un accord mystique passé entre les hommes du lieu et les esprits des ancêtres." "Ceux qui possèdent les îles sont ceux qui les ont nourries de leur sueur et de leur sang".

 

"Les sociétés des grands socles continentaux, malgré leurs religions "révélées" et le caractère soi-disant universel de leurs démocratie, ont failli à leur tâche et nié les principes mêmes sur lesquels elles s'étaient établies. L'esclavage, la conquête, la colonisation et les guerres à l'échelle mondiale ont mis en évidence cette faillite".

 

"Cet ancien continent qui n'était invisible que parce que nous étions aveugles".

08:00 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature

11/12/2008

Vanuatu ("notre pays")

Les pouvoirs de la coutume à Vanuatu

 

Traditionalisme et édification nationale

 

Marc Kurt Tabani

 

Editions L'Harmattan

Collection "connaissance des hommes"

 

 

A Vanuatu,  d'où je reviens, et qui s'appelait avant "Les Nouvelles Hébrides", la coutume, la "kastom" comme on dit là bas en "pidgin", est toujours très importante.

 

Probablement parce qu'elle est un des signes tangibles de l'indépendance. "Elle sert aux Mélanésiens à se démarquer radicalement de la culture des Européens" ; "la transformation de survivances culturelles en des symboles identitaires ; servant à "souligner la différence entre nous et les autres".

 

Elle a été utilisée comme telle par la classe dominante autochtone, occidentalisée,  mais qui veut montrer qu'elle reste proche du "peuple" ; "la légitimation d'élites nationales au moyen de l'illusion d'une continuité politique avec un passé ancien ou d'une pseudo-contestation des valeurs occidentales et modernes".

Ainsi ai je vu le Président de l'Assemblée nationale, ancien de l'armée française, "tuer le cochon", de façon rituelle, entouré de guerriers en armes (rudimentaires).

 

Cet attachement à des coutumes que l'on voudrait ancestrales, est "concomitant d'une modernisation accélérée" et d'un exode rural qui justifient d'autant la recherche de "traditions dont les origines se perdraient dans la nuit des temps".

 

La "République démocratique, socialiste et coutumière de Vanuatu", dont la devise est "En Dieu nous nous réalisons", a cherché, dès sa naissance, à abolir le clivage entre "kastom" et christianisme, ce qui n'était pas évident, puisque le christianisme a été apporté par les colonisateurs.

C'est pourquoi, pour le parti dominant, "la mauvaise "Kastom" est celle qui ne se réalise pas en Dieu".

"La "Kastom" devint, pour les nationalistes, une revendication dirigée contre toute interférence d'une autorité extérieure". Une façon également de "travestir la pauvreté en une glorification culturelle".

Pour la classe dominante, la "Kastom" permet d'"éviter la question du partage des richesses, en substituant au problème de l'exploitation de classe, celui de la normalisation culturelle nécessaire à l'édification nationale".

 

Dans un pays où 70% du PNB vient du tourisme, l'exotisme "traditionnel" est devenu,  pour l'extérieur, un argument de vente. Pour l'amusement des touristes australiens, les autochtones abandonnent, le temps de quelques danses,  leurs jeans et leurs T-shirts, éteignent, ou non, leurs téléphones portables pour évoquer, sans danger, leurs ancêtres anthropophages. Rêveries, et éventuellement frissons, tarifé(e)s...

 

"L'île idéale du Pacifique, je crois qu'elle doit rester un beau rêve. Le rêve en est infiniment plus beau que la réalité" (Flechter, 1923).

 

08:00 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : livre, ethnologie, voyages

07/12/2008

Sang royal

Sang royal

 

C.J. Sansom

 

Editions Belfond et "Pocket"

 

1541, York. Quelques années après les évènements décrits dans l'ouvrage précédant de l'auteur : "Dissolution". Thomas Cromwell a été disgracié. L'archevêque Crammer est le chef de l'Eglise anglicane (après le Roi).

 

Pour celles et ceux qui ont vu la série "les Tudor" sur Canal +, l'action se passe quelques années plus tard : Ann Boleyn a été décapitée, la princesse de Clèves répudiée sans que le mariage n'ait été consommé, Jane Seymour est morte en couches, et le roi Henri VIII, vieillissant, est remarié avec une gamine : Catherine Howard, qui ne sera pas  sa dernière épouse.

L'action se passe également quelques années auparavant, au moment de la "guerre des deux roses", entre les York et les Plantagenêt.

La question est de savoir si Edouard IV, grand-père d'Henri VIII, est bien le fils de son père, ou s'il est un batard.

Aujourd'hui l'ADN pourrait nous donner la réponse, mais dans ce temps là, il fallait s'en remettre aux confessions tardives, couchées sur de vieux parchemins dont la détention pouvait valoir la mort.

La question est importante puisque la querelle religieuse n'est pas éteinte, et il faut du "sang royal" (d'où le titre du livre), pour être un monarque de "droit divin", supérieur au Pape sur les questions religieuses, "Chef suprême de l'Eglise d'Angleterre, Défenseur de la Foi et représentant de Dieu en Angleterre", titre que sa Gracieuse Majesté Elisabeth II porte toujours.

 

Matthew Shardlake, l'avocat bossu de "Dissolution" enquête,  au péril de sa vie.

 

 

Extraits :

 

"Tu ne peux pas espérer que la politique soit logique"

"La politique est un jeu cruel".

"Depuis quand la justice est-elle séparée de la politique ?"

"Ceux qui détiennent le pouvoir ne le lâchent pas de bon gré"

"Chaque fois que j'étais malheureux, j'avais toujours pu m'échapper dans le monde des livres"

"La royauté est indispensable, c'est la clé de voûte de l'ordre social ; sans elle tout s'effondrerait" (c'est ce qui se dit en Belgique aujourd'hui...)

"La reine Catherine (d'Aragon) à 40 ans n'avait pas donné de rejeton mâle au roi et ne pouvait plus avoir d'enfants. S'il n'épousait pas une jeune femme susceptible de lui donner un héritier, la dynastie des Tudor s'éteindrait. Le Pape lui même avait suggéré qu'elle se retire dans un couvent, afin que le roi puisse de nouveau convoler en justes noces. Elle a précisément suscité la révolution religieuse qu'elle craignait et honnissait".

08:00 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littrature

06/12/2008

millénium 2

La fille qui rêvait d'un bidon d'essence et d'une allumette

 

Stieg Larsson

 

Editions Actes Sud

 

 

J'avais beaucoup aimé le premier tome de Millénium, je n'ai pas été déçu par le second, que j'ai terminé avec l'envie de lire le troisième.

 

Il n'y a plus,  dans ce tome,  la dénonciation du "capitalisme casino", plusieurs années avant sa crise, mais l'auteur reprend, en l'amplifiant,  le thème des violences infligées aux femmes, y compris dans le cadre de la prostitution ("c'est un crime d'acheter des services sexuels" ; "tout le commerce du sexe n'est qu'une seule grande violation des droits humains"). En y ajoutant la dénonciation de quelques pratiques psychiatriques d'un autre âge.

Avec également, au passage,  une critique sévère, et justifiée, de l'intervention américaine à La Grenade, en 1983.

 

Un des personnages "allait à la synagogue parce qu'il cherchait la compagnie d'autres personnes. Les catholiques allaient à l'église parce qu'ils voulaient se trouver en paix avec Dieu". Si cela est vrai, cela ne peut être le cas qu'en dehors de l'heure des messes quand "l'église invite au silence et impose que les visiteurs soient laissés tranquilles".

 

"Les innocents, ça n'existe pas. Par contre, il existe différents degrés de responsabilité."

 

Lors d'un interminable transit dans un aéroport lointain, j'étais heureux d'avoir ce livre !

 

08:00 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature