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20/08/2015

Être féministe au Moyen Âge

Christine de Pisan

Régine Pernoud

éditions Calman-Lévy

 

Le père de Christine vient de Bologne, "centre d'études juridiques les plus important sans doute en Occident, où avait pu enseigner une fille." "Ce n'est qu'au XVIIe siècle que la femme dû obligatoirement prendre le nom de son époux. Jusqu'alors, elle avait le choix entre le patronyme de son père, de sa mère, de son mari." Christine gardera le nom de son père.

Veuve à vingt-cinq ans, Christine ignorait les affaires de son mari. Il lui faudra plus de vingt ans, face au mépris de la justice pour une femme, pour récupérer les arrérages dus à son mari.

Christine écrit de la poésie. "Ce qui avait été un dérivatif va devenir une vraie carrière qui sera aussi son gagne-pain." En six ans, elle aura écrit quinze volumes.

Loin de se contenter de gagner sa vie par elle même, Christine engage le fer contre Jean de Meung, professeur à l'université de Paris.

Celui-ci s'est piqué d'écrire une suite au "Roman de la rose", best seller de l'époque, en en prenant le contre-pied. Alors que l'oeuvre originale est le symbole de "l'amour courtois" qui met la Femme sur un piédestal, comme le fait la poésie depuis le XIe siècle, Jean de Meung affiche un mépris total pour les femmes. "La quête amoureuse a totalement disparu. "La perte des valeurs courtoises, c'est l'effacement du rôle de la femme." "Comment faire entendre le langage de la poésie dans un pays livré à l'ennemi ?"

"A la chevalerie ont succédé les ordres de chevaleries dont se satisfait la vanité masculine." "Au règne du chevalier succède celui du professeur." Quand Henri de Lancastre, roi d'Angleterre par la grâce de Dieu, et héritier du royaume de France (à la mort de Charles VI, par la grâce du Traité de Troyes) entre dans Paris, il reçoit les félicitations de l'université.

"Au début du XIVe siècle, plusieurs femmes exerçant la médecine comme elles l'avaient fait jusqu'alors ont été poursuivies  parce que ne possédant pas le diplôme de l'université de Paris. Et pour cause : les femmes n'ont pas accès aux cours universitaires !"

Comment Christine peut-elle se permettre, elle, une femme, de prendre à partie un éminent universitaire ? Elle sera donc attaquée en tant que telle.

A la fin de sa vie, Christine aura le bonheur de voir une femme, Jeanne, prendre une part décisive dans la libération du pays. Elle aussi sera soumise aux jugements des universitaires. "L'université de Paris est l'instrument du roi d'Angleterre." Pierre Cauchon est l'ancien recteur de l'université. "Il y aura beaucoup de rancune ant-iféministe dans les attaques des docteurs de l'université de Paris lors du procès de condamnation de Jeanne."

"Pour Christine qui a passé une partie de son existence à tenter de convaincre ses contemporains qu'ils avaient tort de mépriser la femme, qu'il y a en elles des ressources indispensables au bon équilibre de la société, que ce monde masculin que représentent Parlements ou Universités ne saurait suffire dans la conduite du royaume, quelle justification ! Elle a toujours vanté le courage comme vertu féminine, exalté avec force exemples à l'appui ce que peut faire le courage d'une femme, montré que "fort et hardi coeur" peut-être l'apanage des femmes, car elles en ont besoin dans leur vie quotidienne."

 

 

09:34 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature, histoire

11/08/2015

La fin du Moyen-Âge

Le temps des Valois

Claude Gauvard

Professeur émérite d'histoire médiévale à la Sorbonne

éditions P.U.F.

 

Le temps des Valois, c'est le temps de la guerre "de 100 ans",  de la peste noire, des famines. C'est la fin de la féodalité : les souverains sortent vainqueurs des affrontement contre l'aristocratie, avec l'aide de nobles plus modestes.

"Cette crise a tété le ferment du développement des institutions qui ont façonné le royaume de France". Après trois graves défaites, Crécy, Poitiers, Azincourt,  la guerre ne se gagnera plus avec le "ban et l'arrière ban" féodal, mais avec l'artillerie, et avec une armée permanente au service exclusif du roi, payée par des impôts stabilisés, qui permettent de payer également les "fonctionnaires" qui assurent le fonctionnement de l'Etat. "La naissance de l'Etat moderne."

"Ce royaume de France est né en ce début du XIVe siècle." "L'attachement au royaume l'emporte sur l'attachement aux parents par le sang." "Existe-t-il un sentiment national ? Le devoir du peuple est d'obéir et de payer l'impôt. Dans cette société fortement hiérarchisée, chacun doit rester à sa place, ce qui tue dans l'oeuf tout développement du sentiment national."

"Le Moyen Âge, théoriquement, se termine en 1453, avec la prise de Constantinople par les Turcs, ou en  1492, avec la découverte du Nouveau Monde." Pour l'auteur, après la terrible Peste noire de 1348, rien ne sera plus comme avant. Comme d'autres historiens, elle montre qu'il n'y a pas de cloison entre Moyen Âge et Renaissance, l'influence italienne se manifestant avant même la fin de la guerre de Cent Ans.

 

"La guerre de Cent Ans est en partie née de la crise de la seigneurie qui avait vu ses revenus baisser." "Tout autant que la noblesse française, la noblesse anglaise, confrontée au même problème d'effondrement de ses revenus seigneuriaux, souhaite la guerre."

"La guerre civile entre les Armagnacs et les Bourguignons n'est pas née de la faiblesse du pouvoir, comme cela est toujours écrit, mais au contraire de l'enjeu fort qu'il représente."

"D'une certaine façon, la guerre de Cent Ans est une lutte des Gascons contre les Bretons." A Poitiers,  "Les combats voient s'affronter des Gascons et des Bretons contre d'autres Gascons et d'autres Bretons."

 

10:47 Publié dans histoire | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : histoire

23/07/2015

l'histoire de France sans les clichés

Nos ancêtres les Gaulois, et autres fadaises

François Reynaert

éditions Fayard

 

Vingt siècles en cinq cent pages en débusquant quelques clichés anciens que les historiens d'aujourd'hui ont remis en cause. François Reynaert n'est pas historien mais journaliste, au Nouvel Observateur et amateur d'histoire. Sur chaque période il cite ses historiens de référence.

Bien que cela soit une histoire du territoire qui est devenu la France, l'auteur traque le nationalisme. Et cela fait du bien. "La France n'est une nation que depuis peu, et la plupart des autres pays d'Europe le sont devenus encore plus récemment." Comme l'a écrit Pierre Goubert : "le travail de l'historien ne se ramène pas à l'exaltation des gloires nationales." 

Les Gaulois n'étaient donc pas les "premiers occupants" de ce qui allait devenir la France. "Ils ne sont pour rien dans l'érection des menhirs et des dolmens. Ce sont des Celtes venus du nord de l'Italie, derrière leur chef Brennus." "La Gaule, pure création coloniale" des Romains.

"Les fils de Mérovée étaient germaniques". Leur capitale était Tournai, actuellement en Belgique. La langue que parlait Clovis ressemblait plus certainement au flamand qu'au français.

"Des immigrés. Tous les peuples le furent ou le seront."

"Charles (qui deviendra Martel) a combattu les Arabes exactement comme il a combattu les Francs de Neustrie ou ceux du sud de l'Allemagne. Les Arabes poussaient des pointes en Gaule dans une logique de razzia, non dans une logique de conquête." Après Poitier (732) "ils sont rentrés chez eux, en Septimanie" (l'actuel Languedoc)

"Les Mérovingiens, les Carolingiens, ces rois d'origine germanique qui régnaient sur un empire européen n'étaient pas plus français qu'ils n'étaient allemands, belges ou italiens."

"Les Plantagenêts, famille angevine. Henri II, comme sa mère Aliénor d'Aquitaine, reposent près de Saumur où il a été élevé." "Les Plantagenêts, comme leurs cousins Valois, sont de langue et de culture française."

"A Gand, Charles (qui deviendra "Quint") a été élevé en français. A dix-sept ans, il ne parle pas un mot de castillan".

Les croisades ? "l'horreur de la réalité au nom de l'angélisme des intentions" "Comme fruit possible ramené des croisades par les chrétiens, je ne vois que l'abricot" (Jacques Le Goff)

"Ce n'est qu'à la fin de l'interminable guerre de 100 ans que la conscience que l'on est Français ou Anglais entre dans les esprits."

"Les crispations religieuses aboutissent au renforcement d'un puritanisme étroit que le Moyen Âge ne connaissait pas : tous les bains publics qui existaient depuis des siècles sont supprimés au XVIe"

"Tuer un homme, ce n'est pas défendre une doctrine, c'est tuer un homme" (un lieutenant de Calvin en désaccord avec la condamnation à mort de Michel Servet)

Mazarin était "le plus grand voleur de toute l'histoire de la monarchie". "Le sac du Palatinat (par les troupes de Louis XIV) a beaucoup fait pour développer un sentiment national allemand". "La famine de 1692-1694 a fait pratiquement autant de morts que la guerre de 14, mais en deux ans."

Napoléon ? "absence totale de morale et cynisme poussé" "Il refuse l'éducation publique pour les filles." "Trois millions de victimes dont un million de morts français".

L'auteur tombe parfois, lui aussi, dans le cliché : à propos des Templiers, n'est-il pas imprudent d'écrire :"le roi (Philippe le Bel) a eu ce qu'il voulait" : le trésor" ?

J'ai été surpris qu'il ne fasse pas allusion au Pacte germano-sovétique à propos du déclenchement de la seconde guerre mondiale.

Un livre qui traite "de l'histoire de notre pays, mais aussi de la façon dont elle existe dans nos mémoires."

"Le goût de l'histoire nous enseigne la modestie dans le jugement."

 

16:25 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : histoire

28/06/2015

Arménie 1915

Centenaire du génocide :

la ville de Paris accueille les collections du musée d'Erevan

Exposition gratuite à l'hôtel de ville jusqu'au 4 juillet

 

Lorsque je me suis rendu à Erevan, je n'ai pas manqué d'aller me recueillir au mémorial du génocide arménien. De là haut on voit le mont Ararat, qui se trouve en Turquie. La frontière est fermée entre les deux pays.

Au début du XXe siècle la population arménienne, essentiellement rurale, était nombreuse à l'Est de l'Empire ottoman. Les violences de masse ont commencé dès 1885. Aujourd'hui de nombreux Arméniens ont encore les clés de leur maison située en Turquie. J'ai vu le même phénomène dans les camps de réfugiés palestiniens.

Les guerres des Balkans se sont soldées par d'humiliantes défaites pour l'empire ottoman, amputant le pays de larges territoires, en particulier sur le continent européen. Pendant la Première guerre mondiale, l'empire ottoman est du mauvais coté, allié à l'Allemagne.

En 1913, un coup d'Etat porte au pouvoir des militaires nationalistes, "les Jeunes Turcs".

Les violences génocidaires contre les Arméniens, menées par l'armée avec le soutiens des chefs tribaux kurdes,  recommencent en décembre 1914, le long de la frontière avec l'empire perse.

En avril 1915, les élites arméniennes sont arrêtées.. Les déportations massives commencent, avec les massacres qui vont avec . Une faible minorité des déportés est arrivée dans "les lieux de relégation", une vingtaine de camps de concentration, mis en place à partir d'octobre 1915. L'année suivante, des massacres systématiques visent les survivants, en particulier femmes et enfants.

Entre 1922 et 1927, 58 000 Arméniens débarquent à Marseille.

 

C'est cette histoire terrifiante que raconte cette exposition...

 

19:03 Publié dans expo | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : expo, histoire, arménie

27/06/2015

"Celui qui reste a raison" (Brentano)

Deux dans Berlin

Birkefeld et Hachmeister

éditions du Masque

 

Berlin, hiver 44, jusqu'au 8 mai 45. Souvent sous les bombes. "Berlin était une ville à l'agonie, elle se changeait en bûcher funéraire du Reich". "Berlin était transformé en un tas de cendres et de ruines.""Beaucoup de gens dans cette ville n'avaient pas mérité ces bombes." "Les raids étaient sans doute destinés à la population civile afin de briser son endurance." "Les suicides étaient à l'ordre du jour."

Le marché noir est l'occasion de profits mirifiques.

Ils sont deux dans Berlin : un évadé de Buchenwald et un ancien policier de la criminelle, devenu membre des services de renseignement de la Gestapo, à qui il est demandé par sa hiérarchie d'enquêter sur l'assassinat d'un dignitaire SS. Enquête qui le conduira sur la piste de l'évadé.

Quelques retours en arrière nous remémorent la prise du pouvoir par Hitler, et les positions prisent par les Allemands, dans leur diversité, à ce moment là. "De quel côté pouvait bien être Dieu, sinon celui des moutons ?"

Il y est question de Nebe, l'ancien chef de la police criminelle, puis chargé d'un groupe d'"intervention" à l'arrière des troupes allemandes dans l'est de l'Europe. Déserteur en 44. Le policier n'a pas le cynisme de Bernier Gunther, même s'il se demande parfois pourquoi enquêter sur une mort alors que tant de personnes, y compris femmes et enfants meurent chaque jour. "Le tas de cadavres augmentait. La douleur ne servait à rien." Les auteurs sont deux professeurs d'histoire,  allemands, et non Ecossais comme Philip Kerr.

Comme dans "le Labyrinthe du silence", est posée la question de la responsabilité collective du peuple allemand, et individuelles des sadiques. "Plus personne n'était capable de tracer une frontière entre culpabilité et innocence." "Nous avons été trop nombreux à défiler. Par conviction, par opportunisme, par peur ou par indifférence. Mais on ne pourra pas déclarer tout le peuple coupable..." "Tout le monde n'a pas obéi aux ordres criminels." "Qu'on ne vienne pas me raconter plus tard que personne ne savait ou n'avait rien vu !"

 

"La force créée le pouvoir, et le pouvoir le droit"

"Les femmes avec leurs questions. C'était la cause de tous les problèmes."