09/10/2008
un monde sans frontières ?
L'obsession des frontières
Michel Foucher
Editions Perrin
Aussi paradoxal que cela puisse paraître, la "mondialisation", la "globalisation", n'ont pas effacé les frontières.
Au contraire : l'éclatement de l'URSS et de la Yougoslavie ont multiplié les frontières, internationalement reconnues, ou non. L'Abkhazie, l'Ossétie, le Kosovo nous montrent l'actualité de la question. Sans parler de toutes ces Nations sans Etat !
En Europe, le continent le plus morcelé de la planète, la moitié des frontières datent d'après 1945 et le quart sont postérieures à 1990.
"La frontière est d'autant plus instrumentalisée que l'Etat est récent et manque de cohésion interne". "La limite sert de lieu métaphorique à l'identité nationale".
D'autant plus que "l'accès à l'indépendance doit se payer d'une acceptation préalable de limites préexistantes".
"L'instrumentalisation des frontières fait pleinement partie du dispositif de fabrication des Nations, au même titre que la réécriture de l'Histoire."
De plus, comme l'ont bien compris Poutine, et le Président géorgien, "les bruits de bottes sur les confins fabriquent de la cohésion autour du leader".
Pour trois réunifications (Allemagne, Vietnam et Yémen), combien de kilomètres de nouvelles frontières ?
Les conflits "gelés" risquent à tout moment de ne plus l'être, puisqu'il n'y a plus de guerre "froide".
Jamais on a autant délimité, clôturé des "frontières", surtout quand elles n'en sont pas, en profitant des toutes les possibilités de l'électronique (USA, Israël, Chypre, Ulster, Cachemire, Sahara occidental, Koweït, Bengale, Botswana, etc.).
Les frontières cessent souvent d'être les lieux de rencontres et d'échanges qu'elles étaient dans l'Histoire, pour devenir des coupures, des lignes de confrontation, comme autant de "rideaux de fer".
"Les frontières se sont transformées en membranes asymétriques autorisant la sortie, mais protégeant l'entrée". Mais "la clôture est d'abord un message politique à usage interne", "au prix d'un amalgame entre migration illégale, criminalité et risques terroristes".
"L'homme moderne paie sa liberté d'aller et venir d'une surveillance accrue".
Faisant le tour du globe, n'oubliant aucun continent, aucune île, l'auteur, géographe et diplomate, Directeur du "Centre d'analyses et de prévisions" du ministère des affaires étrangères montre les réalités frontalières concrètes, pour étayer ses analyses.
Le livre se termine par différents scenarii possibles pour l'Union européenne de demain, car "nous ne pouvons pas dire où se situent les frontières de l'Europe" :
- L'Union européenne n'ayant "rien de mieux à offrir qu'elle même", tous les conflits débouchent sur des promesses de futures adhésions. "On voit mal comment l'intégration à l'Union règlera, comme par miracle, des questions nationales", mais "la valeur européenne essentielle est la résolution négociée et démocratique des différends".
- "Chaque Etat membre estime bénéfique de faciliter l'intégration de son voisin immédiat". Il faudra alors intensifier "les transferts en direction des périphéries les moins développées, de manière à réduire les écarts".
- "Pour le Caucase du Sud, le nouvel argument en faveur de l'adhésion est d'assurer la sécurité des approvisionnements énergétiques".
Le "Conseil de l'Europe", Russie comprise, compte 46 membres. N'y sont pas les Etats non encore reconnus à l'ONU, comme le Kosovo. Sans parler de l'Ossétie, de l'Abkhazie, de la Transnistrie...
08:00 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : europe, mondialisation, géopolitique
05/10/2008
Natures mortes au Vatican
Natures mortes au Vatican
Roman noir et gastronomique en Italie à la Renaissance
Suivi d'un recueil de recettes de l'époque
Michèle Barrière
Editions Agnès Viénot
Michèle Barrière est historienne, auteur, pour ARTE, de la série "Histoire en cuisine".
Son livre est un vrai roman policier qui se passe au XVIe siècle en Italie, et la cuisine y joue un rôle important.
La Renaissance, qui a commencé un siècle plus tôt, a bouleversé l'art et la vie, mais l'Inquisition veille toujours. Giordano Bruno va le payer de sa vie. "Les temps sont à la suspicion". A Genève les autorités sont "tout aussi féroces".
Le peintre Arcimboldo est au centre de l'intrigue. Arcimboldo dont les peintures, à nulles autres pareilles, ont été exposées à Paris il y a quelques mois, au musée du Luxembourg. Il réalisait la prouesse de composer des portraits dont les éléments étaient des légumes ou des fruits. "La mode est aux tableaux représentant des scènes de cuisine". "Depuis Raphaël et Michel-Ange tout a changé". "Tout doit être invention, caprice et fantaisie", sauf que, "pour lutter contre l'avancée des protestants, après que des foules menées par des pasteurs acharnés aient détruit dans les églises tous les tableaux qui, selon eux, ne sont qu'idolâtreries offensant Dieu, le Concile de Trente a émis des directives qui conçoivent la peinture comme une arme au servie de la foi. Tout doit être utile et convenable". "C'est le retour à l'ordre moral".
Un livre pour celles et ceux qui aiment les livres policiers, l'Histoire, l'Histoire de l'Art...et l'Art culinaire.
08:00 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature, histoire, cuisine, peinture
04/10/2008
Le petit prince mis en images
Le petit prince
Mise en images du texte d'Antoine de Saint-Exupéry par
Joan Sfar
Editions Gallimard, collection "Fétiche"
Cet album est une réussite totale, y compris la mise en couleurs.
Saint-Exupéry n'ayant pas écrit son texte en collaboration avec Joan Sfar. Il faut donc croire que le dessinateur, connu pour "le chat du rabbin", s'est complètement immergé et imprégné dans l'œuvre de l'écrivain.
La poésie du dessin fait mieux que s'additionner à la poésie du texte : elle la multiplie.
"Les grandes personnes sont bien étranges", elles "s'occupent de choses sérieuses", mais "ce n'est pas de leur faute" et elles liront avec enchantement cette version du "Petit prince", pour se souvenir qu'"on ne voit bien qu'avec le cœur", qu'"on ne connait que les choses que l'on apprivoise", que "tu deviens responsable pour toujours de ce que tu as apprivoisé" mais "on risque de pleurer un peu si on s'est laissé apprivoiser".
"Il y avait sur la terre un petit prince à consoler" et "aucune grande personne ne comprendra jamais que ça a tellement d'importance".
Mon souhait est que mes petits enfants, après mes enfants, éprouvent la même émotion.
08:00 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature, bd
30/09/2008
mes vacances ratées avec Nicolas Sarkozy
Mes vacances ratées avec Nicolas Sarkozy
Guillemette Faure
Editions Ramsay
Guillemette Faure était la correspondante aux Etats-Unis du Figaro, donc pas vraiment une gauchiste anti sarkozyste.
L'année dernière, pendant l'été, elle a été chargée de suivre les vacances de la famille Sarkozy aux USA, au bord du lac Winnipesaukee ("le sourire du grand esprit").
Il ne se passait rien, et elle avait pour tâche de raconter qu'il ne se passait rien dans le meilleur des mondes possibles.
Elle a pu vivre "en direct" la différence entre les journalistes américains et les journalistes français à l'égard des Présidents.
Elle a pu voir comment Sarkozy utilisait la presse et donnait ses directives aux journalistes, en particulier les photographes, car ce qui compte surtout, pour lui plus que pour tout autre, c'est l'image.
Elle s'est demandée où était, pour Sarkozy et pour la presse, la ligne de partage entre vie publique et vie privée.
"Nicolas Sarkozy a voulu désacraliser la fonction. Il a créé l'envie d'entrer dans sa vie privée".
"Cet été là, le métier de journaliste politique allait beaucoup changer" ; "Il veut des mêlées de journalistes autour de lui." ; "il ne peut se passer d'être un évènement à lui tout seul".
"Pour le confort de ses nuits, Nicolas Sarkozy se fout de l'opinion quand il s'agit de choisir ses vacances" ; "2 000 mètres carrés, onze salles de bain, une salle de cinéma" ; "Tarif de la location : 22 000 euros la semaine". "Il n'a pas l'intention de jouer les M. tout le monde. Il a l'argent décomplexé." : "J'ai le droit d'avoir des amis, d'aller les voir en vacances".
Il est donc allé voir W, qui possède 650 hectares au Texas. "Bush serait prêt à tout pardonner à Nicolas, tellement il est content de ne plus avoir à faire à Chirac".
Guillemette Faure n'a pas écrit un pamphlet. Elle est seulement un peu désappointée, un peu critique, un peu moqueuse. Elle ne travaille plus pour le Figaro...
08:00 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature, politique, sarkozy
28/09/2008
Deux soeurs pour Léonard
Deux sœurs pour Léonard
Traduction du titre anglais : "Les cygnes de Léonard"
Editions J.C. Lattès
Italie 1489/1505
Deux sœurs pour Léonard (de Vinci, bien entendu), c'est affriolant, mais tout à fait exagéré.
Isabelle et Béatrice d'Este, filles du Duc de Ferrare sont restées dans l'Histoire, au moins l'Histoire de l'art, pour leur rôle actif dans la promotion de la Renaissance et l'appui apporté aux artistes. Léonard étant l'un d'entre eux. Le portrait, de profil, qu'il a réalisé d'Isabelle se trouve au Louvre.
Leur mécénat ne pouvait se faite que par l'intermédiaire de leurs maris : pour Béatrice, le Duc de Milan, Ludovic Sforza, dit "le Maure", qui perdra son duché au profit des Français, puis des Habsbourg, pour Isabelle le, plus modeste, Marquis de Mantoue.
Très vite le lecteur comprend que la rivalité entre les deux sœurs est d'abord une saine émulation.
Comme Isabelle, Béatrice aurait pu dire : "Je suis une femme qui a appris à vivre dans un monde d'hommes".
Plus que la rivalité de Béatrice et Isabelle se joue la rivalité entre les grandes principautés italiennes, dans laquelle le Pape est un acteur majeur, tandis qu'apparaissent sur la scène les rois de France (Charles VIII puis son cousin Louis XII, en attendant le petit neveu de celui-ci, François, qui se rendra célèbre à Marignan), décidés à revendiquer le royaume de Naples.
Les Vénitiens cherchent à s'assurer l'hégémonie sur les routes commerciales, alors que s'ouvrent, pour Gênes, les Espagnols et les Portugais, des horizons plus larges.
Florence est sous le joug de Savonarole qui oblige Botticelli à faire pénitence pour avoir peint des femmes nues...
Alliances, trahisons, tout un art, différent, mais aussi subtil que celui du Maître !
Citations
"Le cygne est immaculé et il chante doucement en mourant"
Léonard de Vinci
"Quand la fortune vient, saisis la par les cheveux de devant, car je te le dis, sur la nuque, elle est chauve".
Léonard de Vinci
"Plus vous vous serez rapproché des Cieux, plus brutale sera votre chute"
Dicton vénitien
08:00 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature, histoire